Roots Manuva : Accent grave
Musique

Roots Manuva : Accent grave

Roots Manuva est en fait l’ouvre d’un seul homme: Rodney Smith. On avait repéré son hip-hop particulier sur quelques compilations, dont celle de Ninja Tune Funkungfusion, sur Rebirth of Cool Vol 7, et sur la compilation Black Whole Style de l’étiquette hip-hop expérimental affiliée à Ninja Tune, Big Dada. C’est d’ailleurs sur cette dernière que Roots Manuva lancera, le 23 mars, son premier album intitulé Brand New Second Hand. «C’est une expression qu’avait ma mère, me raconte le Londonien grippé à l’autre bout du fil. Elle n’arrêtait pas d’acheter des meubles usagés, et moi je lui disais: "Mais pourquoi on doit toujours avoir des meubles de seconde main?" Et elle me répondait que c’était du seconde main tout neuf… Alors j’ai choisi ce titre en référence à l’existence à petit budget auquel j’ai cru depuis ma petite enfance.»

Si le rap anglais nous est encore à peu près inconnu de ce côté-ci de l’Atlantique, il a aussi eu beaucoup de difficulté à s’imposer chez lui, étant surtout au service de la communauté jungle et drum’n’bass. Et s’il y a maintenant beaucoup plus de gens qui s’intéressent à cet accent british particulier, ce n’est pas encore un genre installé, le rap américain prend encore énormément de place en Angleterre… comme partout ailleurs. Pourtant, le hip-hop d’un gars comme Mr. Manuva est résolument différent de ce que l’on entend habituellement. Et ce, tant du point de vue musical que sur le plan des textes. «Je suis beaucoup plus intéressé par les techniques de rap, par la musicalité et les structures non conventionnelles de cette façon de s’exprimer que par la réalité ou le côté concret des sujets traités. Mes textes parlent de la vie en général, de l’espoir, de la douleur, ou de la difficulté à communiquer, par exemple.»

Il faut aussi dire que Rodney Smith travaille en solitaire; frustré de devoir attendre après les autres, il s’est mis à produire ses propres musiques en paralèlle avec son travail d’écriture: «Je ne suis pas très orthodoxe dans mes techniques de production; j’utilise souvent des claviers, je n’achète pas de disques de breakbeat très coûteux comme d’autres le font… Je préfère utiliser les beats de mes vieux disques de dub cheap que je transforme pour qu’on ne les reconnaisse plus. J’ai beaucoup travaillé dans un studio tenu par une communauté aux horizons musicaux divers, explique-t-il. Il y avait des musiciens d’avant-garde, beaucoup de programmateurs électroniques… J’ai dû être influencé par cet environnement. D’ailleurs, je viens de collaborer sur une pièce du prochain album de Leftfield. Ce n’est pas du tout hip-hop, beaucoup plus hi-energy. Ce genre d’expérience me fait avancer techniquement, ça me permet de me familiariser avec d’autres façons de traiter les sons. J’ai aussi participé à une tournée Ninja Tune cet automne avec des gens comme Mixmaster Morris, Neotropic, Clifford Gilberto… Et simplement d’observer comment ils performaient leurs musiques en direct, ça m’a donné plein d’idées pour ce qui est de l’interprétation live de mon disque.»

Le 7 mars prochain, au Jingxi, Roots Manuva mettra les pieds sur une scène nord-américaine pour la première fois, en compagnie d’Ollie Teeba et Jake Wherry de la formation The Herbaliser qui officieront aux platines, en attendant la sortie de leur prochain album Very Mercenary, le 19 avril prochain. Une belle soirée en prespective…

Le 7 marsAu JingxiVoir calendrier Rock & pop