

Jorane Peltier : Histoire sans paroles
Laurent Saulnier
Photo : Camirand
En fait, vous l’aurez deviné, son vrai nom est Johanne Pelletier. «Ce surnom m’est venu lors d’un voyage que j’ai fait en Haïti. Ce sont les enfants, avec qui je travaillais, qui, pour s’amuser, déformaient un peu les noms de tout le monde, sans qu’il y ait un sens quelconque. Ainsi, pour eux d’abord et pour bien des gens par la suite, je suis devenue Jorane.»
Cette Jorane Peltier, originaire de la ville de Québec, accomplit une chose peu commune: elle chante en jouant du violoncelle. «Pour moi, ce n’est vraiment pas difficile, me rassure tout de suite Jorane. Il faut dire que j’ai commencé par jouer de la guitare et du piano, avant de me mettre au violoncelle. Lorsque j’ai entrepris mon apprentissage de cet instrument, je me suis mise à chanter tout à fait naturellement, dès le départ, sans même très bien maîtriser l’instrument.»
Même si elle se produit en trio (avec une batterie et une guitare; non, non, pas de basse…), le point de départ de cette aventure est d’abord et avant tout ce fameux duo voix-violoncelle. Comme si la voix était également un instrument de musique. «Il m’arrive de ne faire que des basses avec le violoncelle pour accompagner ma voix, mais l’instrument sert surtout à faire des contre-chants et des mélodies. Le violoncelle peut aussi être harmonique.»
Il est très difficile de décrire la musique de Jorane Peltier. Et, vous l’aurez remarqué, même si elle chante, je parle de musique plus que de chanson comme telle. Parce que même si la voix est présente, elle ne prononce pas toujours des mots. Ce sont des chansons sans paroles. Autre différence, les structures musicales exploitées par Jorane et son trio sont loin de la charpente que l’on retrouve habituellement dans la forme chansonnière. Chez Peltier, pas de couplet-refrain-couplet-refrain-pont musical-refrain, etc. Ici, la musique est complètement libre, sans entrave aucune. Seule limite plausible: l’imagination du groupe.
Et ça, dans son enthousiasme un peu juvénile (la musicienne n’a même pas vingt-cinq ans…), Jorane y tient énormément. Elle travaille actuellement à la préproduction de son premier compact, qui devrait paraître d’ici un an, sur l’étiquette Tacca, sur laquelle enregistrent déjà Kevin Parent et France D’Amour. «Je n’ai jamais cherché ce que j’allais faire pour être hors du commun ou originale. Le but, c’était simplement de composer, à ma façon. Si le fait d’arriver avec quelque chose d’inédit, ça peut amener des gens à venir entendre ce que je fais, tant mieux.»
Décrire le genre de musique de Jorane Peltier relève du plus grand défi. Elle ne donne pas vraiment dans la chanson conventionnelle, mais elle ne va pas non plus jusqu’à l’autre extrémité, c’est-à-dire l’improvisation totale et intégrale. La douceur côtoie la rudesse, la liberté se trouve dans certains cadres bien précis, et la personnalité de Jorane Peltier domine tout. Apprécier la fille, c’est un premier pas pour apprivoiser cette musique unique.
Les 5 et 6 février
Au Studio-théâtre du Maurier