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Cannes 2007 : Blue jeans sur la plage 2

Arcand et Labrèche lors du tournage de L'Âge des ténèbres.

Suite des propos recueillis au 5 à 7 de L'Âge des ténèbres.

Ça ressemblait drôlement à une version définitive ce qu'on a vu ce matin.

Denys Arcand : «Oui, c'est la bonne, ça changera pas, c'est la version que j'aime et j'en suis heureux. Je n'ai pas retravaillé le montage pour Cannes ; ce qui a pris le plus de temps, c'est le CGI, les effets spéciaux d'Hybride – la gang qui a fait 300 ! Par exemple, la scène où Diane Kruger disparaît dans la douche a nécessité ce genre d'effets spéciaux. Il y avait une légende sur le plateau, on disait que j'allais réaliser Nitro 2. On s'imaginait la bande annonce : «If you liked The Barbarian Invasions, you will love Nitro 2

Dans les scènes de fantasmes de Jean-Marc, vous touchez à plusieurs genres ; est-ce l'influence de Pascale Marcotte, dont vous avez découvert son court Shopping extrême à SPASM, qui en est à l'origine ?

DA : «J'adore Shopping extrême ! C'est drôle que vous me parliez de Pascale parce qu'au début je la voulais comme second unit director afin qu'elle réalise la séquence médiévale. Faute de budget, il fallait donner l'impression de faire un film à 20M$ avec 8M$, c'est le directeur photo André Turpin qui s'est chargé de tourner en partie cette séquence. Dans Gina, il y avait des poursuites en auto, mais grâce aux scènes oniriques de L'Âge des ténèbres, j'ai exploré plusieurs types de cinéma qui sont loin du mien. C'était très agréable et jouissif à faire, mais je ne ferais pas tout un film comme ça.»

C'est votre film le plus alarmant mais le plus drôle.

DA : «Oui, il est situé dans un futur rapproché, demain. un petit demain. Combien de morts ont fait les épidémies à St-Hyacinthe ? On est cool avec ça, je trouve.»

C'est aussi le dernier de la trilogie.

DA : «Oui, it's over ! Ensuite, je vais faire mon dernier film. Ce sera un film bâti sur le souvenir ; j'ai les premières et dernières images en tête. Je vais partir de la biographie qu'a écrite Réal LaRochelle. Il y a encore beaucoup à faire, mais le film est en chemin.»

*

Denys Arcand a révélé tout à l'heure qu'il était déçu que son film ne soit pas en compétition, car vous auriez eu de bonnes chances de gagner le prix d'interprétation.

Marc Labrèche : «Y est fiiiiiiiiiin ! Quel homme civilisé, raffiné. Sans blague, tous les prix sont contestables. Moi, qui ne passe pas tous mes étés à Cannes comme vous, je remarque qu'ici il y a autant d'avis qu'il y a de monde et qu'on échange sans hargne sur le cinéma.»

Vous qui jouez des scènes déchirantes avec Françoise Gratton, qui interprète votre mère, et des scènes ludiques à la Kill Bill, aviez-vous l'impression d'avoir la chance de jouer plus d'un rôle à la fois ou dans plus d'un film ?

ML : «Oui, tout ça à la fois. Dans ma tête, faire un film avec cet état d'esprit libre et festif après Les Invasions barbares, c'est courageux. Denys n'a pas cédé sous la pression de répéter l'exploit des Invasions et a tourné un film très différent. Il a fait preuve de beaucoup de courage en l'écrivant et encore plus en le tournant, et toujours avec une grande sincérité.»

En parlant du discours de Bernard de Clervaux, Arcand a avancé que nous nous dirigions vers un nouveau Moyen Âge, êtes-vous d'accord avec sa théorie ?

ML : «C'est une vision d'artiste que je comprends très bien. Pour moi, L'Âge des ténèbres traite avant tout de la solitude, de l'incommunicabilité. Il existe de plus en plus de gadgets qui nous permettent de communiquer les uns avec les autres et de sauver du temps, et pourtant, nous nous retrouvons de plus en plus seul et nous manquons de plus en plus de temps. La fin du film n'apporte ni solutions, ni réponses. Moi-même, j'ignore ce à quoi ressemblera l'avenir de Jean-Marc.»

Sur ce, bonne montée des marches dimanche !

ML : «Merci, je vais tenter de ne pas m'enfarger dans ma robe !»