Tout au long du mois de décembre, ce calendrier de l’Avent vous invite à découvrir à chaque jour un créateur ou une créatrice dont l’oeuvre s’élèvera dans le domaine public en 2018. Aujourd’hui, Jean-Michel Lapointe, bibliothécaire à l’UQAM, présente Léo-Paul Desrosiers et son oeuvre.
Disciplines: littérature, histoire, journalisme, bibliothéconomie
Écrivain majeur de la première moitié du XXe siècle québécois, Léo-Paul Desrosiers (1896-1967) est l’auteur d’une œuvre qui incarne et déborde son époque. Romans, nouvelles, essais historiques, Desrosiers a tâté divers genres littéraires pour explorer son obsession: l’histoire du Canada français. Il signe aussi quantité d’articles dans les revues et les journaux – dont plus de 1800 textes pour Le Devoir entre 1920 et 1927. Admirateur de Maurice Duplessis, disciple du chanoine Groulx, chantre de l’idéologie agriculturiste, romancier de la terre à la plume trempée dans l’eau bénite, il a tout pour nous déplaire. Et pourtant. Regardons-y de plus près.
Premier auteur québécois à être publié dans la fameuse collection « blanche » de Gallimard avec Les engagés du Grand Portage (1938), il accède dès lors à la reconnaissance du grand public. Ce roman psychologique à la langue riche et précise, qui s’appuie sur de solides connaissances historiques (la traite des fourrures dans les Pays-d’en-Haut au début XIXe siècle), a de quoi séduire la France: des Amérindiens, des coureurs des bois, une enfilade de péripéties dans la vastitude d’un continent sauvage et inhospitalier. Le livre est également un succès de librairie de ce côté-ci de l’Atlantique. Et, privilège réservé à une poignée d’élus dans notre histoire littéraire, il est constamment réédité. La dernière sortie a d’ailleurs eu lieu chez Fides plus tôt cette année.
Ce roman a toutefois relégué dans l’ombre tous les autres, dont L’ampoule d’or (1951), le véritable « sommet » de son œuvre romanesque aux dires de Julia Richer, sa biographe[1]. On le lira, entre autres, pour savourer certaines des plus belles pages de notre littérature consacrées à la nature gaspésienne. Le critique Pierre de Grandpré, quant à lui, avance que son meilleur livre est « peut-être » Les opiniâtres (1941), qui raconte la vie d’un défricheur en Nouvelle-France, dans la colonie des Trois-Rivières[2]. Quand les spécialistes divergent sur l’ouvrage qui compte, voilà probablement le signe de plusieurs choses : a) une œuvre forte b) la subjectivité du goût c) le ridicule des classements d) toutes ces réponses. Je serais, pour ma part, tenté de plonger dans Nord-Sud, où le protagoniste, paysan des années 1840, quitte son patelin miséreux pour tenter sa chance en Californie, là où la ruée vers l’or est susceptible d’enrichir son homme.
On peut lire la suite sur le calendrier de l’Avent 2018.