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Cannes 2008: Palmarès

Ouf! Qu'est-ce que je me suis plantée dans mes prédictions cette année! M'en fous, j'aime les surprises. En primeur, voici le texte qui paraîtra dans nos pages ce jeudi…

Le 61e Festival de Cannes s'est terminé par le couronnement d'un film illustrant la France multiculturelle, Entre les murs de Laurent Cantet.

Dans son discours à la cérémonie de clôture, animée par le désinvolte Edouard Baer (« It's a bonne franquette soirée » a-t-il annoncé), le président du jury Sean Penn a fait allusion au film de clôture de Barry Levinson, What Just Happened. Dans cette comédie satirique, Robert de Niro incarne un producteur de films devant convaincre un réalisateur de modifier la scène finale d'un film mettant en vedette Penn afin d'ouvrir le Festival de Cannes. « « Que vient-il donc d'arriver? » demanderez-vous lorsque vous aurez appris le nom des gagnants », a lancé Penn. De très belles surprises, aurions-nous envie de lui répondre.

Favori dans la course au Prix Un certain regard, remis à Tulpan de Sergei Dvortsevoy, Hunger de Steve McQueen est reparti avec la Caméra d'or. Côté court, Megatron de Marian Crisan a remporté la Palme d'or et l'on ne pourrait passser sous silence le Grand Prix Canal + remis au fabuleux Next Floor de Denis Villeneuve à la Semaine de la critique.

Le Prix du scénario a été attribué à Luc et Jean-Pierre Dardenne, pour Le Silence de Lorna, où à travers un remarquable portrait de femme les frangins belges doublement palmés illustrent une histoire d'immigration sombre, complexe et prenante.

Si le nom de Martina Gusman, qui incarne une jeune femme enceinte accusée de meurtre dans Leonora de Pablo Trapero courait sur bien des lèvres, le Prix d'interprétation féminine a été remis à Sandra Corveloni, qui interprète avec crédibilité une femme enceinte élevant difficilement ses quatre fils dans Linha de passe de Walter Salles et Daniela Thomas.

Face à Mathieu Amalric (Un conte de Noël d'Arnaud Desplechin), à Philip Seymour Hoffman, splendide dans la comédie dramatique douce-amère délicieusement absurde et insolite qu'est Synecdoche, New York de Charlie Kaufman, et à l'incroyable Toni Servillo en Giulio Andreotti dans Il Divo de Paolo Sorrentino, Benicio del Toro avait beaucoup de compétition. En pleine possession de son personnage dans Che, ambitieux diptyque relatant la vie d'Ernesto Guevara de Steven Soderbergh, l'acteur a vu ses annèes de recherches récompensées par ce Prix d'interprétation masculine hautement mérité.

Parlant de Il Divo de Sorrentino, c'est ce biopic politique explosif fort d'un montage musclé, de plans recherchés, d'une ambiance de film d'épouvante, d'une bande sonore farfelue et de répliques assassines qui a reçu le Prix du Jury.

Le Prix de la mise en scène échoit à Üç Maymun (Les Trois singes) de Nuri Bilge Ceylan dont le portrait d'une famille dysfonctionnelle hantée par la mort d'un fils bénéficie de la grande plasticité des plans aux cadrages soignés. Si les apparitions de spectres ont fait rire chez Philippe Garrel (La Frontière de l'aube, magnifiquement photographié, maladroitement raconté) et chez Wim Wenders (le poseur et esthétisant The Palermo Shooting), chez le réalisateur d'Uzak, elles émeuvent…

Le jury a remis le Prix spécial du 61e Festival de Cannes à celle qui incarne parfaitement une mère dénaturée dans Un conte de Noël, Catherine Deneuve, qui partage cet honneur avec Clint Eastwood, réalisateur de The Exchange.

En attribuant son Grand Prix à Gomorra, le jury a salué cette fascinante et réaliste (mais non sans quelques faiblesses) plongée dans la maffia de Matteo Garrone et le courage de l'auteur Robert Saviano, qui ne peut plus se déplacer sans ses gardes du corps depuis la publication de son livre.

Enfin, coiffant Waltz with Bashir d'Ari Folman et 21 ans après Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat, la Palme d'or a été remise à un film français: Entre les murs de Laurent Cantet. Inspiré du roman éponyme de l'enseignant François Bégaudeau, cette vivante et désarmante incursion dans une école secondaire met en vedette Bégaudeau lui-même en compagnie de jeunes acteurs non professionnels, tous d'un naturel sidérant. Réunie sur scène, la distribution multiethnique d'Entre les murs formait un émouvant et magnifique portrait de famille. Une belle façon de clore cette grande célébration du 7e art.

Sur ce, je vous reviens le 2 juin.

Bisous de la Croisette,

Votre blogueuse fatiguée mais comblée