

Ali Slimani : La route du raï
Le chanteur et percussionniste ALI SLIMANI n’a jamais joué dans son pays natal, si ce n’est dans sa jeunesse, lorsqu’il allait encourager l’équipe de foot au stade 20 Août d’Alger. Aujourd’hui émissaire par excellence du raï dans le monde, il chante l’espérance de paix dans son pays. Et l’espoir d’y retourner.
Patrick Ouellet
Près de sept ans après la parution de son premier album solo intitulé Mraya (RealWorld Records, 1996), Ali Slimani lançait en juillet dernier son successeur, Espoir/Hope (laJava Records). En plus des incessantes tournées découlant du succès remporté par Mraya, le souci d’aborder la suite de la meilleure façon possible justifiait un aussi long silence studio. "Dès la fin du contrat avec RealWorld, j’ai commencé à chercher; je voulais essayer de nouvelles choses, de nouveaux styles. Et ça m’a pris du temps pour rencontrer les bonnes personnes, celles qui allaient m’aider à bien faire les choses", explique-t-il depuis Londres, où il a élu domicile il y a une quinzaine d’années.
La rencontre de Mustapha Terki, le fondateur du festival Montréal électronique groove (MEG) maintenant devenu son gérant, mènera à celle de Veronica Ferraro, réalisatrice parisienne bien connue dans le milieu pour son travail avec Alannah Miles et Wyclef Jean, entre autres. En recrutant une pléiade de musiciens comme le multi-instrumentiste Yazid Fentazi, la chanteuse Selma, le rappeur Clotaire K, le guitariste Justin Adams (Robert Plant) et sa bonne amie, la chanteuse Natacha Atlas, Slimani rassemblait tous les ingrédients nécessaires pour créer un heureux mariage entre la musique algérienne traditionnelle et la pop, le reggae-dub, l’électro et le hip-hop.
"En Algérie, il y a quatre styles principaux; tu as le chaabi, le raï, le sahraoui du désert, puis tu as le kabyle berbère, précise Slimani. Sur mon album, j’ai choisi de faire tout ça. J’ai dit: "O.K., je suis Algérien et je fais de tout, pour tout le monde!"" Mais le raï occupe sans conteste une place de choix dans le coeur du musicien. "C’est une musique où on peut dire tout ce qu’on pense, tout ce qu’on veut faire, explique-t-il. On peut chanter sur l’amour ou sur les problèmes qu’on rencontre, au travail par exemple; le raï sert essentiellement à exprimer son opinion." Considéré par plusieurs comme la musique subversive des jeunes Algériens, le raï a longtemps été mal vu, même dans l’entourage immédiat de Slimani; il lui était interdit d’en écouter à la maison familiale d’El Anasser (banlieue paisible d’Alger), ce qui l’a forcé à se réfugier sur la plage avec ses amis pour se rassasier l’ouïe. "C’est seulement dans les années 80 que le raï a commencé à percer, poursuit-il. Avant ça, c’était très difficile; on en retrouvait au cabaret ou au restaurant, mais pas à la télé ou à la radio. Puis il a commencé à prendre sa place et s’est vite retrouvé à Marseille, à Paris, puis à Londres…"
Ali se considère choyé d’avoir pu s’installer en Angleterre, d’avoir travaillé avec des grands noms tels Peter Gabriel, Sinéad O’Connor et Jah Wobble, puis d’avoir foulé les grandes scènes du monde, comme il s’apprête à le faire au Canada grâce au Coup de coeur francophone. Toutefois, il compte bien retourner chez lui un jour et chanter pour ses semblables, ce qui apparaît de plus en plus plausible. "Je n’ai jamais joué en Algérie et j’aimerais bien y aller. C’est important pour moi… Je crois que depuis deux ou trois ans, ç’a commencé à se calmer; c’est beaucoup mieux maintenant. J’ai rencontré quelqu’un pour sortir mon album là-bas et j’entends y faire une tournée. Je connais des artistes qui y sont allés et ils m’ont dit que c’était super!"
Le 10 novembre à 20 h
Au Théâtre Petit Champlain/Maison de la Chanson
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