Sophie Létourneau : Chanson française
«Chanson française n’est pas un roman: c’est une chanson d’amour comme on l’entend chez Barbara et Françoise Hardy», avance le communiqué accompagnant ce deuxième livre signé Sophie Létourneau. Chanson française, c’est une chanson d’amour comme on l’entend chez Ingrid St-Pierre, pourrait-on ajouter s’il fallait mettre le doigt sur une référence plus locale et plus contemporaine: même regard pudique et éternellement émerveillé sur l’aurore d’une passion dévorante, même mélancolie duveteuse mêlée d’ingénuité, même manière de faire pétiller un sujet vieux comme le monde.
La jeune professeure au primaire Béatrice Chevreau, une Québécoise, tombera donc pour un ingénieur français. C’est l’histoire toute simple de ce Chanson française, émaillé de doux couplets sur l’amour qui embrase et de refrains désenchantés sur l’anamour que Béa cueillera dans les bras d’un autre afin de se consoler d’un amour qui l’a démolie (vous suivez?). Une histoire qui, sans nier l’époque à laquelle elle appartient, s’abreuve à ce genre de romantisme livresque qui traverse les comédies de Richard Linklater.
Bien qu’il tranche avec le formalisme ou, du moins, le regard oblique sur l’art du roman que portent habituellement les parutions issues de l’atelier du Quartanier, Chanson française révèle une écrivaine au style pénétrant, capable de croquer en une phrase toutes les intentions que contiennent le regard séducteur d’un amant ou le geste attendri d’une amoureuse. Un beau petit roman doucement suranné, qui prouve que les cyniques n’ont pas le monopole de l’intelligence, à lire en sifflant l’apéro. Le Quartanier, 2013, 192 p.