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Juliette Binoche : Portraits In-Eyes

 

Vendredi dernier, je me suis entretenue avec Juliette Binoche en prévision de la sortie le 27 mars de L'Heure d'été d'Olivier Assayas. Comme on m'avait fait parvenir une copie de son livre Portraits In-Eyes, qui regroupe des poèmes adressés aux cinéastes avec qui elle a travaillé, de même que des portraits de ceux-ci et des autoportraits, j'en ai profité pour lui poser quelques questions à ce sujet.

Voir: Ces portraits de vous dans la peau de vos personnages, comment s'inscrivent-ils dans votre démarche d'actrice ?

JB: « Je les ai faits en deux mois, ces portraits. Au départ, ce sont les Cahiers du Cinéma qui m'avaient demandé de faire sept portraits, mais j'étais dans le tournage de L'Heure d'été et je n'avais pas le temps. Je me suis dit que j'avais un ou deux week-ends où je pourrais voir ce qui vient. Et c'est venu assez facilement. Lorsqu'il y a eu cette idée de rétrospective itinérante avec le spectacle In-I, à ce moment-là, je me suis dit que ça serait bien de dynamiser cette rétrospective, que ça ne soit pas une histoire de passé, mais plus de réponses. Une sorte de verticalisation de ces relations que j'ai eues à travers ces personnages, ces histoires. Il y a certains metteurs en scène que je ne peux plus voir, car ils sont partis pour un autre monde, d'autres avec qui je n'ai pu parler depuis super longtemps parce que la vie a fait en sorte qu'on ne s'est pas recroisés, d'autres qui sont plus dans ma vie. C'est aussi leur faire honneur, de les remercier, de parler des choses qui n'étaient pas toujours faciles, comme une sorte de regard dans le miroir, à travers eux, avec eux. C'est pour cela que j'ai eu le désir de mettre ces deux portrais côte à côte, souvent dans ce côté féminin-masculin, dans qu'est-ce qui nous fait nous rencontrer. Moi-même, j'étais surprise de ce qui venait parce qu'avant de peindre, on ne peut pas savoir. C'est au moment où ça se passe que l'on sait si ça tient la route parce qu'on sent qu'il y a une intensité. D'ailleurs, je crois que dès que je sentais qu'il y avait une intensité, pour moi, le portrait était bon.»

Voir: On sent le temps qui passe à travers ces visages, surtout ceux qui reviennent, comme Anthony Minghella (The English Patient, 1996, Breaking and Entering, 2006), Michael Haneke (Code inconnu, 2009, Caché, 2005). Dans le cas d'Haneke, il n'y a que cinq ans qui séparent les rencontres, mais on sent l'évolution psychologique, le cheminement artistique, le second portrait paraissant plus… tordu, inquiétant.

JB: « Avec Caché, il fait peur, Michael, il provoque, mais en fait, c'est lui qui a peur! Il est extrêmement peureux !» (grand éclat de rire)

P.-S. : Vous pouvez aller admirer ces encres sur papier à la salle Norman-MacLaren de la Cinémathèque québécoise jusqu'au 1er février. Par ailleurs, Juliette Binoche présentera Rendez-vous d'André Téchiné ce soir, à 19 h, à la Cinémathèque.