Notes : Eagle-Eye Cherry
Musique

Notes : Eagle-Eye Cherry

Ces temps-ci, Eagle-Eye Cherry (fils de Don et frère de Neneh) est un homme plutôt heureux. Son premier album, Desireless, vient tout juste d’être certifié platine aux États-Unis, ce qui signifie plus d’un million d’exemplaires vendus. La folie Eagle-Eye, qui avait débuté en Europe l’été dernier, est maintenant installée pour de bon en Amérique du Nord. Surpris? «Évidemment! lance Eagle-Eye. Surtout que cette certification est le fruit d’un seul extrait, Save Tonight. Tu sais, au départ, j’ai été signé par un petit label indépendant, en Suède, où j’habite. Si j’avais, un jour, pensé que je vendrais autant d’albums, je n’aurais jamais paraphé une entente avec une si petite étiquette!»

Il faut dire que Save Tonight est une vraie bonne chanson pop, avec un riff de guitare simple et efficace, une ligne mélodique puissante, portée par une voix peu commune. Le genre de chanson qui colle au cerveau. «Ça fait des années que je suis dans le show-business, que je traîne dans des studios avec des copains. Régulièrement, je leur disais que telle ou telle chanson était fantastique et qu’elle deviendrait un succès monstrueux. Chaque fois, je me suis trompé. Donc, si tu me demandes si je croyais que Save Tonight allait être un succès énorme, honnêtement, je dois te dire que non. J’ai arrêté il y a plusieurs années de faire ce genre de prédictions… On ne sait jamais.» Ma seule certitude, aujourd’hui, pour l’avoir vu sur scène à deux reprises, c’est qu’Eagle-Eye Cherry fait partie de ces rares musiciens qui, non seulement ont du plaisir à être sur scène, mais ne se gênent pas pour le démontrer. On se voit le 7 mars, au Spectrum. (Laurent Saulnier)

Don Caballero
Tout comme Dirty Three, Tortoise ou Pell Mell, Don Caballero s’est fait un nom en prouvant qu’il est possible de faire de l’excellent rock instrumental sans référence à la musique surf des sixties. Le groupe vient tout juste de lancer une compilation intitulée Singles Breaking Up, qui retrace l’évolution d’un son qui part d’un croisement brutal entre Jesus Lizard et les Melvins, jusqu’aux compositions plus aérées et plus polies qui se retrouvent sur What Burns Never Returns, paru l’an dernier. Mais il existe des constantes dans la musique de Don Caballero. Le rythme, par exemple: plutôt que de battre la mesure de façon régulière pour permettre à ses rameurs de pousser et de tirer en cadence, le batteur Damon Che crée des tourbillons dans lesquels les deux guitares tracent d’imprévisibles arabesques. Pour accoucher d’un style aussi particulier, il a bien fallu qu’à un moment donné ils abandonnent le carcan rythmique du 4/4 propre au rock; mais lorsqu’on interroge Ian Williams, l’un des deux guitaristes de la formation de Pittsburgh, sur les origines de la formule Don Caballero, ou que l’on tente de retracer les influences, il devient aussi insaisissable que sa musique. «J’ai l’impression_ Nous avons commencé_ Nous écoutions_. Voyons, laquelle de nos explications absurdes devrais-je te donner? Bien sûr, il y a d’abord eu l’influence du rock progressif des années 70, puis celle de groupes américains qui ont travaillé une esthétique plus extrême, comme Halo Five, Killdozer ou Big Black. + l’époque du rock progressif, seuls des musiciens chevronnés se permettaient de telles libertés avec la musique, alors que l’héritage du punk a permis à n’importe qui d’explorer les limites de son instrument. Nous sommes plutôt de cette école.»

Malgré la nature changeante de leur musique (un même morceau peut varier de tempo plusieurs fois), les gars de Don Caballero ne sont pas des improvisateurs, mais de grands perfectionnistes. «C’est vrai que nos morceaux sont très solidement construits, mais le but de l’opération consiste à cacher les structures évidentes, à les obscurcir, explique Williams. On ne veut pas que les gens soient capables de prévoir à l’avance l’emplacement d’un refrain, alors on complique volontairement les choses.» Le 7 mars, au Jailhouse. (Nicolas Tittley)

ärsenik
Si on ne devait pointer qu’un seul représentant de la deuxième génération de rappeurs français donnant dans le rap dur, celui des cités prêtes à craquer, on se tournerait sûrement vers Calbo et Lino, les deux frères constituant Ärsenik, les derniers rejetons du Secteur Ä (la bande du Ministère A.M.E.R.). Leur premier album, Quelques gouttes suffisent…, est particulièrement accompli, tant au niveau des textes que de la musique. Une maturité étonnante? Pas vraiment. «En fait, explique Calbo à l’autre bout du fil, on aurait pu faire partie de la première génération. On a commencé à écrire à peu près en même temps que Ministère A.M.E.R. et NTM, mais eux, ils en ont fait leur envie première. Pour eux, il n’y avait que le rap tout le temps; alors que nous, on jouait plus au foot qu’on ne faisait de la musique… Ce n’est que depuis que les gars du Secteur Ä nous ont approchés, parce qu’ils croyaient en nous, qu’on s’y est mis plus sérieusement. Et le fait qu’on ait attendu si longtemps avant de sortir notre premier album, c’était un peu une stratégie. Parce que lorsqu’on a sorti notre premier titre, on avait un style un peu trop dur pour l’époque, les gens misaient alors plus sur les mélodies et les voix féminines. On a plutôt fait quelques morceaux ici et là sur des compils pour habituer les gens à entendre du Ärsenik. De là, le buzz s’est créé, et quand on a sorti l’album, les gens l’attendaient vraiment.» Effectivement, 50 000 copies ont été vendues en quelques mois seulement, en France! Le 6 mars, les deux «frangins» tenteront d’injecter leur poison au public montréalais du lounge du Sona. Ils n’y feront que quelques titres, mais, paraît-il, quelques gouttes suffisent… (Eric Parazelli)