En 2009 sortait sur nos écrans Plus tard tu comprendras d’Amos Gitai, d’après le récit autobiographique de Jérôme Clément écrit en hommage à sa mère dont les parents furent déportés. Une quarantaine d’années avant de réaliser ce film, le réalisateur israélien avait été choqué par les propos d’un historien français qui défendait le maréchal Pétain et le régime de Vichy. Le jeune de 17 ans qu’il était à l’époque a ainsi compris que bon nombre de Français fermaient les yeux sur le passé. Bien que Chirac ait reconnu la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs en 1995, le constat demeure le même.
Pour la sortie de Plus tard tu comprendras, j’ai rencontré à Paris Hippolyte Girardot à qui j’ai demandé ce qu’il en pensait: «L’ethnocentrisme des Français existe réellement, avouait-il. Il y a cette idée que la guerre de 14-18 était horrible, tandis que celle de 39-45 était moins violente, en oubliant totalement le sort des Juifs. Malgré les discours de Chirac, le procès Barbie, etc., c’est quelque chose qui reste un problème compliqué en France. On s’en rend compte lorsqu’on aborde ce qui se passe en Israël; très vite, ceux qui parlent le plus fort et le plus vite, ce sont les antisémites, comme s’ils se sentaient le droit de le faire. Je crois que le film d’Amos tourne autour de cette chose qu’on ne dit pas.»
Plus tard tu comprendras sera projeté ce soir à 18 h 15 au FNC, à la Cinémathèque québécoise, à l’occasion de la Rétrospective Amos Gitai. Voici ma critique : Durant le procès de Klaus Barbie, un homme (Hippolyte Girardot, fiévreux) entreprend des recherches sur les membres de sa famille ayant été déportés durant la Seconde Guerre mondiale. Il se butera toutefois au silence de sa mère (Jeanne Moreau, sobre) et à l’indifférence, voire l’exaspération de sa soeur et de sa femme (Dominique Blanc et Emmanuelle Devos, discrètement efficaces). Avec finesse, Amos Gitai trace ici le portrait d’une famille aux prises avec de douloureux secrets. Composant d’élégants travellings et de fluides plans-séquences, il s’immisce respectueusement chez ses personnages tourmentés et donne du coup à ses acteurs une grande liberté de jeu. En résulte un drame bouleversant et intimiste sur l’Holocauste – malgré la musique de Louis Sclavis qui souligne peu subtilement le moindre élément dramatique.