Calla : La violence du calme
Musique

Calla : La violence du calme

Lorsqu’ils sont montés sur la scène de l’Olympia lors de leur premier passage à Montréal, en première partie de Godspeed You Black Emperor!, personne ici n’avait entendu parler de Calla. Depuis, le trio américain s’est fait un nom, pour ainsi dire.

Lorsqu’ils sont montés sur la scène de l’Olympia lors de leur premier passage à Montréal, en première partie de Godspeed You Black Emperor!, personne ici n’avait entendu parler de Calla. Depuis, le trio américain s’est fait un nom, pour ainsi dire. Couronné numéro un de la liste des "100 bands to watch" du magazine Alternative Press, Calla fait son petit bonhomme de chemin, en douceur. Ceux qui ont assisté au concert n’ont pas attendu les accolades de la critique pour se faire une idée; car si leur set n’avait pas l’ampleur wagnérienne de celui des vedettes de la soirée, Calla a réussi, en une petite demi-heure, à installer une ambiance qu’on n’oubliera pas de sitôt: glauque, dense et formidablement belle à la fois. "J’ai été vraiment étonné de l’écoute attentive du public ce soir-là, se souvient le batteur Wayne Magruders, joint à son domicile new-yorkais. Ça me rappelait les meilleurs concerts européens. On n’a pas beaucoup tourné aux États-Unis, où le public tend à être plus bruyant, car pour un groupe comme le nôtre, il est parfois assez difficile de se faire entendre par-dessus le bruit des verres qui s’entrechoquent."

N’allez pas confondre douceur et mollesse; car la musique de Calla est dense, très dense. Violente, même, en particulier dans ses silences. On pourrait, pour la décrire, utiliser le terme slowcore; mais on lui préférera l’expression d’un confrère américain, qui décida d’en faire les nouveaux leaders d’un courant qu’il baptisa "whisper rock" (rock de murmures). Un qualificatif hérité de leur premier disque, où la voix d’Aurelio Valle est à peine audible, au-dessus des grincements électroniques, mêlés à des guitares électriques et acoustiques, à une percussion spartiate et à une basse énorme, à vous déplacer la cage thoracique. Scavengers, leur deuxième album, respire un peu plus (même si l’air y est sérieusement vicié) et évoque à l’occasion les univers de Nick Cave, Tom Waits, Calexico, de Low et de… (insérez ici le groupe déprimant de votre choix), sans jamais perdre le nord. "Le premier album a été fait de façon un peu autistique: à la maison, sur un ordinateur, on collait et recollait sans cesse les morceaux d’un puzzle jusqu’à ce que ça prenne la forme d’une chanson, explique Wayne. Scavengers, ç’a été tout le contraire: on avait joué presque toutes les chansons en concert avant de les enregistrer; alors, une fois en studio, ça s’est fait beaucoup plus naturellement. Les samples sont venus à la toute fin, comme une sorte de glaçage sur le gâteau."

Coréalisé par Michael Gira, l’ex-leader des lugubres Swans (qui les a aussi signés sur son label, Young God), Scavengers est une quête d’équilibre, tout précaire soit-il; un grand écart qui toucherait à la fois à leur Texas natal et à leur New York d’adoption. "Je mentirais si je te disais que ces deux villes ne nous ont pas influencés, mais nos références sont vastes, allant du vieux soul au country, en passant par la musique Stockhausen. Sean (Donovan, bassiste) est sûrement celui qui a les références les plus pointues, puisqu’il vient du milieu de la musique contemporaine. Quant à moi, je suis surtout fan de hip-hop…" Une affirmation à peu près aussi étonnante que leur choix de reprises, qui a de quoi laisser pantois: Scavenger s’achève sur une relecture particulièrement sombre du Promenade de U2, et le groupe a déjà repris un morceau de Steve Miller avec le plus grand sérieux du monde. "On a un sens de l’humour, c’est sûr; mais en musique, on ne fait rien de façon ironique. On est un groupe assez sérieux." On n’en doute pas une seconde…

Le 2 septembre
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