Directrice générale de Téléfilm Canada depuis 2010, Carolle Brabant paraît bien réservée derrière ses lunettes rectangulaires. Et pourtant, dès qu’elle parle de notre cinéma, on sent en elle toute la passion qui l’anime. Mardi, peu avant un dîner de presse à l’Ambassade du Canada, à quelques minutes de marche du Berlinale Palast, j’ai pu m’entretenir brièvement avec elle à propos de l’engouement du cinéma québécois et canadien à l’international au cours des récentes années.
« J’espère qu’on n’est pas la saveur du mois, c’est pour cela qu’on travaille très fort, assure-t-elle. Notre rôle à Téléfilm Canada, c’est d’essayer le plus possible de faire connaître nos cinéastes, nos films, d’offrir des occasions de les montrer et de les faire briller. »
À cette fin, des projets ont été créés, dont Talents en vue : « Il s’agit d’une signature que nous avons mise en place il y a à peu près trois ans à Toronto. Elle est toujours liée à ce qu’on a comme sélection dans le festival. Par exemple, il y a deux ans, on avait organisé un événement sur le court métrage et un autre sur la diversité. Cette année-là, il y avait beaucoup de films sur ce thème, dont Monsieur Lazhar de Philippe Falardeau. On essaie toujours de trouver une personnalité pour agir comme hôte; on a eu la chance d’avoir Deepa Metha et Atom Egoyan. On a fait la même chose à Cannes avec les Cronenberg père et fils; la rencontre était animée par Cameron Bailey (ndlr : directeur artistique du Festival International du Film de Toronto). »
À Berlin, Talents en vue donnait la parole à trois réalisatrices autochtones, l’Australienne Catriona McKenzie (Satellite Boy, présenté dans la section Generation), la Néo-Zélandaise Chelsea Winstanley et la Canadienne Alanis Obomsawin (Richard Cardinal : Cry From a Diary of a Métis Child, présenté dans la section NATIVe).
« Ces événements internationaux-là sont très importants pour notre cinéma, pour sa reconnaissance et aussi pour les ventes internationales, qui ont plus que doublé pour nos films. Comme les sélections sont souvent annoncées tard, alors on voulait créer des événements nonobstant qu’on ait ou non une grosse sélection. Cette année, on est ravi parce que ça ne pourrait pas être mieux. C’est donc une signature qu’on veut continuer à développer » explique Carolle Brabant
C’est dans ce même esprit que sont choisis les films faisant partie de la sélection Perspective Canada : « Cela fait plusieurs années qu’on offre cette vitrine au marché du film, qu’on fait des visionnements de marché pour les films canadiens. Ce qui a changé, c’est qu’on essaie de plus en plus d’adapter la sélection au marché, de faire en sorte qu’elle forme une offre intéressante pour Berlin. Nous ferons la même chose pour Cannes. »
Peu avant la 63e Berlinale, le ministre du Patrimoine James Moore annonçait que le mandat de Carolle Brabant avait été renouvelé pour une période de trois ans. Au dire de la principale intéressée, elle entrevoit l’avenir de façon très optimiste.
« Quand on regarde la production indépendante au Canada, à la fois à la télévision, dans le long métrage et la production multimédias, je constate qu’on pourrait être facilement reconnu comme le plus grand producteur de produit indépendant dans le monde. Je regarde ce qui se passe à travers le monde et en film, je dirais qu’il y a la France et le Royaume-Uni avant nous; nous sommes probablement bon troisième et en télévision, bon deuxième. Je veux travailler à ce que non seulement l’international, mais que le Canada sache qu’on a de la production indépendante de qualité qui se compare plus qu’avantageusement à tout ce qui se fait ailleurs dans le monde. Je veux vraiment qu’on le sache ici, car c’est ce qui nous nuit pour l’instant. »
Les frais du voyage à Berlin ont été payés par Téléfilm Canada.