

Live à Montréal : MUTEKGrandaddy/ Coldplay
Frédéric Boudreault, Nicolas Tittley
Photo : Cathy Duchesne
MUTEK
À la SAT et à Ex-Centris, du 30 mai au 3 juin
Où s’en va MUTEK? Le festival de musique électronique que l’on disait si pointu semble s’être ouvert cette année, au grand plaisir d’un public de plus en plus nombreux. L’événement aura permis de constater que la bonne santé de la scène locale n’a rien d’une lubie de journalistes. Lors de la soirée consacrée au label allemand Traum, par exemple, c’est Akufen qui a littéralement volé le show, épatant avec ses interventions en direct et ses échantillonnages radiophoniques. Mais son plus grand talent est de construire des performances avec un esprit de D.J., tout en modulations et en crescendos, répondant aux mouvements de la foule. Parmi les prestations attendues, celle de Matmos, à Ex-Centris, nous a un peu laissés sur notre faim. Trop courte, elle n’a pas donné l’occasion de développer à fond la thématique chirurgicale de leur disque A Chance to Cut is a Chance to Cure. Le clin d’oeil à l’album The West aura toutefois permis au duo de sortir une guitare, une touche acoustique bienvenue dans cet univers numérique. Le groupe allemand Rechenzentrum, qui les suivait, aura été beaucoup plus impressionnant, notamment par sa maîtrise du visuel et par une approche rythmique où des moments d’une violence quasi industrielle côtoyaient le dub et l’ambient.
De tous les participants, celui qui avait le plus de chances de satisfaire les danseurs et les férus d’expérimentation était Thomas Brinkmann. S’il a fait danser avec une approche rythmique assez linéaire, la première partie du concert, franchement plus expérimentale (mais pas inaccessible pour autant), mettait de l’avant son travail plastique. Un travail fascinant de gravures sur acétates et de modulations de fréquences qui pouvait rappeler certaines expériences de Martin Tétreault, avec une tendance plus techno. Sur la même affiche, Herbert n’a pas failli à sa réputation. Avec ses samplings audacieux d’objets divers (il s’est même coupé en manipulant du verre cassé) et la présence d’une chanteuse (Dani Siciliano), il a flirté avec la pop avec plus de brio que ne l’avait fait le duo Closer Music la veille. Alors, que retenir de ces cinq jours de musique électronique? Sur le plan de l’achalandage, on peut parler d’un véritable succès: le public, de plus en plus nombreux, semble aussi plus connaisseur. On ne peut qu’espérer que le succès des soirées "dansantes" ne nuise pas à la présentation de performances plus exigeantes, et que MUTEK garde les yeux fixés sur l’avant-garde. (Nicolas Tittley)
Grandaddy/Coldplay
Le 4 juin au Métropolis
C’est un combo bien mal assorti qui nous a visités lundi dernier au Métropolis. Bien qu’ils soient réunis pour cette tournée, Grandaddy et Coldplay, c’était vraiment le jour et la nuit. Si les premiers ont réussi à alterner des moments très forts avec d’autres plus calmes mais tout aussi succulents, les seconds se sont malheureusement enlisés dans leur folk-rock mélancolique. Passons sur le son exécrable qu’on nous a servi pour le groupe américain et les projections vidéo un peu inutiles, mais retenons l’essentiel: des chansons bien foutues et fascinantes, qui marient judicieusement le rock lo-fi avec de vieux synthés. Seul bémol: l’ordre des chansons. Pourquoi avoir terminé avec He’s Simple, He’s Dumb, He’s the Pilot et Nonphenomenal Lineage, deux excellentes pièces mais beaucoup trop longues pour conclure avec force cette première partie…
Pour ce qui est de Coldplay, il fallait sortir son coeur d’adolescente pour apprécier ce spectacle à sa juste mesure. Je dirais même pour le transcender, tellement la formation londonienne est restée collée à son premier disque. Ce n’était pas déplaisant, bien au contraire, mais c’était commun et sans surprise. Le charme de Coldplay tient beaucoup au chanteur, le très gêné Chris Martin, qui s’est avéré à la hauteur de sa réputation, c’est-à-dire cute. Tout au long de la soirée, il s’est adressé à la foule en français (un peu cassé, mais très correct), ce qui a fait fondre les nombreuses jeunes filles entassées au Métropolis. Pour le reste, le groupe a joué presque toutes les pièces de Parachutes – sauf ma préférée High Speed –, tout en offrant quelques nouvelles compositions, dont l’une très belle, See You Soon. Mon seul véritable regret de ce spectacle: que le groupe ne soit pas sorti un peu de sa mélopée tristounette, et qu’il n’ait pas branché les guitares comme il l’a fait en rappel pour son excellente reprise de Lost Highway d’Hank Williams. Au bout du compte, rien pour écrire à sa mère. (Frédéric Boudreault)