Musique

Scène locale : Banlieue Rouge v.s. Tir Groupé: Le torchon brûle!

La compilation Rouge total que les défunts Banlieue Rouge devaient célébrer mercredi dernier, aux Foufs, ne sortira pas. Jusqu’à nouvel ordre. C’est que les ex-membres du groupe ont de sérieux problèmes juridiques avec l’étiquette Tir Groupé (qui existe toujours, malgré la chute du distributeur Cargo). Les propriétaires de Tir Groupé (Nicolas Bouchard et Luc-André Vincent) considèrent que les bandes-maîtresses de Banlieue leur appartiennent toujours, et veulent donc empêcher la nouvelle étiquette Attentat sonore de les utiliser avant d’en avoir négocié le rachat. Une curieuse histoire qui risque de se retrouver devant un juge d’ici peu, à moins que les deux parties ne s’entendent à l’amiable, ce qui, après avoir discuté avec Safwan et Nicolas, semble loin d’être possible. Deux parties, deux versions opposées:

«À notre avis, explique Safwan, on est libre d’utiliser nos anciennes bandes, car nos contrats ont été résiliés il y a belle lurette. Et, comme on a été la vache à lait de ce label pendant longtemps, comme ils ont fait beaucoup d’argent sur notre dos, ils ne sont pas près de lâcher le magot. La raison pour laquelle on n’a pas sorti notre compil, c’est que Nicolas Bouchard et Luc-André Vincent nous ont menacés de déposer une injonction. Ils considèrent que c’est leur droit. En plus, Nicolas a remis sur le marché nos anciens albums par le biais de Fusion III, où il travaille, sans notre approbation, et surtout, sans qu’on en touche un seul sou. Même lorsqu’on était sous contrat, l’argent ne rentrait pas… C’est une des raisons du bris de notre contrat avec eux. On a tenté d’arriver à une entente par le biais d’avocats, ils ont reconnu qu’ils nous devaient de l’argent, mais ne nous ont jamais payés. S’ils ne le font pas, c’est qu’ils veulent se protéger, car ils savent que si on a les moyens de les amener en cour, ils risquent de perdre. Cette menace d’injonction est stupide, parce qu’on était prêts à laisser tomber l’idée d’aller en cour à partir du moment où on nous foutait la paix. Là, on n’a plus le choix d’entreprendre des actions légales, et je pense que ça va leur faire très mal. Et je n’ai pas peur de dire que Tir Groupé n’est qu’un résidu de sous-merde sans les groupes qui l’ont fait. Ils n’ont jamais rien produit ou accompli sans ces groupes. Malheureusement, ces gens-là sont des rapaces, et ils vont sucer le sang des groupes qui les ont fait vivre jusqu’à la dernière minute.»

Au tour de Nicolas maintenant: «Il a fallu qu’on se batte légalement contre Cargo au moment de la faillite de la compagnie pour récupérer le matériel de Tir Groupé, et tous les groupes, y compris Banlieue Rouge, ont été informés de nos agissements. Cependant, ce n’est qu’en octobre 98 qu’on a pu légalement informer les groupes (comme BARF et Les Secrétaires volantes) sur leur états de comptes, c’est-à-dire combien on leur devait et leur inventaire en circulation. À partir de là, les groupes intéressés à négocier des ententes contractuelles ont pu le faire. Dans le cas de Banlieue Rouge, il n’y avait aucun dialogue possible. Leur position est purement commerciale; il y a cinq albums disponibles de Banlieue Rouge, et le groupe n’a jamais payé pour aucune des productions, que ce soit sur le plan promo, vidéo… Et ils ont été payés pour leurs droits d’auteur! Les bandes ont donc une valeur monétaire évidente, et ils ont profité du moment où on était en pleine bagarre avec le syndic de Cargo pour récupérer les bandes gratuitement, alors qu’ils n’avaient jamais sorti un sou de leurs poches. C’est malsain et opportuniste! À partir du moment où on a reçu une lettre de leur avocat qui nous réclamait les bandes, c’est sûr qu’on n’allait pas leur envoyer l’argent qu’on leur devait, ç’aurait été comme les aider à payer l’avocat. Alors on a dit: "Stop", on ne vous envoie pas d’argent tant que vous n’êtes pas prêts à négocier. Et ils sont encore sous contrat avec nous parce que la résiliation ne s’est jamais rendue devant la cour, donc le contrat est effectif et on continue à vendre des disques de Banlieue. En fait, ils ne veulent pas se faire payer, car la somme qu’on leur doit est tellement ridicule par rapport à la valeur des bandes qu’ils préfèrent dire qu’on est en défaut pour les récupérer en épongeant la dette. C’est une logique purement commerciale; alors lorsqu’ils sortent l’étandard du pauvre groupe indépendant qui se fait avoir, c’est de la grosse rigolade… Le problème, c’est que Safwan a la tête tellement grosse que ça ne passe pas… Il a toujours eu l’impression que Banlieue Rouge était les Béru, il plane totalement… Son attitude m’étonne à peine.»

