Et c’est ainsi qu’en ce beau dimanche, m’était revenue la fort agréable tâche de couvrir la troisième et dernière journée de la dixième édition du grandiose Osheaga. Une décennie d’un évènement qui fait rayonner notre belle par-delà tous les océans de la planète musique. Le parfait cocktail euphorie-nostalgie nous était promis. Nous nous y sommes plongés.
X Ambassadors
Cet après-midi ensoleillée a donc vu le jour au son de la dernière sensation du rock alternatif américain. Leur premier album à peine lancé, leurs chansons trônent déjà sur la bande-son d’une panoplie de jeux vidéos et séries télé. Il devait bien y avoir quelque chose. Malheureusement, leur popularité si soudaine trahit plus un profond conformisme qu’une quelconque originalité. Bien plein d’énergie mais absolument rien de neuf sous le soleil. Au suivant.
Jessica Hernandez and the Deltas
Nous avions à l’origine prévu jeter l’oreille à la pop californienne de Ryn Weaver, mais, en l’instant d’une chanson et demie, elle nous a convaincu du contraire. Elle a eu beau s’y lancer à fond, ses compositions faciles tombèrent cruellement à plat. Ce fut donc pour nous l’occasion parfaite d’aller fouiner du côté des petites scènes et quel bonheur d’y découvrir entre les cimes des cyprès, une autre chanteuse, celle-là avec autrement plus de fougue, avec du chien. Une petite bombe, entourée de musiciens de grand talent dans un cocktail de soul-pop et de rockabilly à la fois enjôleur et polisson. Le sourire qui revient.
Raury
Juste à côté, on l’a aperçu se lancer sur la scène dans une éclatante steppette de ninja. Un énergumène, comme un mélange entre Huckleberry Finn et son pot le vieux Jim, l’éclectique Raury semblait s’être littéralement plogué sur le 220. Mais c’est bien beau les acrobaties et les bras tendus, encore faut-il assurer musicalement et pour ça, on repassera. Doublé par l’enregistrement de sa propre voix sur laquelle il en ajoutait un peu quand ça lui plaisait (honteux), sa contrepointe de styles plutôt maladroite n’a jamais saisi. Un flop.
Gary Clark Jr.
De retour sur un site principal qui regorgeait désormais de festivaliers tout blanc et tout beaux, nous sommes arrivés juste à temps pour celui qui semblait taillé sur mesure pour cette case horaire. Tel un Jimmy des temps modernes, le guitariste texan a distordu sa six-cordes avec une parfaite aisance. Les yeux fermés, les doigts flottants, comme possédé par son instrument. Un talent pur comme on n’en voit pas souvent. On l’aurait toutefois pris un peu plus délirant, à la longue (et c’était pas si long) ça devenait un peu ennuyeux. Mais bon, il est jeune et il a, au bout de ses bras, un potentiel incroyable.
Father John Misty
Je mentirais en disant que je n’avais pas hâte de le voir. Son nom est sur toutes les lèvres depuis le début de l’année et ma curiosité avait été piquée. Et il a parti ça sur les chapeaux de roue, à genoux sur le stage en moins de temps qu’il en faut pour le dire. Tellement intense, tellement vite, c’en était totalement risible. Et c’est l’impression que j’en ai eu: le gars se moque de lui-même, des chanteurs de charme, des groupies et de la foule qui chante ses tounes ultra-quétaines. Drôle à la limite, mais à un certain point malaisant et musicalement profondément inintéressant. Très peu pour moi finalement.
First Aid Kit
Détour express au travers de la verdure pour déguster la gâterie que représentait une prestation des deux soeurs suédoises. Un moment d’éternité. Une grande bouffée de vérité et de coeur sous les rayons blanc filtrés par les épaisses branches de sapin. Des harmonies de voix cristallines, un folk touchant et envoûtant, en plus d’une surprenante reprise de Black Sabbath en tournant le coin. Que dire de plus, c’était magique.
Brand New
Désormais apaisés, c’est bien assis dans les estrades de pierre, qu’on s’est également régalé d’une dégoulinante poutine que de l’emo-rock enflammé de ce groupe de Long Island. Un peu de réconfort abrasif pour nos oreilles accoutumées à un peu plus de chansons fâchées. Les gars le font à leur façon, pour eux-mêmes. Ça se sent et ça fait du bien. Belle job.
Edward Sharpe & the Magnetic Zeros
De nouveau de retour à l’avant et la mer de têtes qui avait profité de notre absence pour grossir à sa pleine capacité. Quel site magnifique. Et à la tête de cette monstrueuse assemblée, un prêtre hippie complètement défoncé. Malgré la crevante absence de son irremplaçable comparse Jade Castrinos, son offrande, d’abord plutôt décousue, a graduellement su muté en une joyeuse et gigantesque fête. Le tout atteignant son comble de beauté alors qu’un fan paraplégique était porté à travers la foule jusque sur scène, puis embrassé par le messie. Un moment d’anthologie.
Alt-J
Il y avait si longtemps que je les espérais et mes espoirs les plus grands, mes attentes les plus élevées ont été pulvérisées. Le groupe britannique est parfait. Je ne me donnerai pas le défi irrelevable de décrire ici leur style, parce que ça ne ressemble à rien. Chacune des notes est fabriquée avec minutie, des mélodies délicatement ciselées, bâties comme des charpentes de murailles, comme des bronzes grandioses. Et le rythme, jamais convenu, plus qu’un soutien, il propulse la singulière évolution de ces pièces aussi dansantes que méditatives. Ok, j’arrête. Je capote.
The Black Keys
Et pour terminer, nous avons ingénieusement su nous glisser juste devant la scène pour sentir chaque vibration du duo rock no1 sur la planète. Deux boys totalement old-school, un rock suintant le gros blues sale, des balades touchantes sans être sirupeuses et des mega-hits dansants qui font exploser la foule. Une exquise recette qui a marqué sur toute la ligne. Encore plus que son refrain, quand la foule chante en coeur le riff de guitare de Gold on the ceiling, c’est qu’il n’est autre que parfait. Et moi, je le sais, à toutes les fois que j’entendrai la raclante entrée de guitares de Little black submarines, j’en aurai des frissons. Merci Osheaga. Je t’en dois toute une.
Revivez les deux premières journées du festival sur le blogue de Stéphanie Chicoine