

La Bottine souriante : Le temps à la fête
Sans cesse renouvelée par l’arrivée de sang neuf et par sa grande curiosité musicale, La Bottine souriante fête cette année ses 25 ans. Pour la troupe de neuf musiciens, c’est l’occasion de faire un bilan et, bien sûr, de faire la fête!
Nicolas Houle
Ça fait déjà un quart de siècle que la joyeuse bande d’Yves Lambert fait swinguer le Québec et même la planète tout entière avec son répertoire folklorique. Pour célébrer l’occasion, La Bottine s’est permis deux parutions plutôt qu’une: un album de nouveau matériel, Cordial, ainsi qu’une anthologie sonore.
Folklore d’avant-garde?
À parcourir l’anthologie du groupe, de ses débuts en 1976 sous forme de trio à ses présentes aventures, force est de constater que La Bottine n’a jamais fait de surplace. Curieux d’explorer de nouveaux styles musicaux, le groupe s’est amusé à métisser son folklore d’une foule d’influences. Cordial en est l’exemple parfait: le folklore québécois y côtoie le jazz, le rock, le reggae, la musique arabe et même l’électronique. Audacieuse, La Bottine? À peine assez au goût d’Yves Lambert, cofondateur, chanteur et accordéoniste du groupe: "Il y a des fois où ça crée des discussions à savoir si on va trop loin, mais La Bottine a toujours été audacieuse et ça a toujours été bon pour elle, croit-il. C’est ce qui l’a fait se démarquer et c’est ce qui l’a fait évoluer. C’est aussi pourquoi elle est encore là. C’est la liberté: tu peux avoir une démarche complètement éclatée dans l’univers très scientifique de la tradition."
S’il est vrai qu’au fil des ans le son de La Bottine s’est transformé, il est tout aussi vrai qu’une constante est toujours demeurée: La Bottine est un band de party. Et ses partys sont plus punchés que jamais depuis qu’elle s’est adjoint les services d’une section de cuivres en 1990. Devenue un groupe plus imposant, parfois plus difficile à gérer, La Bottine ne saurait toutefois plus se passer de sa formation élargie, d’autant qu’elle lui doit aujourd’hui une partie de sa spécificité: "La Bottine ne reviendra pas en arrière, à moins de trouver une formule révolutionnaire, mais on ne réinvente pas la roue tous les jours et de toute façon, La Bottine, depuis 10 ans, c’est une grande famille, explique Yves Lambert. Avec ces musiciens-là, il faut renouveler le genre et j’estime que Cordial, sur le plan de la maturité de l’ensemble, c’est l’album le plus réussi."
Folklore d’actualité
Avec une conception aussi festive du folklore, on pourra reprocher à la troupe d’Yves Lambert d’avoir parfois eu tendance à évacuer la dimension historique de sa musique pour n’en garder que le côté énergique. Le podorythmiste, guitariste, violoniste et chanteur Michel Bordeleau reconnaît qu’une des marques de commerce de La Bottine a toujours été son côté festif et que l’arrivée des cuivres servait cette cause. Or selon lui, la recherche du répertoire folklorique se poursuit avec la même assiduité que par le passé: "Il y a différents secteurs de folklore. On a décidé de prendre la voie la plus festive et on assume ce rôle-là depuis 25 ans. On privilégie encore cette musique de fête, mais la nuance passe maintenant à travers le choix des textes. Yves a un souci d’aller chercher des textes qui sont les plus contemporains possible pour ne pas être complètement déconnecté de la vie des gens d’aujourd’hui."
Difficile d’obstiner Michel Bordeleau à ce chapitre. Quand le groupe suggère à Ti-Pierre de ne pas conduire après avoir bu un verre de trop dans Viens-tu prendre une bière! ou quand il met dans la bouche de Lucifer des mots criants d’actualité sur Le Démon sort de l’enfer, La Bottine est effectivement bien de son temps: "Il dit toi mon policier/té pas tanné de nous gazer/avec ta maudite clôture embarque dans ma voiture […] toi mon PDG, tu méprises tes employé(e)s/Avec toutes tes fermetures, embarque dans ma voiture."
Le bilan des bêtes de scène
Une fois passée la frénésie du temps des Fêtes, La Bottine se permettra de prendre une pause. Le temps sera alors venu de faire un bilan pour savoir plus précisément où elle s’en va. "On est un peu en réflexion, reconnaît Michel Bordeleau. Un quart de siècle, ça mérite qu’on s’assoie et qu’on voie quels sont les intérêts de tout le monde. C’est un gros collectif, alors on veut voir si les intérêts sont encore là. Ça semble l’être, mais on a des discussions à avoir…"
D’ici là, La Bottine s’éclatera une fois de plus dans une série de spectacles où elle compte bien défendre sa réputation. Des spectacles qui, bien qu’ils ne requièrent pas la forme d’un athlète, demandent aux musiciens une sérieuse dose d’énergie: "Il faut un état d’esprit plutôt qu’une forme particulière, croit Michel Bordeleau. On travaille pour être en forme, mais on a un physique qui trahit nos plaisirs de la table…"
"On a des physiques de mononcles! tranche Yves Lambert en rigolant. Mais faire de la scène, ça demande beaucoup d’énergie. Comme je dis toujours, c’est pas pire que de travailler dans les mines!"
Les 30 et 31 décembre
À la salle Albert-Rousseau