Dans le domaine de la procréation comme dans celui de la prostitution, on risque toujours de se buter aux préjugés dans toute leur diversité. Trancher le nuage opaque des opinions (souvent garrochées) en la matière c’est, qu’on le veuille ou non, s’embourber jusqu’au cou dans plusieurs milliers d’années d’instrumentalisation du corps féminin, mais aussi un refus de céder à une multiplicité de nouvelles définitions de la sexualité, de la famille et de l’amour.
Dans Les larmes d’Eros, Georges Bataille affirme que ce sont les premières guerres qui ont amené à la détermination de classes sociales, au moment où ceux qui avaient prouvé leur force sur le champ de bataille en récoltaient un pouvoir de domination sur autrui. Ces forces dominantes auraient eu l’idée d’utiliser les prisonniers de guerre pour en faire leurs esclaves, se libérant ainsi de l’obligation de travailler. Les prisonnières, elles, auraient été réduites à l’esclavage sexuel. Ainsi, les hommes de pouvoir pouvaient s’assurer de la procréation par le mariage, et de leur plaisir par la prostitution. Déjà aux premiers balbutiements de la société, le pouvoir et la richesse « tendaient à faire dépendre de l’argent la possession des femmes » à travers les « formes stabilisées » du mariage et de la prostitution. [1]
Inutile de dire que les enfants issus du mariage assuraient la descendance de l’homme et non de la femme. Le droit romain en institutionnalisait même le « pouvoir paternel » avec la patria potesta qui octroyait au père de la famille (pater familias) le droit de vie ou de mort sur sa femme, ses enfants et ses esclaves.
En ce sens, le capitalisme — système basé sur la propriété privée des moyens de production — est foncièrement patriarcal, si on le prend au sens familial où le corps de la femme est un moyen de (re)production de l’espèce détenu par l’homme grâce au lien du mariage. La marchandisation du corps des femmes, que ce soit pour la procréation ou pour la prostitution, s’inscrit donc dans un continuum d’instrumentalisation de la sexualité féminine qui ne date vraiment pas d’hier. Ainsi, dès lors que prostitution et procréation deviennent un enjeu politique, le débat social est stigmatisé. Or, s’opposer à la marchandisation du corps sans s’opposer au capitalisme lui-même ne fera jamais que contribuer au rayonnement de l’aura d’hypocrisie autour d’un discours qui voudrait libérer le corps de la femme du joug de l’exploitation sexuelle sans libérer le corps des individus du joug de l’exploitation du marché.
Aussi, ne pas considérer les changements dans les dispositifs du pouvoir et les acquis des grandes luttes sociales ne permet qu’une analyse simpliste de rapports beaucoup plus complexes que la dualité des sexes biologiques voudrait le faire croire. Comme le souligne Foucault dans Histoire de la sexualité, avec l’industrialisation, les mécanismes du pouvoir changent. Le pouvoir ne s’exerce plus sur le droit de prélever la vie, mais sur sa gestion, son contrôle, sa régulation. Quant aux forces qui s’opposent au pouvoir, les luttes sociales, elles prennent elles aussi la vie pour enjeu plutôt que le droit, ou bien elles formulent le droit autrement, c’est-à-dire le droit de disposer de sa vie, de son corps, de sa sexualité librement. Liberté s’opposant, en quelque sorte, à normalité. Selon les termes de Foucault : « Une société normalisatrice est l’effet historique d’une technologie de pouvoir centrée sur la vie. » [2] Lorsqu’il s’agit de sexualité, cette norme autour de laquelle le pouvoir organise et gère la vie est fondamentalement hétérosexuelle. Dans la théorie des genres, on parle d’hétéronormativité.
Voilà où je voulais en venir. Parce que tout le débat des derniers jours autour du « droit » d’un couple gai à avoir un enfant biologique avec l’aide d’une mère porteuse pue l’argumentaire économique et hétéronormatif.
