C’était du solide, hier soir. Plus que de la musique, c’était le bonheur. Rien de moins.
Comme 200 autres personnes je ne voulais rater pour rien au monde le passage d’un soir d’Amazigh à Montréal, comme je ne voulais pas le manquer à son passage à Mawazine, Rabat en 2012, devant quelques 100 000 jeunes venus de partout du Maroc pour goûter à sa mimouna.
Je mâcherai pas mes mots: Amazigh Kateb est un bonheur ambulant. Un bonheur contagieux. Une voix encorcelante, un hajhouj sûr de lui-même accompagné d’un drum, pas moins sûr (Fathi Tabouche). Pour supporter ce duo infernal, une darbouka alternée de crakebs (Takfarinas Kichou). Et pour ajouter de la voix à ce show qui résonne encore dans mon corps et mon coeur, Meryem Saci et Sara Sahra ont assuré.
« Vive la Guembrépublique », on avait envie de crier hier soir, au milieu de cette piste de danse et de transe. La musique gnaoua, c’est un concentré de mémoire africaine, bambara, sahara, et Amazigh en est une porte-voix digne des anciens qui l’ont transmis de coeurs à coeurs, de corps à corps en passant hier soir par le Cabaret de Mile-end.
Et pour ceux qui se demandent encore qui est Amazigh Kateb, c’est le leader de Gnawa Diffusion, groupe franco-algérien né en 1992 à Grenoble. Rappelez-vous « Je voudrais être un fauteuil », une des rares chansons de son répertoire qui n’est pas d’inspiration afro-gnaoui-reggae.. Mais elle ne fait pas moins partie de ses influences andalouses.
Hier, avant d’entamer Les Algériens https://www.youtube.com/watch?v=Y5jDIZvucY0#t=42 , Amazigh nous a profondément ému en entonnant son chant en hommage aux martyrs de Palestine et de Bab El Ouad.. L’évocation s’imposait. On chante aussi pour ne pas oublier.. Les martyrs étaient à jamais vivants.
J’ai alors pensé à son père. Le grand poète Kateb Yacine disait à propos de la langue Tamazight « Est-ce qu’on doit s’unir pour tuer une langue ou pour la faire vivre? ». Pas étonnant que son fils porte le nom de sa langue.
Nous étions seulement 200, à boire de cette eau de source africaine, algérienne, terrienne.. Eau rare. L’eau d’Amazigh. Quelle présence!
Jeune, chaque fois que je répondais à un ami de classe que non je n’ai pas lu ce livre que lui a lu, ou pas vu ce film, que lui a vu, ou pas écouté cette nouvelle musique, que lui a écouté, il me disait simplement « Ta vie est perdue ».
J’ai presque envie de dire la même chose à tous ceux et celles qui n’ont pas été présents ce soir du jeudi 13 novembre 2014 au Cabaret du Mile-end.
Mais je n’oserais pas.
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PS: Rendant hommage à son père: https://www.youtube.com/watch?v=EFlVN5weBss
À Mawazine: https://www.youtube.com/watch?v=AZ0rwZHAedU