Salman Rushdie : Joseph Anton: une autobiographie
Le 14 février 1989, Salman Rushdie prend le maquis après avoir appris que l’ayatollah Khomeiny a lancé une fatwa contre lui sous prétexte que son roman Les versets sataniques était blasphématoire. Vivant constamment sous surveillance policière, devant sans cesse changer de résidence, l’écrivain s’inspire de Conrad et Tchekhov pour créer son pseudonyme: Joseph Anton. «Il essayait de s’habituer à ce qu’il avait inventé. Il avait passé sa vie à donner des noms à des personnages imaginaires. À présent, en se renommant lui-même, il s’était lui aussi transformé en personnage de fiction.»
En choisissant d’écrire son autobiographie à la troisième personne, Salman Rushdie accentue l’aspect romanesque de sa tumultueuse vie en captivité. D’une densité presque vertigineuse, prenant parfois des airs de polar campé chez les riches et célèbres, ce récit décortique jusqu’à l’obsession la genèse du roman maudit. Alors qu’il raconte avec humour son quotidien de prisonnier ou qu’il se remémore avec émotion sa jeunesse, Rushdie brosse aussi un portrait du monde dont il a été coupé pendant près de 10 ans.
Ainsi revit-on en sa compagnie les années Thatcher, la fin de la guerre froide, les attentats du World Trade Center, que l’auteur commente avec les yeux avides d’un homme privé de liberté. Ne se donnant pas toujours le meilleur rôle, n’hésitant pas à pointer ses défauts et ses erreurs, Rushdie apparaît au bout de cette colossale confession comme un homme simple doublé d’un courageux défenseur de la liberté d’expression.