Faire des êtres des émetteurs et des récepteurs à la manière de postes de radio. Voilà l’idée de départ, fort belle, de Heart as Arena, nouvelle pièce de la chorégraphe-interprète vancouvéroise Dana Gingras, présentée hier en première québécoise soir au FTA. La scène est d’ailleurs auréolée par une vingtaine de ces vieilles radios rétro que surplombent un plafond d’éclairage de la même forme circulaire. Deux interprètes ouvrent les premiers postes et ainsi s’amorce le dialogue des corps et du son. En capteurs irréguliers à la manière d’antennes, les cinq interprètes − dont Dana Gingras − entrent en communication, cherchent la reconnaissance, l’affection, la fusion. Évidemment, il y a interférence. Certains sont victimes de parasites radioélectriques, d’autres se retrouvent dans des étreintes sublimées par des chansons d’amour détraquées.
Le coeur est aussi au centre de la production. Le symbole de l’amour prend notamment la forme d’un énorme ballon rouge porté par une belle que tous s’arrachent. Des battements de coeur viennent aussi cadencer la pièce à quelques reprises. Les interprètes tenteront d’ailleurs à répétition de réanimer cette série de coups, de chocs, à la manière de massages cardiaques.
Avec cette récente création, Dana Gingras prouve une fois de plus qu’elle sait s’entourer de collaborateurs avec lesquels elle partage une vision. Ici, sa rencontre avec l’artiste sonore états-unienne Anna Friz − qui signe la géniale trame sonore (de l’opéra, de la pop américaine, japonaise, espagnole… entrelacé dans une toile de sons de radio, de tic-tac et d’électrocardiogramme) − est fluide et harmonieuse. L’éclairage et la scénographie du Finlandais Mikko Hynninen viennent en outre appuyer des tableaux tantôt poétiques, tantôt humoristiques ou bouleversants. Un spectacle électrique encore à l’affiche ce soir et demain à l’Agora de la danse.