Pierre Doré : L’homme derrière la mach’issime
Le Saguenay a toujours été une pépinière de talent. On n’a qu’à penser à la Fabuleuse et à Ecce Mundo. Et la liste pourrait être longue si on incluait tous les comédiens et chanteurs. Tous sont devenus des ambassadeurs de notre région à leur façon. PIERRE DORÉ, cofondateur de Québec Issime, a emprunté la voie de "l’événement". Portrait d’un "Blueberry Power".
Marie-Josée Belley
Photo : Stéfan Godro
Si on demande à Pierre Doré ce qu’il faisait avant de faire de la musique, il nous répondra: "Rien!" Car c’est tout jeune qu’il est tombé dans la potion. Sa grand-mère pianotait et son oncle jazzait. Son père a été un des pionniers à croire à l’industrie culturelle de la région. Tous lui ont montré la route afin qu’il devienne le créateur que l’on connaît.
L’homme de musique
C’est à 11 ans qu’il a fait ses premières armes dans la musique. "Un groupe de jeunes cherchait un bassiste, alors j’y suis allé et j’ai découvert la basse électrique." À cet âge, Pierre Doré avait déjà son rêve en poche, celui de "créer l’événement". À 14 ans, c’est l’entrée au Conservatoire de Chicoutimi. Ce fut une période d’ajustement pour le futur directeur artistique. Le classique et lui ne s’entendaient pas vraiment. "J’ai vécu ce qu’on appelle le complexe de l’archet durant cette période. On n’a pas le choix de faire du classique au Conservatoire." Mais le fait d’avoir des activités musicales parallèles l’a aidé à tracer sa voie dans le domaine artistique.
En effet, durant ses études, Pierre menait une "double vie". Il était toujours dans un groupe, ce qui lui a donné une base musicale un peu plus rock. Son oncle l’a également initié au jazz et son père lui a montré les secrets de l’orchestration. "Mon oncle Gaston m’a appris tous les standards du répertoire de jazz. En plus, j’étais entouré de l’orchestre de mon père Robert. Très jeune, je savais déjà comment ça marche, un orchestre. J’étais avancé pour mon âge au plan de la musique." En côtoyant les différentes facettes musicales, il savait déjà tout concernant l’organisation d’un spectacle, des arrangements sonores jusqu’aux techniques de scène.
Même si le Conservatoire n’était pas son endroit de prédilection, il a réussi à en tirer des acquis importants qui l’aident aujourd’hui dans son travail. "J’en retiens une approche musicale plus classique et une méthode de travail de la musique. Au cours de mes études, j’ai aussi développé le goût de composer et de créer. J’ai également travaillé en ensemble au Conservatoire. J’ai alors pu constater ce qui est pratique et ce qui est efficace pour travailler en groupe."
L’homme de gestion
C’est avec l’esprit de communauté que Pierre Doré dirige son équipe. La gestion a toujours fait partie de son cheminement. Très jeune, il a eu à faire de la direction d’équipe musicale. C’est vraiment la production d’événement qui l’intéressait. "C’est un cheminement normal pour moi, ça a toujours été comme ça. Au-delà de juste jouer de la musique, mon centre d’intérêt a toujours été la création."
Maintenant, avec plus de 100 personnes sous sa charge, il doit gérer le capital humain. Pour ce faire, la ligne de pensée de Pierre Doré reste la même depuis des années. Il y a deux choses qu’il veut conserver au sein des productions Logistik 22: l’esprit familial qui existe, mais aussi le professionnalisme qui a fait le succès de ses créations.
Pierre doit aussi gérer le fait que ses artistes reçoivent des propositions extérieures. "Je n’ai pas l’impression qu’on perd vraiment quelqu’un. Ce qu’on a cherché à créer avec la deuxième distribution, c’est de dire aux gens de la troupe: "Allez faire le projet, votre place est gardée." Les personnes qui vont travailler ailleurs ne sont pas dehors. Elles deviennent des ambassadrices de Québec Issime." En leur gardant une place au sein du groupe, c’est des emplois à l’année qu’il assure aux membres de son équipe.
Il n’y a pas que son personnel qui a des offres. Lui aussi reçoit souvent des propositions alléchantes. Mais il n’a pas le goût d’aller voir ailleurs. Il ne ferme pas les portes, mais Québec Issime, c’est son bébé, et il veut continuer à investir dans sa région.
D’ailleurs, il pense que les talents d’ici valent la peine qu’on les présente, car ils ont un petit quelque chose qu’on ne retrouve pas ailleurs. "Il y a des bons chanteurs partout. Mais ici, on a l’esprit de travailler ensemble, on est moins noyés dans la masse. Par exemple, lorsque je suis sorti du Conservatoire, on était quatre finissants. On se partageait tous les contrats. À Montréal, il y en avait 1500."
Selon Pierre Doré, l’innovation et le leadership sont le secret des talents saguenéens. "On a le goût de créer l’événement. C’est peut-être à cause de l’éloignement, à cause du Parc qui nous sépare. Ici, si on n’a pas d’opéra, on va le créer. S’il n’y a pas de spectacles, on va en faire. On a ce qu’on appelle le "Blueberry Power"!"
L’homme de projet
Pierre Doré se dit fou, workaholic et maniaque. Fonceur et généreux, il est un "gars d’affaires concrètes." Des projets, il en a plein la tête encore. Les gens de Logistik 22 n’ont pas à s’inquiéter de leur avenir: 2004 sera une année charnière et chargée pour le "petit gars de Shipshaw" et sa troupe. En plus de préparer le 10e anniversaire de Québec Issime, celui-ci travaillera à positionner le spectacle Party dans un casino.
Malgré tous ces projets, Pierre Doré est et restera au Saguenay. Il faut maintenant le surveiller, car il nous présentera bientôt une création originale. Mais ça, "on en reparlera le temps venu", comme il dit.