BloguesCinémaniaque

Sébastien Huberdeau sur Polytechnique

Sébastien Huberdeau, qui avait 10 ans lors des événements, incarne dans Polytechnique un étudiant qui sera témoin du meurtre de ses camarades de classe :

«D'un point de vue sociologique, anthropologique, beaucoup de grands films se sont inspirés de grands drames. Quant à parler de Polytechnique comme devoir de mémoire, Il faut faire attention, car je ne crois pas qu'on ait de devoir envers personne. Les citoyens sont bien libres d'aller le voir ou non, chacun a son opinion ou sa non-opinion là-dessus.

On dit souvent il ne faut pas oublier. Mais quoi au juste? Pour moi, un film soulève plus de questions qu'il apporte de réponses. Ce qui s'est pas passé n'est pas analysable et c'est là que l'art vient sublimer tout cela, rendre cela humain, vivable. Quatorze femmes ont été tuées, mais deux hommes se sont suicidés par la suite, les parents de l'un d'eux l'ont même suivi. Il ne faut pas oublier à quoi nous renvoient ces événements-là, le fait qu'ils puissent se produire et se reproduire, car Polytechnique, c'était la première tuerie du genre au Québec.

Les actes de cet homme sont monstrueux, mais ce n'est pas un monstre. Ses actes ont déchiré des familles, ébranlé une société à jamais. Moi, c'est plus le comment que le pourquoi qui m'intéresse. Ce que j'ai aimé de Polytechnique, c'est que nous ne sommes pas tombés dans une diabolisation du tueur.

Ce que j'incarne dans le film, c'est l'impuissance des hommes, des autres. On aurait souhaité un super-héros, mais ce n'est pas la réalité, car devant un fusil, on n'est ni un homme ni une femme, mais un être humain dont la vie est menacée. Jean-François n'arrive pas à gérer cette épreuve-là, d'où le geste qu'il commettra. Mon personnage a une certaine contemplation mélangé à de la stupeur, c'est par mon regard qu'on constate l'ampleur du carnage. C'est un long calme tranquille qui emmènera une tempête. Tout ça bout à l'intérieur, est sclérosé et tout ça se passe dans le silence. D'ailleurs le film n'est pas verbeux. On est allé à l'essentiel. Le but de Polytechnique n'est pas de condamner, mais de comprendre… sans pour autant cautionner les gestes.»