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Protéger le français, mais à quel prix ?

Le projet de loi 14 sur le renforcement de la protection du français est en train d’être examiné à l’Assemblée nationale. Lors des consultations publiques, plus de 80 mémoires ont été déposés – signe de l’intérêt suscité par la loi.

Cet intérêt est mérité. Le projet de loi 14 soulève des questions délicates.

L’importance de l’anglais au niveau mondial place le français au Québec sous pression. Il s’agit probablement du changement le plus évident depuis l’adoption de la loi 101: la pression ne vient plus des anglo-québécois ou du reste du Canada, la pression vient du fait que l’anglais est devenue de facto la langue d’échange entre les peuples.

Dans un tel contexte, il devient très difficile de négocier une loi qui puisse protéger le français au Québec tout en étant juste pour les minorités linguistiques. Ce sont eux qui se retrouvent à payer pour des circonstances externes, dont ils ne sont pas responsables.

La prudence est donc de mise.

Ce qui déplait dans le projet de loi 14, c’est justement le refus de la prudence. Un genre d’entêtement à vouloir traiter le problème du français au Québec en termes dichotomiques: les francos et les autres. Comme si une loi pouvait assurer la pérennité du français en marginalisant toujours un peu plus les minorités linguistiques.

Notamment, le projet de loi 14 caractérise le français comme LE fondement de l’identité québécoise, et édifie le français au rang de droit fondamental, au même titre que le droit à la vie, le droit de vote, etc. Rien de moins.

Au fond, l’identité québécoise est beaucoup plus complexe que ne le laisse paraître le projet de loi 14. Il y a matière à protéger le français, mais pas au prix d’une essentialisation identitaire, à la limite du sectarisme.

Dernièrement, dans une présentation TEDx, Daniel Weinstock se disait sceptique par rapport à l’impact de la volonté politique pour influencer le développement des cultures. S’il est difficile de prévoir comment le projet de loi 14 protègera effectivement le français à long terme, on doit néanmoins s’assurer que cette protection ne se manifeste pas de manière injuste et simpliste.