

Grigory Sokolov : Le piano rouge
Marie-Ève Bouchard
Photo : Vico Chamla
Depuis quelque temps, le monde du classique semble infecté d’une crise de vedettariat qui se manifeste par une volonté de populariser certains pseudo-virtuoses, qui semblent passer plus de temps à s’habiller qu’à réfléchir sur la pertinence de leurs interprétations. Heureusement, le Club Musical de Québec résiste à cette tendance en présentant bientôt Grigory Sokolov, pianiste russe de renommée mondiale. Gagnant du Concours international Tchaïkovsky en 1966, alors qu’il n’a que 16 ans, Sokolov entreprend par la suite une carrière peu médiatisée mais néanmoins prestigieuse qui l’amène à fréquenter les meilleurs orchestres du monde.
Cependant, le virtuose a une préférence pour les récitals. Dans une entrevue accordée en 1996, il avoue avoir connu très peu de chefs avec qui ce fut un vrai plaisir de travailler. Cette préférence pour le répertoire solo est également caractéristique des enregistrements réalisés par le pianiste, qui s’est attaqué à des ouvres telles que l’Art de la fugue de Bach, les Variations Diabelli de Beethoven et Petrouchka de Stravinski. Acclamé par la critique pour sa puissance, son agilité et sa sensibilité poétique, Sokolov est également réputé pour son exigence face aux pianos des salles de concerts qu’il examine avec une minutie légendaire. Car le pianiste est un interprète de caractère qui possède des opinions bien arrêtées. Par exemple: «Pour moi, la musique contemporaine est la musique qui est vivante aujourd’hui. Byrd est contemporain, même Bach est contemporainª…»
Le 23 mars, le public aura donc droit à un programme des plus variés puisque l’artiste couvrira plus de quatre siècles de musique en présentant des ouvres de Byrd, de Beethoven et de Ravel. La soirée débutera avec six pièces pour clavier tirées du répertoire de William Byrd, maître anglais de la musique pour clavier du XVIe siècle et auteur du célèbre Fitzwilliam Virginal Book. Ces pièces seront suivies de l’incontournable Sonate op. 2 no 3 de Beethoven, dédiée à Joseph Haydn. La deuxième partie du concert, consacrée à Maurice Ravel, débutera avec Sonatine (1903-1905), pièce en trois mouvements plutôt courte qui sera suivie de Prélude (1913), pièce de 27 mesures commandée par le Conservatoire de Paris et destinée à l’épreuve de lecture à vue du concours de piano. Finalement, le maître russe a choisi de terminer le concert avec cet adieu qu’est Le tombeau de Couperin (1914-17), hommage au célèbre compositeur mais aussi à la musique française du XVIIIe siècle, que Ravel avait dédié à certains de ses amis tombés au front.
Alors, amateurs de grande musique, préparez vos oreilles et attendez-vous à une soirée mouvementée puisque, selon Sokolov, un concert n’est pas une occasion de relaxer: «Un concert est un travail difficile pour tout le monde, pour l’interprète et pour les auditeursª.»
Le 23 mars
Au Grand Théâtre
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