N.m. Fusion entre « larve » et « larbin »
1. Se dit d’un travailleur de l’information, censé défendre l’intérêt public, qui choisit plutôt de se placer du côté des notables sans que ledit public sache trop pourquoi.
2. Qui définit l’esprit d’un texte produit par un tel travailleur de l’information
Ex. : Ce texte de Gilbert Lavoie dans Le Soleil
C’est ainsi que j’ai consciemment décidé de décrire l’esprit derrière le texte de cet éminent représentant de ma profession après avoir lu sa chronique à propos des opérations policières autour du pouvoir. Dur à croire, suite à la lecture de son papier, que ce chroniqueur du Soleil, supposé digne ambassadeur du quatrième pouvoir, défende réellement l’intérêt public alors que la suite logique de son papier se définit comme suit :
1. Plèbe : tu rentres dans la maison à coups de bélier, sans avertir.
2. Notables : t’appelles avant, par « courtoisie ».
Déconstruisons un peu cet oeuvre « journalistique »…
« J’ai sursauté en entendant le mot «déstabiliser». Je veux bien comprendre que les policiers usent de stratégies pour interroger des mafieux. Mais les chefs de partis? Les ministres? Les maires des villes? C’est là que je tire la ligne. La démocratie est trop fragile pour permettre aux policiers de jouer aux Rambos et de «déstabiliser» des élus sous prétexte qu’on mène une enquête. »
Si la démocratie est si fragile, Monsieur Lavoie, c’est que ces mêmes élus ont oublié un principe fondamental : ils « représentent » les citoyens, ils ne les « gouvernent » pas. Le « gouvernement » n’est que la somme des ressources mises en commun par les citoyens via la taxation et il revient aux citoyens d’en disposer tel qu’ils le veulent par voie d’élections législatives où ils expriment collectivement leur approbation d’une plateforme qui, de toute façon, devra être soumise à un consensus parlementaire par voie des partis d’opposition…Mais je m’égare.
Ce qui est important, ici, Monsieur Lavoie, c’est de savoir que les élus sont des citoyens comme nous tous, que nous soyons éboueurs, chauffeurs d’autobus, étudiants, chômeurs ou, eh oui, journalistes – nos tribunes nous donnent une voix supplémentaire, donc un privilège dont on doit bénéficier avec responsabilité.
Quand un politicien et/ou un parti politique est soupçonné de corruption, la police enquête. Normal. Et c’est tout aussi normal qu’ils soient soumis aux mêmes tactiques d’enquête que cette plèbe que vous semblez, selon votre chronique, reléguer à un rang inférieur à celui des élus que vous semblez élever au-dessus de ceux et celles qui les envoient siéger à l’Assemblée Nationale – drôle de vision de la démocratie.
« J’ai appelé à l’UPAC, lundi, pour demander pourquoi on n’avait pas pris rendez-vous avec Philippe Couillard. On m’a répondu qu’il s’agissait de «stratégies d’enquête» que l’on ne commente pas. J’ai insisté. Après consultation avec ses supérieurs, la responsable des communications m’a expliqué que la planification de l’interrogatoire du chef libéral s’était faite «dans un souci de la plus grande discrétion possible »
Bien sûr que tout ça est complexe, c’est pourquoi les policiers suivent des formations poussées en droit et en techniques d’enquêtes. Et s’ils se trompent au point de porter grave préjudice à la personne sujette auxdites enquêtes, ils peuvent en répondre devant un comité de déontologie ou, même, en cour civile.
Vive la démocratie « fragile », cher Monsieur Lavoie.
« Les policiers ont le devoir de se rendre jusqu’au bout de leurs enquêtes, mais avec professionnalisme, et sans succomber à la tentation de faire du spectacle pour démontrer leur importance ou justifier des budgets supplémentaires. »
Donc, c’est professionnel de défoncer des portes de citoyens dans le cadre de perquisitions policières, mais ça ne l’est pas quand il s’agit de visiter des « notables » comme des politiciens ou des chefs d’entreprise? Pourtant, aux États-Unis, des politiciens et des PDG sont menottés en public et cités à comparaître devant des tribunaux – vous vous rappellerez que Kenneth Lay, l’ex PDG d’Enron qui avait fraudé sa propre compagnie en faisant croire qu’une compagnie énergétique pouvait faire faillite, est mort en prison. Vous vous rappellerez aussi des PDG des grandes compagnies automobiles qui ont dû siéger dans une salle où ils étaient assis en plongée devant une commission sénatoriale dont la tribune, qui représente le peuple américain, surplombait l’audience – le visuel est important pour remettre les gens à leur place. Oui, ils ont eu leur argent, finalement, mais la justice trouve toujours un moyen de se faire entendre. Il y a aussi toutes ces histoires de politiciens qui finissent par se retrouver, sans privilèges, devant la justice et dont l’histoire, d’intérêt public, se retrouve dans les médias. Bob Filner? Rod Blagojevich? Eliot Spitzer?
« S’il y a des gens corrompus dans les partis politiques, il faut les amener devant les tribunaux. Mais ce n’est pas une raison de traiter les politiciens comme des voyous. La visite sans rendez-vous à la résidence privée de Philippe Couillard était inappropriée. S’il avait refusé de recevoir les policiers, ce qui était son droit le plus strict, on lui aurait reproché de ne pas collaborer avec les enquêteurs. »
Était-il alors dans le droit le plus strict d’Amir Khadir, député de l’Assemblée nationale, de refuser la visite de la police pour une perquisition à son domicile dans l’affaire impliquant sa fille? Il a pourtant collaboré, pour le bénéfice de sa fonction et du travail policier, dans les circonstances. Le fait qu’il s’agissait de sa fille, une roturière à vos yeux, change-t-il la donne, cher Gilbert?
» Désireux de bien faire, il les a rencontrés. Mais comme il l’a dit en point de presse, «ce n’est pas une expérience humaine agréable». La SQ joue sa crédibilité avec des opérations comme celle-là. »
Non, la SQ joue sa crédibilité en menant à bien ses enquêtes, sans ingérence politique et sans appels préalables à des citoyens supposément privilégiés, comme pour le commun des mortels qui, nous l’oublions trop souvent, est le vrai tributaire du pouvoir en démocratie.
Rendons-nous à l’évidence, Monsieur Lavoie : la monarchie, l’aristocratie, le sang bleu, c’est fini. Nous élisons des représentants pour gérer ce qui est convenu d’appeler le « bien commun », c’est à dire le bien public financé par nos taxes et nos impôts. Il est normal qu’ils soient soumis, au minimum, aux mêmes règles que tous, moi, et même vous.
De vous présenter en défenseur d’un pouvoir mal défini avec un texte aussi larvinesque représente une honte à une profession censée protéger le public.