Fabiola Toupin : L’ange de feu
Le hasard n’existe pas, FABIOLA TOUPIN saurait le confirmer. L’enfant chérie de la chanson à Trois-Rivières voit actuellement sa carrière prendre un tournant insoupçonné, et ce n’est pas parce qu’elle a forcé les événements, au contraire. Un mélange de circonstances et de rencontres inattendues se trouvent à l’origine de cette lancée, qui pourrait bien la propulser vers d’incroyables sommets.
La chevelure noisette, le regard fougueux, Fabiola Toupin se distingue d’une kyrielle de chanteuses populaires dont la carrière s’annonce pour être un triste feu de paille. Patiente, l’interprète de 28 ans ne s’est jamais travestie pour accéder plus vite au succès. Elle s’est plutôt accrochée à un style musical assez hasardeux, mais qui lui colle vraiment à la peau: la chanson française. Aujourd’hui, elle récolte les premiers fruits de sa persévérance, additionnant les rencontres clés en Europe.
La jeune musicienne, pourtant avare de nouveaux défis, évite de se dessiner un futur très clair. Confiante, elle se laisse porter par les humeurs du vent. Heureusement, celui-ci souffle dans la bonne direction: à l’est du Québec, dans un périmètre tellement large qu’il englobe tant la France que l’Espagne. Si, pour plusieurs artistes québécois, l’Europe correspond à un rêve quasi inaccessible, Fabiola l’a fait craquer malgré elle lors d’un spectacle organisé à la toute dernière minute, qui l’a amenée à se produire devant des membres de la solide équipe de Charles Aznavour. Ainsi, au lieu de gravir les échelons, marche par marche, comme la plupart des interprètes, la brunette a décroché la lune d’une seule note!
L’effet domino
La première véritable bourrasque dans sa vie professionnelle remonte cependant à il y a près de cinq ans, alors qu’elle participe à l’émission de Monique Giroux à la radio de Radio-Canada, Les Refrains d’abord. Elle y interprète un hommage à Piaf qui chamboule le cœur de deux piliers de la chanson au Québec, dont Claude Léveillée. Par la suite, un tas de coïncidences s’emboîtent les unes dans les autres, et tracent tranquillement sa destinée. Les deux artistes, séduits par sa prestation de 1999 sur les ondes de la Première Chaîne, l’invitent à chanter au Plaisir croît avec l’usage (Télé-Québec). Puis, c’est au tour de la comédienne Nicole Leblanc, mère de son amie Christine Germain, de lui demander de monter sur ce même plateau. Cette fois-là, Sylvain Lelièvre, qui doit jouer une pièce, se désiste au dernier moment pour cause de maladie. Bénie des dieux, Fabiola Toupin a alors la possibilité de présenter deux compositions de son fidèle compagnon de scène et ami, Manu Trudel. Une pierre deux coups, elle a désormais en main un excellent document vidéo à présenter aux gens du show-business. La mystérieuse féline sait à quel point cet enregistrement s’avère précieux, les démos ne s’avérant pas sa meilleure carte de visite: "Je suis une fille de scène… Je n’ai jamais trouvé que je performais à ma juste valeur en studio."
Fait surprenant, Lynda Lemay a aperçu la jeune chanteuse à l’émission de Télé-Québec et a craqué pour la qualité de son interprétation. Elle la prend sous son aile et lui propose d’incarner le rôle principal de son drame musical. La première est prévue à la fin de l’année 2004 en France. Touchée par la beauté de l’écriture de Lemay et par le propos de l’œuvre (la culpabilité), la Trifluvienne accepte le défi. Elle travaillera donc aux côtés de la célèbre auteure-compositrice-interprète, du violoniste Daniel Jean et de deux autres créateurs actuellement inconnus. Les répétitions se dérouleront durant les mois de juillet et août au Québec.
Victime de son talent
Pareille à ses prédécesseurs, Fabiola Toupin a cru un jour que l’avenir, pour les jeunes artistes, se trouvait dans la métropole. L’expérience s’est révélée désastreuse. "Je suis full ambition, mais pas carriériste. J’y suis allée à Montréal. J’avais un appartement qui me coûtait les yeux de la tête. Je me sentais seule. J’ai donc sous-loué mon appartement avant la fin du bail, se rappelle l’autodidacte. On est bien à Trois-Rivières, on est au cœur du Québec!" C’est sans doute la raison qui explique son entêtement à d’abord jouer en région. Un choix qui n’a rien de malheureux, car, bien qu’elle exploite le créneau de la chanson française, elle a toujours pu y vivre de son art. Une donnée assez particulière en Mauricie. Très gâtée par le milieu trifluvien, la souriante interprète participe à une tonne de projets chaque année: elle est sollicitée par de multiples organismes communautaires, fait partie de la production Où est Santa? de la compagnie de danse L’Astragal et s’est déjà jointe à l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières à l’occasion d’un concert estival donné dans le cadre de l’International de l’art vocal. Même un créateur de Montréal ne saurait demander mieux, s’exclame la chanteuse.
Bête de scène, Fabiola Toupin se révèle aussi une féroce femme d’affaires; elle aime avoir un œil sur ses affaires. Son emploi du temps prenant de nouvelles proportions, elle s’est cependant armée d’un gérant, Christian Bilodeau. "Je ne suis pas capable de gérer ça toute seule. Il y a beaucoup trop de pression. Et quand je vis trop de pression, je laisse de côté le développement et je reviens à la base: les spectacles ", avoue l’habituée du Zénob.
Son agenda chargé pour la prochaine année et demie, la Trifluvienne réalisera la première partie d’Yves Duteil le 11 février à la salle J.-A.-Thompson, en tant que porte-parole régionale de Trois-Rivières en chansons. Accompagnée au piano par Gilles Hamelin, elle concoctera un hommage à Félix Leclerc. En mars et avril prochains, elle effectuera une tournée d’une quinzaine de villes en France, puis un quatrième séjour à Barcelone à la fin du printemps. Pour la première série de représentations, Manu Trudel, le compositeur qui lui a permis de chanter du matériel original, la suivra. Fabiola Toupin raconte qu’elle en profitera au maximum, car ce sera peut-être le dernier voyage professionnel qu’elle fera à ses côtés. En effet, la diva songe de plus en plus à s’entourer d’une bande de musiciens qui lui permettraient de percer d’autres marchés. Serait-ce que la petite fille à l’intérieur de Fabiola Toupin annonce être enfin prête à devenir une femme?
Le 11 février à 20 h
À la Salle J.-A.-Thompson