Nicola Ciccone : Chanteur de drames
Musique

Nicola Ciccone : Chanteur de drames

Il a de la gueule, de l’assurance et du talent. Six mois après la sortie de son premier disque, NICOLA CICCONE ressemble à tout sauf à une étoile filante.

Un nom de star italienne, un accent québécois bien appuyé, un charme inexplicable, Nicola Ciccone est un oiseau rare. Et les choses vont vite pour ce chanteur qui a grandi dans un quartier italien de Montréal. Vite et bien, doit-on ajouter. Combien d’artistes d’ici, en effet, peuvent se vanter d’avoir tenu l’affiche à Paris pendant une semaine avant même d’avoir un premier compact sur le marché?
Révélé par le concours Ma première Place des Arts en 1998, Ciccone retient surtout notre attention depuis la parution de L’Opéra du mendiant, l’automne dernier. Un sens indéniable de la mélodie, une voix un peu voilée où flottent des parfums méditerranéens et un style folk un peu moins dépaysant, ce jeune homme un peu bourru a plusieurs cartes dans son jeu. Mais, par-dessus tout, c’est son naturel qui séduit; rien chez lui ne semble forcé, calculé.
Cette aisance a de quoi étonner. S’il a un charisme peu commun, Ciccone ne peut se targuer d’être un multi-instrumentiste chevronné. Plutôt du type intuitif, il pianote un peu et compose à l’aveuglette. Il tâte les blanches et les noires jusqu’à ce qu’il ait trouvé des airs collant à ses portraits urbains, qui nous arrivent finalement dans un habit folk-pop. «L’Opéra du mendiant, avance le chanteur, c’est comme un album hip-hop ou trip-hop, sauf que c’est le style folk québécois qui est utilisé. On parle des mêmes affaires.»
Lorsqu’il chante: «Le petit monde est un sentier /Entre une usine et un chantier /Où marche la peur / La misère et le manque» avec corps et prestance, on croirait presque entendre Piché chanter un texte de Séguin. Pourtant, Ciccone n’a pas été gavé de chanson québécoise. Il a choisi le français par nécessité (difficile de faire carrière au Québec sans chanter en français), ce qui aurait eu des répercussions sur le plan musical.
«Le français, dit-il, s’apparente mieux au folk. C’est une langue moins phonétique que l’italien et l’anglais, qui expriment mieux la rage et le rock. Le français est plu narratif, c’est une belle langue pour raconter des histoires. Si je faisais un album en italien, je sais qu’il serait plus rock.»
«Ce que les gens ne savent pas, poursuit-il, c’est que le langage et l’accent que j’utilise, ce sont ceux de notre quartier. Quand on parle français, on parle comme ça – moi, j’appelle ça l’italo-montréalais. C’est ça que j’ai mis dans mon album.»
Plus qu’une langue amalgamée à des lignes mélodiques, les chansons de Ciccone sont surtout des tableaux. Des scènes arrachées aux rues d’une grande ville, des drames quotidiens, des portraits de société directs et francs, parfois allégés par un humour piquant. «Ce n’est pas la langue qui compte, mais les idées, le message qu’on essaie de véhiculer. Qu’on chante en anglais, en français ou en espagnol, si on parle d’un sujet cucul, la chanson va être cucul», lance-t-il sans détour.
Six mois seulement après son passage en compagnie d’Isabelle Boulay, le nouveau chouchou de la pop québécoise revient en ville pour son premier concert en tête d’affiche. Une perspective qui le réjouit, bien sûr. «Faire la première partie d’Isabelle Boulay, c’était l’fun aussi, mais c’était court: seulement cinq chansons. Et puis, il fallait que je reste acoustique. Là, je peux imposer ma vision artistique, faire ce que j’aime pendant presque une heure et demie.» Et parions qu’au court de cette heure, il en poussera une ou deux dans la langue de Pavarotti…

Le 5 mai
À la Maison de la Chanson

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