En attendant de pouvoir lire ce que Kevin Laforest vous a préparé sur les films de l'été, voici encore quelques critiquettes de films vus à Cannes. qui sait s'ils ne prendront pas l'affiche chez nous d'ici un an.
Maigret hongrois
The Man From London |
Film très attendu, The Man From London de Béla Tarr, adaptation d'un roman de Simenon que le Français Henri Decoin et le Hollandais Jan Keja avaient déjà porté respectivement au grand et petit écran, raconte en une suite de longs plans séquences, dont la beauté à couper le souffle nous saisit dès ces premières images où l'on voit ce bateau sortant du brouillard, le destin d'un employé maritime qui sera témoin d'un crime. Malgré le jeu intense des acteurs, la Britannique Tilda Swinton en tête, ce monument de beauté en noir et blanc a malheureusement été l'une des oeuvres les plus sifflées du festival.
Sans frontières
De l'autre côté |
Prix fort mérité du scénario, De l'autre côté de Fatih Akin nous transporte d'abord en Allemagne où un vieil homme turc, Ali, prend sous son aile une prostituée d'Istanbul à la recherche de sa fille, Ayten. Après la mort accidentelle de cette dernière, le fils d'Ali se rend en Turquie afin de retrouver Ayten, qui, à la recherche de sa mère, se trouve à Hambourg où elle s'est liée d'amitié avec une étudiante, au grand dam de la mère de celle-ci (Hanna Shygulla). Un récit bouleversant sur la filiation et le sentiment d'appartenance, dont la structure rappelle Inarritu, en moins complexe mais plus plausible (comprendre : paraît moins arrangé avec le gars des vues!), porté par des acteurs d'une sincérité remarquable.
La vieille dame et la guerre
Alexandra |
Certains ont dans vu Alexandra d'Alexandre Sokurov un film de propagande, or, il n'en est rien. Bénéficiant d'images d'une superbe luminosité et d'une trame sonore impériale, ce film magnifique qui met en vedette l'ancienne chanteuse d'opéra du Bolchoi Galina Vishneyvskaya, veuve du violoncelliste Rostropovitch, est en fait un fervent plaidoyer pour la paix. Certes, on pourrait lui reprocher un récit quelque peu sommaire, celui d'une femme allant visiter son petit-fils dans un camp en Tchétchénie, mais à travers le regard et les silences de cette grand-mère digne, c'est toute l'absurdité de la guerre qui nous saisit en plein coeur.
Flic de père en fils
We Own the Night |
Honnêtement, que venait faire We Own the Night de James Gray, sous-produit américain faisant l'apologie de la police en mode mélo et macho, dans cette galère? Même le grand Robert Duvall en patriarche fier de sa progéniture ni le talentueux Joaquin Phoenix en tenancier de bar reconverti en policier n'ont pu empêcher le naufrage.
Une liaison soporifique
Une vieille maîtresse |
Parmi les films que j'ai le plus détestés au cours du festival se trouve Une vieille maîtresse de Catherine Breillat, qui devrait s'en tenir aux récits originaux plutôt que de massacrer les oeuvres des autres, dans le cas présent, une nouvelle de Barbey d'Aurevilly. Je saluerai tout d'abord le courage et la persévérance de la réalisatrice qui, malgré qu'elle est maintenant paralysée du côté gauche à la suite d'une attaque cérébrale, s'est tout de même attaquer à un ambitieux film à costumes campé à l'époque de Laclos. Malheureusement, bien que les personnages évoquent littéralement Les Liaisons dangereuses, cette intrigue à propos d'un libertin sur le point d'épouser une jeune fille de bonne famille n'arrive pas à la cheville de la sublime adaptation qu'avait tirée Stephen Frears de ce roman. Dans le rôle de la sulfureuse et vulgaire maîtresse, la pauvre Asia Argento se révèle aussi exécrable que Rocco Siffredi dans les précédentes oeuvres de Breillat ; quant à son partenaire, l'androgyne aux babines de Jagger Fu'ad Ait Aattou, il partage avec la pornstar italienne le même regard de merlan frit. Pompeux et assommant.
Joyeux bordel
Promise Me This |
J'aime bien le cinéma d'Emir Kusturica, même si le jouissif chaos qui règne dans ses films finit toujours par me donner mal à la tête tant j'essaie d'imaginer la charge de travail du directeur artistique. Ainsi, je m'attendais à être séduite par Promise Me This et dès les premières images, je me sentais en terrain connu devant ces montagnards aux gueules impayables, cette musique tzigane entraînante et ces inventions « burtonesques » fleurant la rouille et la poussière. Toutefois, comme Kusturica l'a avoué en conférence de presse, « Depuis que j'ai commencé à tourner des films, je fais le même film. Mon psy m'a dit que c'était l'oeuvre d'un fou qui observe la folie. », je me suis trouvée en terrain si connu que j'avais l'impression de regarder des reprises. Bien vite, le délire annoncé tournait à vide. Il serait peut-être tant qu'il se recycle, ce bon vieux Kustu. Aussi, il aurait peut-être fallu lui dire qu'une jolie fille de 16 ans n'accepterait jamais d'épouser un gamin à peine pubère. Je vous jure, ça frisait la pédophilie! Chaque fois qu'ils s'embrassaient (très mal au demeurant), j'en avais des frissons de dégoût dans le dos!