Disturbed : Social hurlant
Musique

Disturbed : Social hurlant

Voici que surgit des confins de l’Amérique la nouvelle génération du métal. À des lieues des mégagroupes des années 80 qui préféraient les mélodies à l’arrachée et les collants fluos, les jeunes artisans du genre donnent dans la désillusion et la critique sociale.

"Le métal est bien différent de ce qu’il était." Celui qui émet cette opinion se nomme David Draiman, chanteur de la formation Disturbed. "Avant, cette musique n’en avait que pour les femmes, les voitures, la boisson, la dope… un méchant gros party. Ça n’avait vraiment aucune profondeur", ajoute-t-il. Si Draiman n’a pas la langue dans sa poche, n’empêche que l’homme est réfléchi; chacune de ses attaques est perpétrée avec une prudence stratégique.

Ce trait de caractère n’est sans doute pas étranger à son embauche au sein de Disturbed, il y a maintenant trois ans. À Chicago, la scène musicale n’est pas des plus tendres et les trois autres membres de Disturbed, Dan Donegan, Mike Wengren et Fuzz, en avaient assez des auditions et des essais infructueux afin de dénicher un chanteur, un véritable homme de tête. Leur rencontre avec Draiman fut rédemptrice pour ces trois gaillards au bout du rouleau.

Draiman n’apportait pas qu’une fraîcheur musicale avec lui, mais toute une attitude, une vision politique, sociale et introspective essentielle à la création d’une âme de groupe. Issu d’une famille stricte qui nourrissait pour lui des ambitions plus nobles, David Draiman s’est toujours inscrit en marge de cette rectitude religieuse qu’on tentait de lui imposer. "L’idée n’est pas de se rebeller aveuglément contre l’autorité, explique le chanteur qui tient à éviter la stérilité qu’engendre la haine de l’autre, il faut apprendre des choses, en faire et expérimenter pour soi. Pas parce que tes amis, tes confrères de classe ou ta religion te disent de le faire, mais pour découvrir ce qui a une réelle signification pour toi. C’est la seule manière de découvrir ta vraie passion." Draiman est un véritable motivator dont le verbe aiguisé l’a récemment amené jusque dans les studios du très réputé talk-show Politically Incorrect qu’anime l’audacieux Bill Maher.

Musicalement, Disturbed se positionne dans la lignée des Korn et Ministry tout en revendiquant, bien sûr, une identité qui lui est propre. La formation s’octroie cette différence en mettant à profit l’influence d’une vingtaine d’années de musique "violente" plutôt que de se fixer à une seule balise. Entre la mitraille et la mélodie, le groupe a trouvé son créneau. Sur une base de guitares rythmiques quelque part entre rock et métal, Draiman enchaîne des présences plus sirupeuses à un chant syncopé (qui peut parfois ressembler à un rap) en une suite de moments forts et d’éléments de transition mâtinés de synthétiseurs d’ambiance. "Tout est fait à l’unisson, les variations de style dans la voix et les éléments électroniques sont là afin de mettre les chansons à profit", explique le chanteur.

Une reprise du succès planétaire de Tears for Fears se retrouve d’ailleurs sur The Sickness, le premier album de la formation: Shout 2000. S’il est désormais habituel d’assister à ce type d’emprunt de la part de nouveaux groupes qui utilisent ces morceaux afin de mousser les ventes d’un nouvel album, David Draiman n’apprécie pas particulièrement ce genre d’allusion: "Je t’arrête tout de suite… Nous n’avons pas sorti cette chanson comme single et nous avons quand même vendu tous ces albums [près de 50 000 au Canada et 250 000 dans le reste du monde, en plus du million évoqué précédemment]. C’est spécifiquement pour éviter ce genre d’insinuations que nous avons choisi deux autres chansons pour promouvoir l’album. C’est une pièce qui est en accord avec le reste du disque: la thérapie du cri, c’est ce qu’est notre musique." Il termine en citant ladite chanson: "In violent times, you shouldn’t have to sell your soul… c’est exactement ce dont nous parlons dans nos chansons."

Le 1er avril
Au Théâtre Capitole
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