Rentrée culturelle : D’ici et d’ailleurs
Cette saison, valeurs sûres et coups de gueule croisent l’humour et le voyage, dans un méli-mélo littéraire foisonnant.
Au Boréal, les essais se font intrigants: Ying Chen, avec La lenteur des montagnes, se penche, sous forme de lettre à son fils, sur son héritage chinois, sa réalité de migrante (16 septembre). La dramaturge de renom du théâtre contemporain Brigitte Haentjens livrera Un regard qui te tracasse, un essai sur le théâtre et la mise en scène fourni selon son parcours, celui d’une artiste en plein processus de création (16 septembre). Enfin, c’est sans doute Alain Saulnier, ancien directeur de l’information à Radio-Canada, qui publiera l’essai coup de poing de l’automne, avec ICI était Radio-Canada, où il retrace l’histoire de la construction et – surtout – de la déconstruction de la télévision publique. (Date de parution à confirmer.)
Le poète, musicien, slameur et travailleur social de formation David Goudreault dévoilera un nouveau recueil de poèmes en septembre. À paraître aux Écrits des Forges, le nouveau recueil de Goudreault s’intitulera S’édenter la chienne et regroupera quelque 200 pages. Après Premiers soins – qui a retenu l’attention des critiques et du public –, quelques publications collectives, un nouvel album offert au printemps dernier – La faute au silence –, le poète revient avec une œuvre assez introspective où il explorera une panoplie de thèmes, dont la dépendance, ses anciennes amours et l’égocentrisme. Parions qu’il manie ces thématiques avec le même humour décapant qu’on lui connaît.
Chez Héliotrope, l’une des figures de proue de la maison d’édition, Catherine Mavrikakis, dévoile son sixième roman, juste à temps pour la rentrée. La ballade d’Ali Baba évoque cette fois-ci la figure du père – nommé Vassili –, l’Amérique – toujours faste et rutilante –, de New York en passant par Las Vegas et jusqu’à Montréal, où la vie et la mort se côtoient, au quotidien, comme Mavrikakis sait si bien le faire dans ses écrits.
Pour faire suite au documentaire Bidonville: architectures de la ville future, le réalisateur Jean-Nicolas Orhon et le chercheur et professeur Nicolas Reeves publieront La maison, la ville et les gens: le phénomène bidonville aux Éditions du passage, le 22 septembre. En visitant les bidonvilles de 11 pays du monde, les deux acolytes ont pu créer – outre le documentaire – un livre qui se situe à mi-chemin entre l’essai et le carnet de route. Regroupant plus de 150 images, le bouquin suivra l’évolution du projet de documentaire qui a réuni Reeves et Orhon, tout en évoquant les structures sociales et architecturales du bidonville, et posera les questions qui nous permettront de tenter une redéfinition de la cohabitation.
Automne foisonnant chez les bédéistes et dessinateurs de Pow Pow, alors que Pascal Girard, Francis Desharnais et le duo Cathon – Alexandre Fontaine Rousseau, pour ne nommer que ceux-ci, publieront chacun un nouvel ouvrage. D’un côté, Sketchbook (16 septembre), de l’autre, Cousines vampires (28 octobre), et au milieu, Guerre des arts (28 octobre).
Au Quartanier, une panoplie de publications attendent le lecteur, mais une semble déjà se distinguer. Un début de siècle: essais sur la littérature est un collectif regroupant divers essais de 20 auteurs québécois (dont Samuel Archibald, Nicolas Dickner, Alexie Morin et Audrée Wilhelmy), sous la direction de Jean-François Chassay, auteur et professeur, qui se penche sur un certain renouvellement de la fiction, au Québec, depuis le début des années 2000 (11 novembre).
Trois parutions sont particulièrement à surveiller au Seuil, dès maintenant. Le lauréat du prix Femina 2012 pour Peste & Choléra, Patrick Deville, revient à l’avant-scène avec une série de courts chapitres retraçant le Mexique révolutionnaire des années 1930 jusqu’à l’assassinat de Trotsky avec, au centre du roman, Trotsky lui-même ainsi que Malcolm Lowry, admirateur du premier et auteur de Under the Volcano. Puis, Lydie Salvayre, avec Pas pleurer, raconte la guerre d’Espagne et ses révoltes, par l’entremise de deux voix qui s’entrelacent dans ce récit, celle de Georges Bernanos et celle de Montse, mère de la narratrice. Enfin, c’est au tour d’Antoine Volodine de livrer son roman, Terminus radieux, qui, au cœur d’une Sibérie magnifique, évoque l’ère post-apocalyptique de l’écroulement de la deuxième Union soviétique.
Automne foudroyant chez Ta Mère, alors que la nouvelle collection «Pop-en-stock» fait son apparition. Version imprimée de la revue web du même nom, elle proposera une série de documents sur l’étude de phénomènes de la culture populaire. Notons que deux parutions se feront en octobre: un essai intitulé YouTube théorie d’Antonio Dominguez Leiva; et un collectif d’essais nommé Séries télé, saison un, dirigé par Sébastien Hubier et Emmanuel Le Vagueresse. Ta Mère publiera aussi un roman de Jean-Philippe Baril-Guérard, nommé Sports et divertissements, qui suit le quotidien «à la fois vide et saturé» d’un groupe d’amis. Enfin, on s’en voudrait de passer à côté de l’univers ludique de Mathieu Handfield qui revient avec le roman Igor Grabonstine et le Shining. Ces deux derniers romans verront le jour en novembre.
Pour ma part, je considère que le nouveau roman de Charlotte Gingras « No man’s land » est à lire et à relire. Un vrai bijou, un livre qui comptera dans le monde littéraire québécois. On peut le considérer comme une des plus fortes publications de la rentrée d’automne 2014.