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L’Odyssée du cinéma kurde à la Cinémathèque

L'Odyssée du cinéma kurde à la Cinémathèque

 

En complément à la brève sur cet événement qui aura lieu du 28 octobre au 9 novembre, voici l'entrevue avec Hiner Saleem, réalisateur de Kilomètre zéro. Veuillez noter que le film, distribué par K-Films, sera à l'affiche au Parisien le 10 novembre (ce texte est paru l'an dernier alors que le film était présenté au FFM) :

Entre les grands crus et les petites déceptions du dernier Festival de Cannes brillaient quelques surprises, dont Kilomètre zéro, du réalisateur irakien né au Kurdistan Hiner Saleem (Vodka Lemon). Road movie irakien campé durant la guerre Iran-Irak, Kilomètre zéro met en scène un soldat kurde rêvant de fuir la dictature de Saddam Hussein (Nazmo Kirik) et un chauffeur arabe (Robert Alazraki) qui doivent traverser le pays afin d'aller porter la dépouille d'un martyr de guerre à sa famille.

 

Une rareté à voir, étant donné la situation du cinéma en Irak: « En 80 ans, l'Irak a produit dans toute son histoire moins de films que l'Inde en produit en 3 heures ou que la France en produit en 2 jours, c'est-à-dire moins de cinq films, raconte le réalisateur rencontré à Cannes. À huit ans, j'ai été surpris de découvrir qu'à la télé, les gens ne parlaient pas notre langue, et je me suis juré de faire passer le kurde dans cette machine. »
Cela dit, cette réalisation de Saleem, réfugié politique résidant à Paris, n'est pas le premier film de fiction à illustrer le triste sort des Kurdes forcés de quitter leur pays malgré toutes ses richesses, à l'instar du héros, personnage inspiré par le frère du cinéaste. Ainsi, l'Allemand Roland Suso Richter en rendait compte dans le cruel Pour une poignée d'herbe de même que le grand réalisateur kurde Ylmaz Güney avec Yol. Cependant, Saleem n'arrive pas à susciter autant d'émotions que ses prédécesseurs, préférant la distanciation: « Je suis assez pudique, assez discret, mais je n'ai pas envie non plus de créer un film sans haine », se défend celui qui s'avoue ravi de la chute de Hussein, peu lui importait que cela vienne des Américains ou des Français.

 

Plutôt superficiel politiquement parlant – pour en savoir davantage, on devra s'en remettre à son récit autobiographie, Le Fusil de mon père -, Kilomètre zéro comporte néanmoins des images fortes et audacieuses, telles cette longue file de cercueils drapés des couleurs de l'Irak et les apparitions de la statue géante de Saddam dans le désert. Un film risqué? « Vers la fin du tournage, au Kurdistan, raconte le réalisateur, un officier de la sécurité m'a pris à part pour me dire de tout cacher après le tournage parce qu'il avait appris qu'un groupe de terroristes voulait se faire passer pour une équipe de tournage. »