Dans un monde en surpopulation où les orphelinats des pays pauvres débordent, je comprends qu’on puisse croire que procréer est un « fantasme narcissique ». En réalité, c’est un instinct très naturel. Je suis loin d’être persuadée que Denise Bombardier aurait évoqué un tel « fantasme narcissique de gens qui n’acceptent pas les limites physiques de la nature », s’il avait été question d’un couple hétérosexuel dont les gamètes seraient infertiles et qui aurait eu recours à la fécondation in vitro. C’est parce que le mythe de la procréation hétérosexuelle se trouve affecté qu’on invoque les limites de la nature. Il est beaucoup plus délicat de s’en prendre à un utérus dysfonctionnel qu’à l’absence d’utérus.
Tique-t-on autant sur les banques de sperme que sur les banques d’ovules ? J’en doute aussi. Mais outre le fait qu’il est médicalement plus complexe de donner des ovules que du sperme, quelle est la différence fondamentale ? Pourquoi serait-il plus acceptable qu’un homme vende ses gamètes qu’une femme ? Dans un rapport horizontal à la marchandisation des gamètes, l’un n’est ni plus ni moins acceptable que l’autre. Mais parce que le don d’ovule s’oppose à l’un des nombreux mythes sur la sexualité voulant que l’homme soit le principe actif — qui dissémine ici et là sa semence — et que la femme soit le principe passif — elle est sédentaire et gestationne —, l’image du catalogue d’ovules à vendre se drape de scandale.
Je comprends aussi l’inquiétude de certaines féministes devant les mères porteuses, comme celle devant les prostituées. Il s’agit d’une inquiétude liée à des pratiques immémoriales, évoquées au début de ce texte, mais remettrait-on en question « l’altruisme » d’une femme qui déciderait de mettre son enfant en adoption plutôt que de se faire avorter ? Remettrait-on en question « l’égalité entre les hommes et les femmes » si une femme acceptait de porter le foetus d’une amie qui aurait fait plusieurs fausses couches auparavant ? Dénoncerait-on le recours à l’adoption comme une industrie barbare posthumaine traumatisante pour l’ensemble des femmes qui « abandonnent » leur bébé, rongées par les remords jusqu’à la fin de temps, si ce n’était qu’encore une fois cette pratique s’oppose à un mythe hétérosexuel, soit que les femmes sont « faites » pour la maternité alors que les hommes peuvent très bien se passer de leur paternité ?
La vérité plate c’est que, quoi que s’en cachent la plupart des intervenants et intervenantes, le poids de l’hétéronormativité pèse bien plus lourd dans la balance de ce débat-là que la marchandisation du corps des femmes. Plus lourd, et plus sournois surtout, parce qu’il se dissimule, en filigrane d’un lexique économique faussement offensant. Car, à moins d’avoir un discours réellement anticapitaliste, s’il y a offense à «louer» son utérus à des amis, il y a la même offense à vendre son cerveau, son âme, son temps, sa vie à une entreprise.
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[1] Georges Bataille, Les larmes d’Eros, éd. 10/18, Paris, 1961-1971, 125 p.
[2] Michel Foucault, Histoire de la sexualité I : la volonté de savoir, coll. Tel, éd. Gallimard, Paris, 1976, p. 190
Je voudrais juste vous rappeler qu’une des raisons pour lesquelles les femmes étaient enfermées (et le sont encore dans certains endroits), de la jalousie, des meurtres d’honneur, etc. était que le patriarche voulait s’assurer que les enfants produits provenaient bien de ses gamètes pour transmettre aux mâles son héritage. C’est très patriarcal comme manière de penser, au contraire, et très matérialiste d’être obsédéE par le fait de vouloir absolument et par tous les moyens avoir SES enfants à soi (indépendamment du genre ou du rôle sexuel). Ce ne sont pas touTEs les parentEs potentielLEs qui sont obsédéEs. Mais certainEs le sont (pas nécessairement M. Legendre, que je ne connais pas).
