Simon Roy : Owen Hopkins, Esquire
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Simon Roy : Owen Hopkins, Esquire

Simon Roy est arrivé dans le paysage littéraire avec une offrande on ne peut plus atypique. Son Ma vie rouge Kubrick, mélange de fiction, d’essai et de biographie, a créé un réel raz-de-marée dans le milieu, l’année de sa publication, et a remporté le Prix des libraires du Québec. Livre poignant et coup de poing à la fois, puisant sa force dans un savant mélange d’écriture du nécessaire et de fictionnalisation du terrible, Simon Roy avait su, par son écriture fragmentaire, marquer les esprits et déstabiliser le moindre lecteur. Après ce genre d’entrée fracassante en littérature, il nous revient deux ans plus tard avec un roman, Owen Hopkins, Esquire, où il sonde la figure du père et la mythomanie.

Owen Hopkins se meurt quelque part en Angleterre. Son fils, Jarvis, quittera Montréal pour aller passer quelques jours à son chevet avant que ce dernier trépasse. Hopkins n’a fait que passer dans la vie de Jarvis, père sur la route, tantôt roadie, tantôt agent d’artiste, mais surtout menteur compulsif. La vie d’Owen Hopkins, Esq. est digne d’un film ou d’un roman, bien que ses proches aient l’habitude de rouler des yeux lorsque celui-ci ouvre la bouche. Plus on avance dans le processus de deuil de Jarvis, plus on s’enfonce dans le tissu de mensonges qu’est la vie de son père, défrichant lentement vers un drame ayant jeté l’opprobre sur Hopkins et l’ayant emmené à fuir Montréal pour son Angleterre natale.

Alors que l’auteur abordait, dans son premier livre, la figure maternelle par la lorgnette de sa propre fascination pour Kubrick, ici, il déboulonne le mythe du père. Cherchant à démystifier le recours compulsif au mensonge et la nécessité à s’inventer à l’extérieur du réel et à berner famille et proches. Encore servi par l’écriture fragmentaire, inventive, voire parfois anecdotique, de Simon Roy, le livre trouve rapidement son rythme. Le principal problème, c’est que ce deuxième opus souffre de la comparaison avec un premier livre d’une charge brutale et, force est de le constater, inégalée. Reste que nous assistons là à la naissance d’un écrivain, à la découverte même de l’urgence d’écrire et du plaisir de raconter. On a la vague impression qu’en quelques années, Simon Roy fut happé par la nécessité littéraire.

Owen Hopkins, Esquire
Simon Roy
Éditions du Boréal, 248 pages, 2016
ISBN : 9782764624432