Live à Montréal : Renaud Frank Black and The Catholics
Musique

Live à Montréal : Renaud Frank Black and The Catholics

Renaud
Au Spectrum le 21 janvier

Aussi bien le dire tout de suite: Un piano, une guitare et Renaud, spectacle donné dimanche dernier, après une absence de neuf ans, est une inqualifiable déception. Comme vous le savez peut-être, notre Parisien préféré n’a plus de voix: c’était à la fois pathétique et carrément insupportable. L’accueil vibrant et pleinement mérité réservé à ces retrouvailles sur scène laissait pourtant présager le meilleur. Ce ne fut pas le cas. Jamais, en 20 ans de métier, je n’ai assisté à pareil supplice. Après trois chansons, plusieurs se dirigeaient vers la sortie en demandant un remboursement. On admet d’emblée que Renaud n’était déjà pas un grand chanteur; mais avec un minimum de registre, il parvenait à insuffler la vérité que commandaient ses textes. Mais dimanche dernier, il grimpait, grimpait, grimpait… on était essoufflé pour lui. On a parfois cru entendre du yodel. En cloque aurait pu s’appeler En clope, après que Renaud nous eut informés de sa dépendance à la nicotine. Deux nouvelles, Boucan d’enfer et Elle a vu le loup, se sont glissées parmi les anciennes. Heureusement, ses interventions entre les Déserteur, Miss Maggie, Deuxième Génération, Dès que le vent soufflera et autres Manu avaient du mordant. Vraiment vif d’esprit et rigolo, Renaud. Bien sûr, qu’on l’aime: bien avant qu’il soit consacré avec la tendre et immortelle Morgane de toi, il avait déjà beaucoup donné: Mon beauf, J’ai raté Télé-Foot, Germaine, etc. Il jouit donc ici d’une affectueuse immunité. Aveugle, devrions-nous renchérir, si l’on se fie au public cégépien qui, sans discernement aucun, revendiquait, comme dans un show de Plume, les chansons qu’il voulait entendre. Considérez ceci: le Renaud qu’on voit, souriant et infaillible, sur le wall of fame du Spectrum a 32 ans. Ce show de 1984, j’y étais: je me souviens de Jean-Louis, l’accordéoniste, indispensable collaborateur au son Renaud; dimanche dernier, il manquait cruellement au rendez-vous. Et ne venez surtout pas me parler de sa récente rupture. Come on! À 42 dollars le billet, les fans du chanteur n’ont pas à le prendre en pitié. Désolé, mais s’il est incapable d’aligner deux notes correctement, qu’il reste chez lui. (Claude Côté)

Frank Black and The Catholics
Au Cabaret le 22 janvier
Bon an, mal an, Charles Thompson Kitteridge IV revient faire son petit tour, attirant une clique d’irréductibles fans des Pixies déçus de n’avoir jamais pu voir le mythique groupe du Massachusetts. Le concert du Cabaret marquait ma cinquième rencontre avec l’homme connu sous le nom de Frank Black; et si ce dernier n’a pas donné la performance la plus énergique de sa carrière, il n’a pas déçu non plus. Le matériel du récent Dog in the Sand, peu connu du public, fut reçu poliment, exception faite de la puissante Blast off, qui a suscité des applaudissements soutenus. C’est qu’on s’attend surtout à des bonbons de la part du grassouillet chanteur, qui doit savoir doser ses offrandes. Car l’ennui, c’est qu’aucune de ses chansons en solo ne possède la force du moindre morceau des Pixies, et Frank Black le sait pertinemment. Il flatte donc les fans dans le sens du poil en glissant quatre ou cinq souvenirs des Pixies dans une mer de titres moins connus, prenant bien soin de contourner les évidences. Ainsi, en lieu et place d’un barrage de hits, on a eu droit à Gouge Away (excellente) et à Dancing the Manta Ray (pas Manta Ray tout court, mais l’autre, obscure face B). Pas chiche, il s’est tout de même fendu d’une version (assez douce) du classique Monkey Gone to Heaven, qui prenait pleinement avantage des deux guitares pedal-steel, et il a terminé le rappel avec l’incroyable Where Is My Mind?, qui valait à elle seule le déplacement. On pourrait trouver Black exigeant, voire arrogant, d’imposer au public les compositions très oubliables de ses six albums post-Pixies en négligeant les favorites de la foule (pas de Men in Black, ni de Los Angeles ou même de Headache!), mais comme c’est le cas chaque fois, notre patience fut récompensée de quelques moments de grâce. (Nicolas Tittley)