Nous vivons à une époque où la technologie nous permet de satisfaire instantanément et n’importe comment tous nos caprices (l’état de notre planète en témoigne!). Mais l’éthique, elle, a du retard. Ce n’est pas une question d’hétéronormativité. C’est qu’il faudrait être sûrEs que l’enfant ne devient pas unE autre trophée des gens riches et célèbres. Il y a de bons et de mauvais parents de tous les genres et de toutes les façons possibles. Mais je n’aime pas le fait qu’on achète littéralement unE enfant. UnE enfant n’est pas une marchandise.
Car on a beaucoup parlé des parents, des adultes, dans cette histoire, mais fort peu des enfants!
P.S. le nuage opaque des opinions (souvent garrochéEs)
Je comprends ce que vous dites. Je voudrais simplement souligner que ce qui est patriarcal, ce n’est pas le désir d’avoir un enfant de son propre corps, ça, c’est instinctif. Si votre horloge biologique a sonné un jour, vous le savez. Ce qui est patriarcal, dans votre exemple, c’est de soumettre et violenter quelqu’un pour y parvenir à cette fin.
Par « acheter » unE enfant, qu’entendez-vous exactement? Car une « gamète » n’est pas unE enfant. Faites-vous référence aux frais encourus par l’adoption? Si vous faites référence à l’achat d’ovules, là où je pense que c’est hétéronormatif, je l’ai dit, c’est dans le fait que les banques de sperme ne sont pas questionnées de la même façon que les banques d’ovules. À savoir si, de manière générale, la vente de gamètes entendues comme la vente d’ovules ET de sperme est éthique, c’est autre chose. S’il suffit de changer le mot « vente » pour « don » pour que ce soit éthique, les arguments économiques lancés par certainEs sont faussement anticapitaliste (même si le procédé rhétorique est franchement intéressant d’un point de vue théorique).
Et, oui, vous avez raison, on pourrait parlé des enfants. Plus. Mais lorsqu’on le fait, on a tendance à le faire sans redéfinir le concept de famille qui, malgré les énormes changements sociaux, a conservé l’idéal de famille nucléaire, maman-papa-bébé, (très hétéronormatif aussi). Or, il existe aujourd’hui toutes sortes de familles : nucléaires, recomposées, monoparentales, homoprentales, etc. Alors pour parler des enfants sans être sous l’influence de préjugés, faudrait le faire en acceptant de revoir le concept de « famille » à la lumières des différentes réalités d’aujourd’hui.
P.S. Merci pour la correction.
»…à moins d’avoir un discours réellement anticapitaliste, s’il y a offense à «louer» son utérus à des amis, il y a la même offense à vendre son cerveau, son âme, son temps, sa vie à une entreprise. »
Pourquoi commencer avec »louer », et finir avec »vendre »?
Dans les deux cas c’est »louer ». Une »tite twist » dramatique(malhonnête?) pour appuyer votre opinion?
Votre commentaire mériterait d’être supprimé, il vient entaché un texte de qualité.
Une petite joute sémantique entre le terme «louer» et «vendre» c’est vraiment tout ce que votre cerveau a pu produire à la suite de la lecture de cet article? Franchement…
Sans rancune.
Cher Ludo,
Comment vous expliquez simplement?
Non, ce n’est pas « louer » dans les deux cas. Parce que si je me place dans l’optique de ceux et celles qui font ce genre de métaphores économiques, l’utérus est un espace, il serait « loué » parce que même si un foetus l’occupe, ton corps continue de t’appartenir; le temps que tu « vends » à l’entreprise, il ne t’appartient plus.
Faut arrêter de voir de la malhonnêteté partout. Ça doit être pénible.
