

Bon Jovi : Vingt d’honneur
À la veille de ses 20 ans, Bon Jovi a toujours la cote. Son plus récent album, Crush, est un succès, tandis que la tournée One Wild Night fait fureur. Petite histoire d’une réussite musicale.
Nicolas Houle
Bon Jovi
peut se targuer d’être une des rares formations nées dans la vague hard rock des années 80 à avoir franchi le cap des années 90. Alors que les Quiet Riot, Ratt, Whitesnake et autres Mötley Crüe étaient à l’agonie, les gars de Bon Jovi se refaisaient une beauté, abandonnant les grosses tignasses et les riffs de guitares carburant à la testostérone pour se gagner un nouveau public. "Nous avions de meilleures chansons que ces groupes-là, des chansons qui pouvaient bien vieillir et du même coup nous assurer une plus grande longévité, croit David Bryan, le claviériste du groupe. Ce qui est encourageant, c’est que nos chansons continuent à toucher les gens."
Difficile d’obstiner David Bryan sur ce point. Depuis la parution du fameux Slippery When Wet en 1986, album sur lequel on trouvait notamment You Give Love a Bad Name, Livin’ on a Prayer et Wanted Dead or Alive, Bon Jovi n’a eu de cesse de cumuler les succès. On se rappellera la réussite qu’a été New Jersey en 1988, avec ses Bad Medicine, I’ll Be There for You et Lay Your Hands on Me, puis Keep the Faith en 1992, dont la pièce-titre et la ballade Bed of Roses ont connu un grand succès. En fait, seul These Days, paru en 1995, n’a pas fait l’unanimité, se démarquant tout de même grâce au simple This Ain’t a Love Song. Quant à Crush, le plus récent album du groupe, son succès n’est plus à prouver: les ventes vont bon train et le simple It’s My Life a rapidement envahi les ondes radio.
Jamais démodé
S’il est vrai que Bon Jovi a su s’émanciper du courant glam métal des années 80, il est également vrai que la formation n’y a jamais vraiment appartenu, creusant son propre sillage dans un rock qui, sans dénigrer les guitares lourdes, ne s’est jamais aliéné les ondes radio, misant toujours sur des mélodies et des refrains accrocheurs. Aussi le groupe a-t-il toujours flirté davantage avec la pop qu’avec la hard, et c’est sans doute pourquoi il est parvenu à faire son chemin parmi les nouvelles vagues musicales. "Les étiquettes sont les étiquettes, moi je pense que nous sommes simplement un groupe de rock’n’roll", tranche David Bryan.
N’empêche que pour Bon Jovi, la réussite artistique va de pair avec la réussite commerciale. Ce n’est donc pas un hasard si Max Martin, celui à qui l’on doit les hits de Britney Spears et des Backstreet Boys, a participé à l’écriture de It’s My Life et que le groupe a écrit pas moins de 60 chansons avant d’arrêter son choix sur les 12 titres qui constituent Crush. "Une chanson au top 10, c’est un baromètre, une indication à savoir si tu as réussi à toucher les gens, reconnaît David Bryan. Si tu n’en as pas, c’est que tu n’as pas su faire quelque chose qu’ils ont pu s’approprier. It’s My Life est un énorme succès parce que tu peux la prendre et dire toi aussi "c’est ma vie". Tu peux y retrouver tes propres mots, tes propres sentiments, ta propre histoire. On est très conscients de cela. On ressent quand les chansons sont bonnes et on ne fait pas paraître un album tant qu’on n’a pas cette certitude."
Travail d’équipe
Il serait réducteur d’expliquer l’évolution musicale de Bon Jovi simplement par son désir de se hisser au sommet des palmarès. En effet, tout au long de la dernière décennie, les membres de Bon Jovi se sont impliqués dans une foule de projets solos qui ont nourri leur travail collectif. Le chanteur Jon Bon Jovi s’est permis quelques succès solos, en plus de faire son entrée au cinéma, le guitariste Richie Sambora s’est également commis en solo, se permettant même une petite tournée, David Bryan a fait de la musique instrumentale, tandis que le batteur Tico Torres s’est intéressé au monde de la peinture. Autant d’aventures qui, combinées au congédiement du bassiste Alec John Such au milieu des années 90, aujourd’hui remplacé par Hugh McDonald, ont contribué à une nouvelle direction musicale. "C’est très bénéfique de pouvoir se baigner dans un autre univers et de pouvoir s’exprimer en tant qu’artiste sans jamais avoir à penser à la grosse machine, indique David. Quand on revient, on sent que chacun a progressé, et quand on mélange tout ça, ça ne fait qu’enrichir le groupe."
L’album Crush, tant par ses textes que par ses musiques, illustre bien le chemin parcouru par Bon Jovi. Dès les premières notes de la première pièce, on reconnaît un Bon Jovi s’acoquinant aux sonorités électroniques du jour et s’intéressant aux boîtes à rythmes tout en dépoussiérant le fameux voice box de Richie Sambora, qui a fait la marque de commerce de Livin’ on a Prayer, il y a 15 ans déjà. "Si tu fais du surplace, tu vas crever, explique David Bryan. Tout est question d’évolution, il faut changer, se réinventer, sinon on reste rivé à une époque. C’est sûr qu’on ne serait quand même pas sortis avec un album disco; il faut savoir changer graduellement tout en restant soi-même."
Seulement plus vieux
Bon Jovi est maintenant au beau milieu de sa tournée mondiale amorcée l’an dernier, une tournée qui, en Europe, s’est faite dans les stades, et en Amérique dans les arénas, une tournée importante comme on en voit de moins en moins. "Jouer devant autant de gens, c’est formidable, ça veut dire que tu es populaire, que les gens t’aiment", indique David, qui n’y voit aucun obstacle à nouer contact avec les foules imposantes. "Jon est l’un des meilleurs frontmen, il a une façon d’inclure tout le monde. On parvient toujours à rendre ça intime parce qu’on implique les gens dans notre spectacle."
Après une quinzaine d’années de tournées mondiales, la bande dit toujours avoir le feu sacré. La nostalgie n’est pas au menu, guère plus que les soucis concernant la prochaine étape que franchira le groupe. Ce que la formation désire, c’est goûter pleinement le moment présent. Pas question de se prendre la tête, donc. Tout ce qu’on sait, c’est que le claviériste promet que l’aventure Bon Jovi se poursuivra tant qu’elle sera plaisante et qu’un album studio sera en préparation dès l’automne. Pour le reste, l’autobiographique Just Older résume tout: "Ça fait 18 ans, peux-tu croire que je poursuis encore mes rêves?/Mais je ne regarde pas par-dessus mon épaule/J’aime le lit dans lequel je dors/Comme moi il est un peu âgé/Il n’est pas vieux, seulement plus vieux".
Le 19 mai
Au Colisée de Québec
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