BloguesBlogue de Laurent K. Blais

Les food fights entre rappeurs comme seule spontanéité (SXSW 2014)

Si je n’entend pas quatre fois par jour «Hannah Montana» des Migos, «Danny Glover» de Young Thug ou «My nigga», de YG, c’est que j’avais mes bouchons entrés un peu plus profondément que d’habitude.

Pour la grande messe de Fool’s Gold, le Montréalais A-Trak coupait le ruban de son nouveau projet collaboratif, Low Bros, au Empire Automotive Repair. Après avoir butiné avec Boys Noize (Unibrow) et Armand Van Helden (Duck Sauce), Macklovitch s’associe avec Lex Luger (que je décrierais à un néophyte comme le producteur rap le plus influent du 21e siècle), Metro Boomin (Atlanta) et, de Laval, High Klassified. La proposition de ce supergroupe n’est pas trop claire, même après une heure à visser des boulons invisibles dans le ciel.

L’exercice constituait essentiellement à célébrer le (impressionnant) répertoire de Lex Luger et celui (plus modeste) de Metro en collant le plus d’identificateurs sonores «Fooooooool’s gold» possibles. Il n’aurait pas été difficile, pour quelqu’un qui serait passé par là par hasard, d’en déduire que Fool’s Gold est un joueur majeur du rap contemporain (ce qui est loin d’être le cas). Mais j’assume que ça faisait partie du plan d’appropriation culturelle…

Rendons ses lauriers à César: A-Trak a réussi à rassembler le showcase de rap américain contemporain le plus complet, le plus pertinent, et sans l’annoncer nulle part. D’abord Migos et leur clique de Quality Control (dont le cri de ralliement «QCCCC!» est agréable à entendre en tant qu’expatrié du Québec) qui ont fait une longue toune de 25 minutes (on me dit à l’oreille que ça serait en fait 6 morceaux différents). Puis ça c’est accéléré, avec Travis $cott (excellent), Young Thug (pas pire, mais à ce point-ci je suis juste saturé de «Danny Glover»), Que («And by the way my name is not Bobby Johnson»… meilleure citation entendue hier) et YG (My. Nigga. Pu. Capable.). Il y a quelque chose d’aliénant (et d’un peu superflu) de voir les artistes pris dans un format des micro-performance (3-4 chansons) qui ne laissent aucune spontanéité, puisque par convention, ils doivent jouer ses morceaux du moment, qui sont ceux que les DJ jouent partout et qu’on entend dans toutes les autos sur 6th Street

Il fallait rester un peu après 2h pour un peu de folie et d’improvisation, alors qu’une guerre de nourriture entre le Suburban de YG et un autre d’un rappeur non-identifié a éclaté. Il y a eu un moment de panique quand les milkshakes, la moutarde et autres liquides ont commencé à voler dans les airs, et que ce n’était pas clair si le pistolet à la main de ce jeune Afro-Américain contenait de l’eau ou des balles (1ère option). Le camion de YG a ensuite décollé sur les chapeaux de roue, avec le rappeur à moitié sorti dehors par le toit ouvrant.