« En ce sens, le capitalisme — système basé sur la propriété privée des moyens de production — est foncièrement patriarcal, si on le prend au sens familial où le corps de la femme est un moyen de (re)production de l’espèce détenu par l’homme grâce au lien du mariage. » Nous ne voyons pas le même capitalisme madame Lemieux-Couture. Plus le capitalisme progresse, plus l’institution familiale régresse. D’un début de libéralisme après 1789 à une société complètement dominée par la pornographie comme celle d’aujourd’hui, la famille n’a jamais cessé de perdre du terrain. Il y a certes un retour du religieux et du familial depuis peut-être une dizaine d’année, mais c’est en réaction justement à la perte de statut de la famille dans le discours social. Ça ne signifie pas que le capitalisme n’est pas mysogine. Ça il l’est, mais patriarcal, j’en doute.
Sébastien Lamarre, le capitalisme est, historiquement parlant, patriarcal. Tout le marche de l’emploi a été créé à la basse, par des hommes et pour des hommes. S’ il n’ était pas patriarcal, les femmes ne seraient pas payées 10% de moins que les hommes, et ce, dans tout domaines confondus. aussi, beaucoup plus de femmes que d’hommes occupe des emplois à temps partiel, en raison d’ obligation familiale, la plus part du temps. Pourtant, un enfant (selon notre société hétéronormative) ça se fait avec une femme ET un homme!…
Bien que l’institution du mariage se soit grandement affaibli au cours des siècles, M. Lamarre, ça ne signifie pas que le capitalisme ne soit plus un système patriarcal pour autant. Laissez-moi démêler « misogynie » et « patriarcat » pour vous. Par « misogynie », on entend la haine des femmes. Par « patriarcat », on entend un régime favorisant la domination des hommes et l’oppression des femmes. Comme le souligne Mme Morneau, les hommes jouissent encore de nombreux privilèges sur les femmes dans la forme actuelle du système économique (mais aussi politique et social).
Le capitalisme au 20ième et 21ième siècle à fait de la femme occidentale sa vache à lait en profitant de la place que les hommes lui ont donné, soit la ménagère qui tient le foyer, et de par cette position elle devient celle qui fait les choix de consommation quotidien.L’homme étant vu comme le pourvoyeur, retire de la fierté à « laisser » sa femme consommer et ainsi démontrer sa réussite financière et familiale, le rêve Américain quoi!Les femmes se sont depuis émancipées, il reste beaucoup de travail à faire mais des femmes avec des salaires(et sans enfants) sont une nouvelle manne pour les publicitaires, surtout qu’elle était déjà le public cible même sans salaire.Les femmes seraient responsable, directement ou indirectement de 80% de la consommation global en occident! Je crois que le capitalisme est patriarcal dans le sens ou se sont les hommes qui l’on construit mais le consumérisme qui en découle, est plutot feminin(au sens étriqué du terme)où du moins, c’est ce qu’on en a fait …à cause, entre autres, des hommes/publicitaires qui on profité d’un contexte social et d’un peu beaucoup de psychanalyse Freudienne/Bernays pour faire des femmes des consommatrices soumises aux diktat d’un monde patriache.C’est une raison de pourquoi j’ai beaucoup d’espoir dans le feminisme, car si il affranchie vraiment du patriarcat nous devrions, du même coup, nous éloigner collectivement du consumérisme. Je sais c’est pas très clair mon affaire, mais bon…
Effectivement il y a beaucoup d’homophobie dans les réactions…
Mais toutes les personnes qui se posent des questions par rapport au mères porteuse plutôt que d’applaudir des deux mains ne le font par homophobie.
