

Tryo : Apparence trompeuse
En France, la même histoire semble se répéter quasi annuellement: une formation régionale ayant travaillé d’arrache-pied pour se faire connaître auprès de son public commence à vendre des albums et des billets de spectacle par milliers. Sans la moindre machine promotionnelle d’une multinationale, elle se fait courtiser par de gros bonnets qui lui promettent monts et merveilles et qui finissent par la contourner pour faire les choses à leur façon.
Parazelli Éric
En France, la même histoire semble se répéter quasi annuellement: une formation régionale ayant travaillé d’arrache-pied pour se faire connaître auprès de son public commence à vendre des albums et des billets de spectacle par milliers. Sans la moindre machine promotionnelle d’une multinationale, elle se fait courtiser par de gros bonnets qui lui promettent monts et merveilles et qui finissent par la contourner pour faire les choses à leur façon. Ce fut le cas pour Louise Attaque, Sinsemilia, Matmatah, et maintenant pour Tryo, quatuor de Fresne, qui, en six mois, avait écoulé plus de 10 000 disques. Le téléphone se mit alors à sonner: "On a rencontré des personnages assez caricaturaux, me raconte Manu avec un plaisir non dissimulé. Des gros producteurs avec des grosses bagues, cheveux lissés en arrière et avec des dollars à la place des yeux… C’était tout juste s’ils ne sortaient pas leur carnet de chèques pour nous acheter sur place! Ça nous semblait très malsain, alors qu’avec Yelen (label de Mass Hysteria, entre autres, associé à Sony), on se sentait très proches de leur façon de percevoir la musique et de faire du business; on n’a donc pas hésité une seconde. Au départ, ce fut un choix affectif. Et comme ça, on n’est pas obligés d’aller jouer chez Michel Drucker…"
Pour la distribution au Québec de leurs deux albums (Mamabiguida et Faut qu’ils s’activent), le groupe de "reggae akoustik" a également laissé parler son coeur, une méthode qui semble d’ailleurs s’être transformée en leitmotiv: "À l’époque, en 1994, avec Guizmo, on avait un groupe qui s’appelait M’panada. On avait joué à Nantes avec Grim Skunk et on les avait trouvés super sympas. Puis, en 1999, lorsqu’on est venus jouer aux Francos, on les a contactés, on leur avait apporté du bon vin et ils nous ont offert du bon pot… Et comme la filiale de Sony au Québec ne semblait pas intéressée à nous sortir ici, on a décidé de faire appel à Indica, et on est super contents du résultat."
La recette secrète de Tryo se trouve probablement dans l’utilisation de la douceur et de l’oisiveté apparente de sa musique et de ses harmonies vocales singulières, pour mieux faire passer la pilule de sa critique sociale. Un mélange doux-amer qui prend un sens encore plus actuel avec la tourmente mondiale de ces derniers mois: "Ce qui est intéressant dans la manière qu’on a de dire les choses, c’est qu’on peut parler d’un truc qui fait chier et qui nous angoisse, mais d’une manière décalée. Je crois que les gens comprennent d’autant mieux le message qu’ils en saisissent également le côté ironique. Et ce n’est pas parce qu’il y a de la misère dans le monde qu’on doit arrêter de vivre, de faire la fête et de célébrer la vie! Parce que chanter, danser et faire de la musique, c’est célébrer la vie. C’est certain que c’est plus difficile de le faire en ce moment; mais lorsque l’on a un public qui nous cautionne, ça nous stimule, c’est très réconfortant. Ça devient le carburant pour continuer."
Le 10 novembre
Au Cabaret
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