

Pascal Dusapin : Libre cours
PASCAL DUSAPIN est l’un des compositeurs de musique contemporaine les plus en vue actuellement en France. Auteur d’une centaine de créations, dont une quinzaine pour grand orchestre et quelques opéras, il construit une oeuvre déjà incontournable. Nous l’avons joint chez lui à Paris à la veille de son passage chez nous.
Réjean Beaucage
Invité par Denys Bouliane et LorraineVaillancourt à participer aux Rencontres de musique nouvelle du Domaine Forget, Pascal Dusapin sera à Saint-Irénée dans Charlevoix du 28 au 31 août pour participer à des causeries et assister à des interprétations de ses oeuvres par le Trio Fibonacci (le 28) et le Nouvel Ensemble Moderne (le 30).
Aujourd’hui âgé de 46 ans, c’est vers l’âge de 18 ans que Dusapin a découvert la musique d’Edgar Varèse, qui allait être une grande influence. "Ç’a été un véritable choc électrique, confie le compositeur au bout du fil. Ma vie a basculé à l’écoute d’Arcana. Au bout d’une demi-heure, j’avais décidé que j’abandonnais l’étude du piano pour être compositeur; j’ai compris en quelques minutes le sens profond de mon existence!"
De 1974 à 1978, c’est vers les cours d’Iannis Xenakis que son destin le mène. "Xenakis était une personnalité très populaire dans les années 70, raconte le compositeur. Peu de gens ignoraient son existence. Or, en cherchant qui pouvait être le plus proche de Varèse, je ne pouvais tomber que sur lui!" Selon Dusapin, Xenakis était quelqu’un de simple. "Il donnait des cours d’esthétique à la Sorbonne, et il était facile d’y assister. Moi qui étais d’un tempérament assez sauvage, c’était parfait: il était tout le contraire du professeur qui vous demande des comptes." Selon Dusapin, les 10 premières années de son travail sont marquées par son influence. "Aujourd’hui cette influence est plus diffuse, mais encore présente. Il était obsédé de liberté et c’est pour ça que je le considère toujours comme mon maître."
Le NEM interprétera trois pièces de Pascal Dusapin au Domaine Forget: Cascando (1997), Comoedia (1993), pour soprano (Ingrid Smithüsen) et six instrumentistes, avec des textes extraits de La Divine Comédie, et Coda (1992), pour 13 instrumentistes. Les titres des oeuvres de Dusapin se contentent très souvent d’un seul mot et même d’une seule syllabe (Aks, Loop, Hop’, Laps…). "J’aime les mots très brefs et incisifs, pour l’aspect sonore et intellectuel aussi, parce que j’aime que les concepts derrière les mots soient très précis. Cascando, c’est vraiment une exception, il y a déjà trois syllabes!"
Le Trio Fibonacci jouera quant à lui Trio Rombach (1997). "Il faut bien préciser que ça n’a rien à voir avec Bach, lance le compositeur. C’est plutôt le nom d’un village où je vais régulièrement en vacances!" C’est aussi la première pièce dans laquelle Dusapin a composé pour le piano. "Depuis, j’ai écrit Sept Études qui seront créées au Festival d’automne à Paris et un Concerto de piano qui sera créé à Bonn, aussi à l’automne, pour le 175e anniversaire du décès de Beethoven." Et son carnet de commandes ne cesse de voir s’ajouter de nouvelles entrées, remplissant les agendas des années à venir.
On pourra découvrir la musique de Pascal Dusapin avec une réédition qu’a fait paraître récemment l’étiquette Naïve/Montaigne de l’une des monographies que l’ensemble Ars Nova, dirigé par Philippe Nahon, a consacrées au compositeur. Le disque explore une période de 10 ans (82-92) de la musique pour ensemble de Dusapin et s’ouvre sur Comoedia, la seule qui fut écrite pour Ars Nova, avec la voix de Françoise Kubler. Si celle-là va chercher ses textes chez Dante, Aks (1987), pour mezzo-soprano et sept instrumentistes, a puisé le sien, comme le matériau musical de base, au Musée des arts et traditions populaires et est chantée en occitan. Il ne s’agit pas de la pièce la plus ancienne du disque, mais elle se démarque des autres en raison de cette inspiration particulière. Les oeuvres exclusivement instrumentales Fist (1982), Aria (1991), Hop’ (1983-84), Coda (1992) et Attacca (1991) laissent en effet poindre un soupçon de parfum varésien, tant dans la couleur des harmonies que dans l’angoisse nerveuse des rythmes, mais fondu dans un travail compositionnel d’une grande individualité et rendu avec brio par l’ensemble et son chef.
Pascal Dusapin au Domaine Forget: www.domaineforget.com
Pascal Dusapin: Ars Nova/Philippe Nahon, Naïve/Montaigne (S.R.I.)
Maison Trestler
Le dernier concert du 18e Festival d’été de la Maison Trestler se tiendra ce mercredi 28 août et permettra d’entendre le violoncelliste Antonio Lysy, qui s’y produira en solo. M. Lysy est professeur de violoncelle à l’Université McGill, mais il est surtout un instrumentiste dont le talent est reconnu internationalement et qui s’est produit dans les plus grandes salles du monde, aussi bien avec le Royal Philharmonic de Londres qu’avec l’OSM. Le concert qu’il présentera à Trestler fera entendre les Suites pour violoncelle seul n°2 (BWV 1008) et n°6 (BWV 1012) de Bach. Les deux sont écrites en ré mineur, mais la n°6 est d’un registre plus aigu et l’on pense qu’elle fut écrite pour un violoncelle piccolo à cinq cordes, ce qui pourrait contribuer à expliquer sa difficulté d’interprétation sur l’instrument habituel. Une autre Suite n°6 sera au programme, mais d’un autre goût celle-là, puisque signée par le compositeur contemporain Hans Werner Henze. Enfin, Lysy interprétera Les mots sont allés (1979), de Luciano Berio. Un concert, donc, où le violoncelle passera d’une époque à l’autre sous l’archet d’un virtuose et avec le concours des plumes de trois grands compositeurs.
Maison Trestler, 85, chemin de la Commune, Vaudreuil-Dorion
Tél.: (450) 455-6290