Je fais partie des gens qui ne voient aucun inconvénient à ce que les homosexuels vivent ensemble, se marient, aient la garde des enfants de relations antérieures, adoptent des enfants, etc…
Mais je m’inquiète quand je vois l’apparition de catalogues de donneurs d’ovule et de sperme classés selon leur race et leur niveau social, l’application de techniques qui empêcheront les enfants à tout jamais de connaître leurs origines avec toutes les conséquence psychlogiques et médicales que cela implique. Je m’inquiète que des femmes puissent être engagées comme incubatrices… que l’abandon d’un bébé par la mère qui l’a porté ne soit plus un accident de la vie, mais un acte planifié de gaîté de coeur et parfois rémunéré…
Et je m’inquiète exactement de la même manière si ces nouveaux produits et services sont commandités par des homos que para des hétéros…
Avons-nous le droit de nous poser des questions éthiques à ce propos sans être accusés d’homophobie…?
Vous confondez homophobie et hétéronormativité. Ce n’est pas la même chose et il n’est pas question d’homophobie dans ce texte.
Je ne pense pas que quoi que ce soit aille de soi et, dans ce cas précis, je pense que certaines évidences, en apparence anodines, cachent une réalité que personne ne souhaite voir se réaliser. Si être de gauche c’est reconnaître l’importance de l’égalité effective et être de droite, de l’égalité formelle, je suis certainement de gauche. Mais je n’accorde à l’égalité effective qu’une prépondérance et en soupèse les conséquences.
Tout d’abord, je pense que de poser la question de l’origine de l’homosexualité est un manque de jugement à part entière. Certains diront que c’est naturel et d’autres répondront que c’est une maladie qu’il faut soigner, ou encore certains diront que c’est un choix et on répondra que c’est un mauvais choix et qu’une bonne baise pourra les faire changer d’avis. Tout ça pour quoi, au fond? À mon avis, pour pas grand-chose. Quel que soit notre opinion à ce sujet, ou la réalité de la chose, il n’y a pas grands enseignements à tirer d’une réponse à cette question. On n’aurait qu’une autre opportunité de se déchirer. Et il en va de même des raisons qui poussent les gens à vouloir un enfant, que cela soit pour fonder une famille, perpétuer leur lignée, assouvir leur narcissisme ou tempérer leurs insécurités.
Je ne tiens pas une position de principe contre l’homoparentalité. L’adoption nous montre que tout peut très bien se passer; et un grand nombre d’études affirment que les enfants ne se limitent pas aux parents quand vient le temps de trouver un modèle masculin et féminin. Toujours est-il que deux choses me posent problème avec la procréation assistée. Premièrement, pour faire de la procréation un droit, il faut soit la réclamer au nom d’un accomplissement existentiel, soit au nom d’une liberté à tout crin. Or, je ne vois ni comment établir l’inventaire des destins de notre espèce, ni comment défendre l’exercice d’une liberté sans bornes, c’est-à-dire, liberticide pour d’autres. Et c’est précisément là que surgit mon second problème, que Mme Bombardier évoque en parlant d’un consumérisme de l’enfant. Je ne veux pas voir ce qui est arrivé dans d’autres pays se produire ici. Je ne veux pas voir l’apparition d’une industrie de la mère porteuse.
En ce moment, des individus fortunés, et ce, pour toutes sortes de raisons (un couple infertile, un ou une célibataire, des couples homosexuels et même des couples dont la femme ne souhaite pas voir sa silhouette « défigurée » par la grossesse,) magasinent, en occident, le sperme et les ovaires nécessaires à la fécondation puis les envoient en Inde où des entreprises offrent le service de mères porteuses. Tout d’abord, je considère, au bas mot, qu’une telle pratique ne peut pas être acceptée ici considérant nos lois du travail. Il faut s’entendre, ce n’est pas un contrat que ces femmes ont le loisir de briser à mi-chemin si elles se trouvent insatisfaites de leurs conditions de « travail ». Sinon quoi, on considérerait l’avortement comme les déchets d’une industrie quelconque ou comme des pertes comptabilisées trimestriellement? Mais encore, ces femmes se voient entassées dans de grands dortoirs dont elles ne peuvent pas sortir afin de contrôler le régime qui leur est imposé.
