Jeszcze Raz / Manouche : Caravane gitane
Musique

Jeszcze Raz / Manouche : Caravane gitane

Ces jours-ci, deux formations d’ici aux couleurs klezmer et gitane montent sur scène. L’une d’elles, Jeszcze Raz, déjà auréolée de dithyrambes pour son intrigant Balagane, s’inspire directement du vécu de son leader Paul Kunigis, juif polonais d’origine. L’autre groupe, Manouche, vient à peine de lancer son premier disque, Apprenti moustachu. Les six membres sont québécois pure laine et, comme le dit si bien la violoniste Zoé Dumais, cette bande des six a embrassé les musiques tzigane, gitane et autres "simplement parce qu’ils en sont amoureux".

Ces jours-ci, deux formations d’ici aux couleurs klezmer et gitane montent sur scène. L’une d’elles, Jeszcze Raz (aussi difficile à prononcer que de placer les "z" au bon endroit), déjà auréolée de dithyrambes pour son intrigant Balagane, s’inspire directement du vécu de son leader Paul Kunigis, juif polonais d’origine. Les Balkans, il connaît.

L’autre groupe, Manouche, vient à peine de lancer son premier disque, Apprenti moustachu. Les six membres sont québécois pure laine et, comme le dit si bien la jeune violoniste Zoé Dumais, cette bande des six a embrassé les musiques tzigane, gitane et autres "simplement parce qu’ils en sont amoureux". Pas de vécu, mais une tonne de plaisir à les jouer.

Entre Paul Kunigis et Zoé Dumais, il y a évidemment un monde. Pour Kunigis, qui, dans une même chanson, peut passer de l’hébreu à l’arabe, le coup de foudre est ancien. Le musicien a su trouver ce que les musiciens poursuivent toute leur vie: un style, immédiatement identifiable. Si tout va bien, Balagane devrait même lui permettre de ramasser une statuette au prochain gala de l’ADISQ. "Entre nous (Yves Desrosiers et François Lalonde, coréalisateurs), on savait qu’on avait fait un bon disque. Mais l’engouement du public québécois a de quoi étonner. Je me dis: "Merde! ils ne comprennent pas un mot quand même!" Mais j’ai compris quelque chose en jouant à l’extérieur de Montréal, donc loin de son côté cosmopolite: la musique klezmer ou gitane, jusque dans le choix des instruments, n’est pas si loin du folklore québécois."

Les membres de Manouche, eux, ne comprennent probablement pas non plus les chansons traditionnelles en langue romane du répertoire balkan qu’ils interprètent, même s’ils se font un devoir de mélanger les genres, à la manière des nouveaux traditionalistes. "C’est plutôt sa sonorité, le côté à la fois déchiré et joyeux, qui vient nous chercher. Mais l’essence tzigane doit rester", précise Zoé.

"Moi, j’ai été élevé en Israël, dit Kunigis. Je ne parlais pas l’anglais et pourtant j’interprétais du Elvis Presley, les Beatles, même si je ne comprenais pas un mot de ce que je chantais. Bref, que ce soit en polonais ou en chinois n’y change rien du tout."

"Avant Balagane, je ne m’étais pas aperçu que j’avais un parcours de vie à raconter. Ç’a été une façon d’expulser les squelettes de ma garde-robe. Balagane, ce sont mes pensées à moi, mes joies, mes craintes aussi; c’est pourquoi je ne voulais pas me limiter à un seul style." Est-ce ce qui explique, entre autres, ce pont jeté entre l’Europe et La Nouvelle-Orléans? "Très exactement. Ça remonte sûrement à mon père, qui chantait en français, en polonais et en russe."

Et si le mélange festif de Jeszcze Raz a séduit le public pure laine, qu’en est-il de la réaction polonaise à Montréal? "Je reçois beaucoup de courriels dont la plupart sont très émotifs. Il y en a un qui m’a écrit: "Enfin une voix dans la diaspora!" Pour eux, c’est formidable d’avoir un Polonais sur scène qui ne fasse pas du folklore."

Zoé Dumais avoue de son côté que "la passion pour ces musiques, c’est aussi en réaction au cadre sévère, austère, voire rigide de nos formations classiques".

Que pense Kunigis de la démarche des jeunes de Manouche? "Pour des Québécois, je trouve ça génial. Bon, ils sont encore jeunes et n’ont pas le vécu lié à cette musique, mais ils l’ont adoptée et la jouent super bien. Dans la musique klezmer, de toute façon, il y a beaucoup de jazz, de dixie en particulier. Ça ne me surprend pas que ça se passe à Montréal. Le public est là, il n’est pas ghettoïsé dans ses quartiers et ses communautés."

Mais la meilleure explication du succès de la musique gitane, c’est probablement cette façon si typique – et pourtant si universelle – de chasser le spleen par un rythme irrépressible, comme le raconte Paul Kunigis: "Mon père est décédé à l’âge de 78 ans et deux mois avant sa mort, lors d’une visite chez moi et malgré sa santé fragile, il s’est levé et a commencé à danser et à chanter. C’était plus fort que lui. C’était sa manière de se garder vivant."

Manouche:
Le 27 septembre
Au Lion d’or
Jeszcze Raz:
Le 2 octobre
Au Club Soda
Voir calendrier World