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Yves Ravey : Trois jours chez ma tante

Quinzième roman d’Yves Ravey, Trois jours chez ma tante démontre encore une fois tout le plaisir et toute la finesse d’écriture de l’écrivain bisontin. Fier héritier de Simenon, Ravey revient encore une fois avec un roman flirtant entre le polar et le roman noir, porté par un style aussi concis que vif, dont la simplicité cache très souvent une maîtrise certaine. Un homme revient en France après 20 ans d’exil au Liberia. Le voyage sera court, comme en appelle le titre, juste assez pour qu’il convainque sa vieille tante de ne pas lui couper ses allocations mensuelles, sans quoi il ne pourra poursuivre son œuvre de charité qui vient en aide aux enfants exilés de pays en guerre. Mais comme toujours chez Ravey, c’est bien plus compliqué que ça.

Marcello Martini a quitté la France il y a bien longtemps, dans des circonstances des plus particulières. Son associé a été victime de délation et s’est fait prendre à la frontière franco-suisse avec une valise pleine d’argent. Sa tante, richissime femme vivant désormais dans une luxueuse résidence pour personnes âgées, l’a aidé à fuir et, depuis, lui vire un montant mensuellement pour subvenir à ses besoins. Quand elle décide de cesser ses virements, Marcello retourne en France pour la raisonner, mais à son arrivée, elle lui apprend qu’elle le déshérite sans plus d’explications. Et comme les mauvaises nouvelles arrivent rarement seules, le Haut Commissariat aux réfugiés devance sa visite à l’école qu’il a mise sur pied au Liberia; il semblerait que plusieurs papiers ne soient pas en ordre.

Plus on avance dans la lecture de Trois jours chez ma tante, plus le pauvre et désespéré Marcello se découvre sous son vrai jour – un être détestable et manipulateur, un minable personnage qui voit ses schèmes se fissurer l’un après l’autre. Les histoires de délation se succèdent au fil des scènes où tout est dans l’action. Jamais Ravey ne prêche par excès de descriptions – elles sont quasi inexistantes –, alors que le portrait de ses personnages se précise à même leurs dialogues, que l’écrivain tisse avec brio. Un roman qui se présente comme un carrefour de faux-fuyants où le lecteur laisse monter en lui angoisse et tension; un autre petit tour de force signé Yves Ravey, lui qui semble trop souvent tapi dans l’ombre.

Trois jours chez ma tante
Yves Ravey
Éditions de Minuit, 187 pages, 2017
ISBN : 9782707343598