Si vous le permettez, laissez-moi vous parler des trois derniers films vus à Tremblant.
Après m'être farci l'intense Anche libero va bene, j'ai pris une pause afin de reprendre des forces et m'atteler à Talk to Me, biopic de Kasi Lemmons sur Petey Greene, icône noire des années 60, car je craignais de ne pas toujours saisir l'accent du ghetto. De fait, il est plutôt fort, mais on réussit tout de même à bien suivre les hauts et les bas de ce repris de justice converti en DJ qui secoua la baraque dans une radio blanche à coups de hits soul et de coups de gueule bien sentis.
Il est vrai que le film est assez classique dans sa forme, de sorte que même si l'on a jamais entendu parler du mec – ce qui était mon cas -, tout nous paraît familier. Certes, il est fascinant de voir comment Greene s'est hissé au sommet, d'autant plus que c'était à une époque où les Noirs avaient si peu de reconnaissance, mais sa descente aux enfers est tellement télégraphiée que l'on perd intérêt après une heure. Restent l'interprétation énergique de Don Cheadle et le jeu sobre de Chiwetel Eliofor. Et bien sûr, une trame sonore qui donne envie de danser.
Par la suite, j'ai bien failli rendre les armes devant le fastidieux film d'aventures de Laurent Boutonnat, Jacquou le croquant. Entre vous et moi, j'aurais préféré me taper l'intégrale des clips et shows de Mylène Farmer que réalisa Boutonnat dans les années 80. Quel ennui!
D'accord, la direction artistique est remarquable : les paysans ont l'air pauvres et sales (oublions leurs teints diaphanes et leurs dents blanches), et les bourgeois, décadents et. sales; les paysages du Périgord sont magnifiques et les décors sont tout à fait crédibles. Cependant, malgré les efforts des acteurs (Gaspard Ulliel, Marie-Josée Croze, Olivier Gourmet, etc.), on arrive pas à croire aux personnages. Serait-ce cette langue trop littéraire (le film est une adaptation du roman d'Eugène Le Roy) qui ne sied pas du tout à des croquants illettrés qui en serait la cause?
En fait, j'étais si peu captivée par ces guéguerres entre nobles et sans-culottes – et pourtant, j'aime l'Histoire -, que je me suis surprise à m'inquiéter pour la carrière française de Marc-André Grondin. Chaque fois que Gaspard Ulliel apparaissait à l'écran, j'avais l'impression de voir le Zachary version années 70 de C.R.A.Z.Y. À Paris, en janvier, alors qu'il y avait des affiches de Jacquou le croquant partout, j'avais remarqué la grande ressemblance des deux jeunes acteurs, mais au grand écran, c'en est troublant. Qui sait, on verra peut-être ces deux-là incarner des jumeaux. En espérant que ce ne soit pas sous la direction de Boutonnat.
Voulant éviter de célébrer la Fête nationale dans un bouchon, j'ai quitté les lieux tôt en après-midi, juste le temps de pouvoir clore les festivités sur un ton aigre-doux et un brin sexy avec la délicieuse comédie de moeurs d'Edward Blum, Scenes of a Sexual Nature. Ah et puis non, je ne vous en dis pas plus puisque le film sort le 13 juillet. Pour vous titiller, sachez seulement que Ewan McGreggor, dans la peau d'un gay volage qui rêve d'être papa, y est à croquer.