Black Taboo : Bêtes noires
Musique

Black Taboo : Bêtes noires

C’est l’histoire d’une gang de voyous vidéastes d’Orsainville qui se font connaître localement en parodiant la culture rap et ses excès par la diffusion de clips et de chansons grivoises. Âmes sensibles, ceci n’est pas pour  vous.

Non, Black Taboo, ce n’est pas que de la musique, de la TV, des strings, des cockrings pis des chaudières pour dégueuler, comme le dit la chanson Godbless the Topless qui brûle tellement les oreilles qu’on l’a bannie des ondes de toutes les radios de Québec pour son contenu offensant. C’est d’abord un collectif de cinéastes d’une dizaine de personnes (avec des filles!) qui vient de commettre un premier disque de rap métallisé au studio New Rock de la rue Saint-Jean (des collabos de ULC, DJ Nerve, The Awards, Try Again, Fred Fortin, Olivier Langevin et d’autres, le tout accompagné d’un DVD), et qui déplace des milliers de fans à chacune des soirées organisées pour y diffuser avec passion vidéos grossiers et musique indécente.

Conscient de l’influence malsaine engendrée par les propos misogynes de son personnage polytoxicomane, Richard Mangemarais assure qu’il est satirique en relatant cette rencontre particulière: "Plus tôt cette année, y a un jeune pas de poils dans la face qui m’a offert de fumer du pot avec sa pipe à eau juste avant de monter sur scène… J’avais beau lui dire que le show commençait dans deux minutes pis que je voulais pas parce que j’allais être poche si je fumais juste avant, la seule chose qu’il a trouvée à faire, c’est de sortir un sac de poudre (lire cocaïne), me défiant d’en prendre sur-le-champ…J’ai eu beau tenter de le raisonner – probablement sans résultat – sur les dangers de la consommation excessive, il reste que j’ai été confronté pour la première fois à l’influence que j’ai sur le comportement des jeunes qui écoutent et regardent nos trucs!" Du jamais vu au Québec depuis Plume Latraverse.

Loin de se cacher, Vice, reconnu pour sa propension à jouer le gay goulu, insiste: "On n’a pas de mission homophobe ou misogyne, le message de Black Taboo est le même que celui d’une joke de cul: le rire…" Et de légitimer, maintenant acculé au pied du mur du combattant de la libre expression: "Notre code d’éthique est simple: si on trouve ça drôle, on le fait, c’est tout." Ainsi, contre toute apparence, et ils le jurent, jamais vous ne verrez de femmes, d’enfants ou d’animaux être vraiment dénigrés, humiliés ou brutalisés dans l’oeuvre BT. Et cela, même si la conversation subséquemment amorcée portera sur l’idée de simuler un viol collectif pour un prochaine tournage…

Chatouillés sur les conséquences bénéfiques généralement admises du féminisme sur le genre humain, un sujet qui les touche à fond, il devient facile de découvrir que sous des allures d’innocents clowns, les Black Taboo sont minés à l’interne par de vifs débats. C’est ainsi que le dénommé Crazé Cori, muet depuis le début de la rencontre formelle, s’immisce alors dans la conversation en persistant et en signant, malgré les réserves de certains autres membres, que les jeunes mâles de notre époque sont "les malheureuses victimes du féminisme"! Ce qui expliquerait même le succès du groupe, qui répond ainsi à un besoin de défoulement chez les hommes ayant survécu à un discours féministe extrémiste castrant.

De visu, rien ne semble vraiment tabou pour ce clan formé à la fin du primaire et qui totalise une cinquantaine de productions cette année, dont le vidéoclip de D-Natural et une pub pour CKMF. Chose certaine, personne ne chôme parmi ces universitaires désillusionnés qui occupent des boulots merdiques (Mangemarais fait la plonge, Vice est concierge, etc.) et qui rêvent tous secrètement de vivre de leur art un jour. Et à la question "Que feriez-vous si on vous offrait de vivre dignement à la condition de modifier le contenu?", surprise: ils n’y avaient, semble-t-il, jamais réfléchi…

Lancement le 27 novembre à 22 h
Chez Dagobert
Voir calendrier Rock/Pop