Ouf! Qui a raison, qui a tort? On suivra le dossier…

Kabaret Kerozen 16
Il n’y a pas que de la chicane sur la scène locale cette semaine… Pat K, de Kerozen, vous convie encore une fois à une célébration (celle du printemps, cette fois), lors du Kabaret Kerozen 16, alors qu’il a choisi des formations qui en sont à l’étape bourgeonnante de leur carrière. On y verra (en plus du traditionnel volet poésie et burlesque dont s’occuperont Pascal Angelo Fioramore et Les Abdigradationnistes) la furieuse formation ska-core Cynical Czardas; l’énergie lourde et les mots coup-de-poing de Dilemme; l’éclectisme de la formation Karmad’aï, qui a renouvelé son matériel avec l’arrivée d’un nouveau chanteur; le retour de la formation hip-hop de Sherbrooke Livin’ Omies, finaliste de la dernière édition du Polliwog; et Les Cowboys Fringuants, dont je ne sais à peu près rien, sinon qu’ils donnent dans un «country yé-yé à forte teneur en party». Pat K terminera la soirée derrière les platines avec une sélection anarchique de drum’n’bass, world beat, électro et punk-core. Le 20 mars, au Jailhouse, 6 $.

Cité du rap
Mercredi, au Cirque, se déroulait la première semaine de préparation à l’événement Festival de la culture du hip-hop, Cité du rap, qui se tiendra au Centre Pierre-Charbonneau, le 22 mai. Au total, cinq cents participants se produiront lors de cette journée où l’on pourra, bien sûr, entendre du rap, mais aussi du R’n’B, du reggae et du gospel, en plus d’assister à des démonstrations de danse, de D.J. et de graffiti. Un gros programme! En attendant, chaque mercredi au Cirque (141, avenue du Mont-Royal Est), jusqu’au 5 mai, les participants monteront sur la scène, question de se préparer et de recueillir les commentaires qui leur permettront d’être fin prêts pour le Festival. Le 24 mars, on pourra y voir Constant Flux, La Réplik, Naomi Richards, Sans Compromis, Sun Shan, Howard, United Colors et Uni-T. Une belle occasion pour l’amateur d’obtenir sa dose de culture hip-hop hebdomadaire, et pour les intervenants du milieu musical, de repérer les nouveaux talents. Et à 1 $ l’entrée…

à souligner
– Cette semaine sur Scène Sonik (www.voir.ca), écoutez des extraits en RealAudio des formations Marlowe et Gazelle, qui seront au Café Campus, le 22 mars.

– Coléoptère, une formation aux influences funk, rap et électronique que l’on avait découverte dans le cadre du concours Les Francouvertes, donnera un showcase de quarante minutes, au Cabaret, le 24 mars.

– La série de spectacles de musique nouvelle et instrumentale Quatre jours de bruit débute au Belgo (372, rue Sainte-Catherine Est), le 19 mars, avec Michel Desrochers (électroacoustique) et Tonnerre de feu (basses et électronique); et se poursuit le 20, avec Motocross (pop-jazz) et Set Fire to Flames (avec Dave Bryant de Godspeed You Black Emperor!).