Théoriquement, un État a le devoir de protéger nos droits, mais également de rendre disponibles les moyens d’en jouir. Je ne souhaite pas faire de la procréation un droit parce que je n’estime pas souhaitable de ménager une place à une industrie de l’enfant dont les femmes ne seraient que les chaînes de montage. On la poussera jusqu’où, l’aliénation du travailleur? Il faut bien voir la distinction, ici, entre louer ses bras ou son cerveau, et se louer soi-même. Il ne s’agit pas d’un métier comme un autre, du fait qu’on ne puisse pas en sortir aisément, portant en soi la propriété d’autrui, mais encore, qu’on ne puisse pas s’exemplifier dans nos fonctions et en retirer un sentiment de satisfaction personnel.
Aujourd’hui, je vois deux chemins de normalisation possible pour la procréation assistée. Soit on accepte ces pratiques chez nous, soit on continue de sous-traiter à l’étranger. Si ce que je viens de décrire ne correspond pas à ce que vous anticipez, partagez vos projections avec moi, je suis curieux.
On me répondra que mon objection est invalide du fait qu’elle se fonde sur un problème contextuel. Mais, il ne s’agit pas simplement du cas d’un adolescent, torturé par son acné, à qui nous pourrions dire que ce n’est que temporaire. Il s’agit d’une civilisation qui se targue d’être sortie du barbarisme préhistorique et du moyen âge par la loi et les lumières. Et voilà ce que je lui réponds, à cette civilisation. Si nous en sommes à nous complaire du fait que nos erreurs actuelles se corrigeront naturellement par la nécessaire avancée du progrès, c’est que nous sommes doués des qualités de sagesse et de prévoyance et que nous sommes également en mesure de nous opposer à ces erreurs pour les prévenir. Nous n’en sommes plus à nous faire éclairer par quelques sages aux projets civilisateurs. Nous sommes aujourd’hui les légats de leurs projets, de leurs lois et de leurs lumières. Pourquoi attendre qu’on te dise comment bien faire les choses pour ne plus les malfaire?
Excellent texte, de loin le plus éclairant que j’aie lu dans les suites de toute l’affaire récente (bien qu’il me reste un léger doute sur une telle association entre capitalisme et hétéronormativité à l’heure actuelle).
Petite correction néanmoins, l’expression latine pour « père de famille » en latin est « pater familias » (avec un « s », pour ceux qui ont fait un peu de latin c’est une forme archaïque de génitif).
Ce qui me paraît hétéronrmatif… Ce sont ces couples homosexuels qui veulent un enfant à deux, qui veulent reproduire le schéma de la famille traditionnelle avec 2 parents et les enfants, en niant la réalité biologique qu’un enfant naît d’une mère et d’un père.
Comme les 2 hommes veulent à tout prix un enfant à 2, évidemment il faut éliminer la mère biologique à la naissance de l’enfant, sans tenir compte des conséquences pour l’enfant et la mère porteuse.
Parlant de nouveaux modèles de famille, ne serait-il pas mieux pour le bien de l’enfant (si le bien de l’enfant était vraiment le centre de leurs préoccupations) de former une famille avec la mère biologique, où celle- ci exerce et assume pleinement son rôle de mère auprès de son enfant. Une famille avec 1 mère et 2 pères.
Ou s’entendre avec un couple de lesbienne pour former une famille avec 2 mères et 2 pères… les enfants grandiraient ainsi avec leurs parents respectifs.
Ce ne sont pas les nouveaux modèles de famille qui me dérangent. Ce qui m’inquiète, c’est s’obstiner à tout prix à faire un enfant à deux quand on ne peut pas biologiquement. On entre alors dans le déni: on élimine la mère, on prive délibérément un enfant de sa mère, faisant porter les conséquences de ses limitations naturelles à l’enfant plutôt que de les porter soi en assumant vraiment un nouveau modèle de famille.