Le Festival des Films du Monde a 39 ans cette année. S’il n’existait pas, il aurait fallu l’inventer. On ne rendra jamais assez hommage à son Président-Fondateur et son équipe qui, contre vents et marées, ont tenu la barre de ce rendez-vous cinématographique, devenu au fil des années un monument international du patrimoine culturelle de Montréal.
Cette année, dans son discours d’ouverture, juste avant la projection de Muhammad, Serge Logique tenait à le dire « S’il y avait des Jeux olympiques des survivants, j’obtiendrais la médaille d’or ou d’argent ». Dois-je le rappeler ? Plusieurs parmi ceux qui, dans le passé avaient annoncé sa mort, sont morts!
Les médias l’ont lâché. Les grands bailleurs de fonds l’ont abandonné. Les politiques l’ont trahi. Mais les cinéphiles lui ont resté fidèles. Un grands nombre de créateurs de partout dans le monde lui sont reconnaissants. Maintenant qu’ils sont devenus des cinéastes reconnus, plusieurs répondent toujours présents à ce Festival qui les a mis au monde. Majid Majidi, trois fois lauréat du FFM, a choisi Montréal pour la première Mondiale de Muhammad alors que Toronto ou Cannes l’auraient accueilli à bras ouverts.
C’est pour rendre hommage au génie créateur du cinéma mondial que Serge Losique a inventé un rendez-vous unique. Avec le FFM les montréalais ont la possibilité d’avoir un accès privilégié à la conscience du monde.
Malheureusement, pour des raisons qui relèvent de la politicaillerie, ceux qui devraient faire du FFM un atout pour la réputation du Québec et de Montréal dans le monde, ce sont les mêmes qui font tout pour le tuer. Je ne reviendrai pas sur les détails d’une vieille guerre, la lettre de Danielle Cauchard, ex directrice générale du FFM, publiée il y a un an, en donne une bonne idée.
J’aimerais me tourner plutôt vers l’avenir. Force est de constater que si les cinéphiles sont fidèles, les salles du FFM, même celle de l’ouverture, ne sont pas aussi pleines comme elles l’ont déjà été. Les cinéphiles s’inquiètent. Dans les couloirs du Festival, ils parlent. Ils se demandent si le FFM se rendra à son 40 me anniversaire ? Les médias ont laissé entendre que la 39me édition serait compromise par manque de fonds. Des salariés auraient menacés de se retirer. Certains journalistes, nous le savons, auraient aimé annoncé l’enterrement du Festival. D’autres, par contre, sans avoir le courage de l’exprimer publiquement, ils tiennent à sa survie.
Personnellement, je ne tiens pas à la survie du FFM, je tiens à sa renaissance. 39 ans après sa naissance, le temps est-il venu pour le réinventer ?
Des plus jeunes pourraient-ils prendre la relève du FFM? Avec une nouvelle direction artistique, ces mêmes jeunes, pourraient donner plus de lustre à l’ouverture et à la clôture du festival. Avec plus de moyens, le FFM pourrait de nouveau sous-titrer en français beaucoup plus de films ce qui, en soi, attirerait beaucoup plus de cinéphiles francophones. Offrir des billets moins chers pour les étudiants. Mais avant tout, il faut « enterrer la hache de guerre entre certains bailleurs de fonds et la présidence du Festival » m’a confié un fidèle. Entre les médias et le FFM. Entre Montréal et Toronto.
Comment rappeler aux uns et autres que le FFM est d’abord une affaire d’intérêt général, d’intérêt publique ? Il devrait être, en principe, au dessus des partisaneries politiques, idéologiques et des luttes de pouvoirs. (Je salue en passant la présence de Denis Coderre à l’ouverture du FFM cette année).
Réinventer le FFM ne veut pas dire trahir sa mission, encore moins son esprit. Le réinventer dans la forme, lui donner un souffle nouveau.. Mettre plus de rouge sur le tapis rouge, le rallonger de quelques mètres, ça plait à certains journalistes qui ne résistent pas à la comparaison avec Cannes et Toronto. Les journalistes font semblant de l’ignorer, contrairement à d’autres festivals dits prestigieux, la véritable vedette du FFM, c’est le cinéma. Un cinéma qui ne demande qu’à être vu.
J’ai vu quelques 20 films cette année au FFM. 10 fois plus de marocains de Montréal auraient aimé voir le film marocain. Même constat pour les films japonais, chinois, portugais, brésiliens, péruviens, libanais, africains. Il n’est pas normal qu’un grand public montréalais soit exclu de son cinéma.
Personnellement, je demeure d’abord un simple cinéphile, un fidèle du FFM depuis presque 30 ans. Comme moi, des milliers d’autres aimeraient célébrer en 2016, le 40me anniversaire du Festival des films du Monde dans la paix.
Tout le monde en gagnerait.