Ingrid Jensen : Souffle au coeur
Musique

Ingrid Jensen : Souffle au coeur

Ingrid Jensen est – je vous l’annonce aujourd’hui – ma musicienne jazz canadienne préférée. Et la bonne nouvelle, c’est qu’elle sera dimanche à la maison de la culture Frontenac dans le cadre de Silence… on jazz. Elle jouera aux côtés de sa soeur saxophoniste Christine, qui la suit ces jours-ci en tournée, et du conjoint de cette dernière, Joël Miller, un autre formidable souffleur. Un certain Gary Versace, de Portland, sera au piano; et il y aura également le guitariste Ben Monder, le batteur Karl Januska et le contrebassiste Ed Howard. Une belle  affaire.

Ingrid Jensen

est – je vous l’annonce aujourd’hui – ma musicienne jazz canadienne préférée. Et la bonne nouvelle, c’est qu’elle sera dimanche à la maison de la culture Frontenac dans le cadre de Silence… on jazz. Elle jouera aux côtés de sa soeur saxophoniste Christine, qui la suit ces jours-ci en tournée, et du conjoint de cette dernière, Joël Miller, un autre formidable souffleur. Un certain Gary Versace, de Portland, sera au piano; et il y aura également le guitariste Ben Monder, le batteur Karl Januska et le contrebassiste Ed Howard. Une belle affaire.

D’autant plus que le magazine Downbeat la voit dans sa soupe: ses tournées avec le Vienna Art Orchestra ont consolidé ses acquis d’improvisatrice, et son autre demeure, New York, l’a carrément mise au monde avec des collaborations stimulantes allant du big band Diva à celui de la compositrice Maria Schneider. Celle-ci a d’ailleurs contribué à mousser la carrière de Jensen par une kyrielle de mots flatteurs dans le livret d’Higher Grounds, le plus récent disque de la trompettiste. Ici, aucune imitation servile: sa facture n’est ni trop lisse ni trop froide. La finesse de son timbre n’est jamais excessive; mieux, sur plusieurs des pièces, elle manifeste une bouleversante retenue. Certes, le cool qu’elle endosse parfois est une épreuve mythique, ce qui met parfaitement la joueuse dans l’ambiance. Mais Jensen possède un souffle convaincant, qui ne fait jamais oublier que dans ce type de groupes, le patron, c’est la rythmique. "Je n’ai jamais consciemment décidé que je voulais jouer de la trompette, avouera-t-elle d’entrée de jeu. Ce que j’ai toujours voulu, par contre, c’est de pouvoir m’exprimer musicalement. Le choix de l’instrument était secondaire. En tant que leader, explique-t-elle, mon exercice principal consiste à choisir mes musiciens (elle utilise le mot casting) en fonction de la personnalité qu’ils ont sur leur instrument. La méthode sélective prouve que pour une même pièce, on peut obtenir un résultat moyen et un autre plus stimulant. Tout dépend des solistes impliqués."

On ne vous apprendra rien: une trompette peut résonner de mille et une façons si l’instrumentiste parvient à résister au spectre de son idole. Et si Miles est l’exemple le plus récurrent, dans le cas d’Ingrid Jensen, le maître serait plutôt le réputé cornettiste, bugliste et trompettiste canadien Kenny Wheeler. "Il m’arrive de trouver que certains passages de ma trompette rejoignent exactement la tonalité de Wheeler. Et ça me remplit de culpabilité. Aucun musicien de jazz n’apprécie qu’on imite une griffe qu’il a mis des années à développer. Miles (encore lui!) n’a jamais cru qu’il devait faire avancer la musique, il était la personne la plus honnête de tout l’univers: "Voici qui je suis, voilà comment je sonne et je me fous bien de savoir si vous aimez ma musique." Habilement, Ingrid s’empresse d’enchaîner: "Le problème avec les musiciens de ma génération (elle a trente-quatre ans), c’est la peur de foncer, de montrer le chemin. Et plusieurs d’entre eux devraient s’enlever de la tête qu’ils sont de grands génies en devenir." Pas beau ça?

C’est en passant en revue les morceaux d’Higher Grounds qu’elle décrit le mieux sa musique: "La pièce d’ouverture (Seventh Avenue) est un tempo 7/4; je ne connais pas beaucoup de be-boppers qui jouent en 7/4, se défend-elle. Tous les autres morceaux que j’ai composés sont inspirés de la musique modale et d’un méli-mélo de styles. J’aime Higher Grounds parce que je joue en temps normal, comme le reste des musiciens d’ailleurs. Et ça s’entend!"

Le 22 octobre
À la maison de la culture Frontenac
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