Musique

Live à Montréal : Chloé Sainte-Marie Slipknot, Kittie, Dope Marc Déry

Live à Montréal

Chloé Sainte-Marie
Le 5 avril au Théâtre d’Aujourd’hui
Chloé Sainte-Marie faisait sa rentrée officielle la semaine dernière, donnant une vie sur scène aux très belles chansons de Je pleure, tu pleures, paru l’automne dernier. Un courtois rendez-vous aux pulsations douces et aux nappes sonores somptueuses, quelques éclats de voix juvéniles: le spectacle de Chloé Sainte-Marie était d’une irréprochable tendresse.
Faut dire qu’avec les huit musiciens qui l’accompagnent, sous la direction du guitariste Réjean Bouchard, la musique coule de source, délivrée de toute contrainte. Les guitares, les banjos, la contrebasse à l’archet, les deux choristes, le percussionniste: tout est au service des textes de Miron, Denise Boucher et autres signataires.
La tignasse rousse, l’air d’une nymphe sur un nénuphar, l’imparfaite Chloé ressemblait à une gamine sautillante qui s’en va jouer à la marelle, fraîche comme une matinée de printemps. Dans l’attitude, elle est tout le contraire d’une Margo Timmins, la fantomatique chanteuse des Cowboy Junkies, même si, comme cette dernière, elle pose délicatement sur les mots une jolie voix fragile. Le plus efficace des antistress.
Tout au long du concert – qui reprend, dans l’ordre, toutes les chansons du disque -, Chloé construit un monde en patchwork, intégrant diverses traditions. Tout ce bricolage intime fait resurgir une mémoire américaine: parfum de country, de folk; évocation d’une culture un peu naïve. Au bout du compte, voici une musique heureuse, lyrique, souriante, mais qui ne nous transporte que par intermittence. L’on perçoit encore quelques raideurs; trop de mise en scène, peut-être? Autres irritants, ces textes appris par coeur qui servent de liens entre les chansons, et cette grosse boule inutile qui meublait le centre de la scène. Un poil trop racoleur. Mais au final, l’héroïne galopante a su garder intacte sa bonne réputation et démontrer une solide musicalité. (Claude Côté)

Slipknot Kittie, Dope
Le 8 avril au Métropolis

Visiblement, Slipknot était très attendu samedi au Métropolis. Une salle comble, des fans impatients, certains d’entre eux portant même des masques et des salopettes à l’effigie du groupe. Je suis arrivée pour la performance de Kittie (voir Dope, énième groupe de «nouveau» métal, n’avait rien de bien tentant), très curieuse de voir comment les adolescentes de London, Ontario, s’en sortiraient. Bien qu’elles donnent la réplique efficacement, les quatre filles manquent visiblement d’expérience et ne bougent pas suffisamment sur scène. Mis à part les grognements virils de la chanteuse Morgan Lander, Kittie ne retient pas l’attention longtemps; après quelques minutes, on a l’impression d’entendre continuellement le même morceau. Puis, après une longue attente et une entrée en matière théâtrale (sur l’air de For Those About to Rock d’AC/DC et d’une pièce country, le tout enveloppé d’un jeu de lumières assez intéressant), Slipknot a finalement fait son apparition. Après avoir été déçue par leur prestation au Spectrum (avec Machine Head et Coal Chamber), j’avais hâte de voir si une plus grande scène conviendrait mieux à l’imposant groupe. Oui et non. Oui, car les neuf clowns peuvent se déplacer sur scène sans se marcher sur les pieds, augmentant ainsi le dynamisme de leur performance. Non, parce que la musique, très basique, n’est pas meilleure. De plus, Corey, le chanteur, ne cessait de discourir entre les pièces, entre autres pour remercier les fans de leur avoir permis d’obtenir un disque d’or au Canada ou pour critiquer le gouvernement qui ne les a pas laissés entrer au pays en février dernier. Reste toutefois que lorsqu’il a fait s’agenouiller tout le Métropolis, c’était plutôt impressionnant. Alors, comment se fait-il qu’après le dernier morceau, tout le monde est parti sans demander de rappel? (Christine Fortier)

Marc Déry
Le 7 avril au Spectrum
Après avoir triomphé dans les petites salles (Cabaret, Lion ‘or), Marc Déry s’attaquait la semaine dernière au temple de la rue Sainte-Catherine, étape marquante dans la carrière de tout artiste québécois. Il y avait quelque chose d’étrange à le voir remonter sur la scène même où il avait sabordé Zébulon il y a quelques lunes. L’énergie n’était pas la même, mais il y avait dans l’air une fébrilité presque comparable, et l’un de ses compagnons d’alors, le fidèle Alain Quirion, était toujours dans son entourage.
Dans l’intimité du Lion d’or, on avait apprécié les qualités «atmosphériques» des chansons de Déry. Sur la scène du Spectrum, l’homme nous a prouvé qu’il était capable de les projeter loin dans l’espace et de toucher les spectateurs jusqu’au dernier rang, pourtant bruyant, comme à l’habitude. Bien que plus rock, le spectacle n’était pourtant pas si différent de ce qu’on avait déjà vu: même Florent Vollant est revenu faire son petit tour. Les clins d’oeil à Zébulon, avec l’incontournable Job steady – dont les arrangements ont bien changé au fil des ans – et la très rock Adrénaline, s’intégraient parfaitement au programme.
À quoi tient le charme de Marc Déry? En deux mots, il s’agit d’un homme foncièrement sympathique: le genre de type que les gars voudraient avoir comme copain de pêche, et pour qui les filles seraient prêtes à accrocher des vers à l’hameçon («Il est comme une version virile de Daniel Bélanger. Je partirais taquiner la truite n’importe quand avec lui», m’a confié une amie). C’est pourquoi, lorsque le chanteur reprit une seconde fois Poisson d’avril en ultime rappel, personne n’a cru bon de s’en plaindre. «C’est vraiment une soirée parfaite!» s’est exclamé un Déry comblé vers la fin de ce spectacle, qui avait des airs de consécration. Il n’avait pas tort… (Nicolas Tittley)