H’Sao : À voix haute
On connaît le raï algérien, le m’balax du Sénégal, les harmonies vocales d’Afrique du Sud, mais qu’en est-il de la musique du Tchad? Les amateurs de world beat au Québec sont heureusement parmi les seuls à se faire une idée sur la question, grâce à la présence providentielle chez nous du groupe H’Sao: cinq garçons et une fille, moyenne d’âge de 20 ans, qui ont été signés par Marc Labelle, un gérant de Saint-Charles-sur-Richelieu sidéré par leur talent venu de loin. Caleb, l’aîné de cette formation dynamique issue de deux familles de N’Djamena, explique: "La musique de notre pays dépend beaucoup de sa position géographique. On est enclavé entre le Maghreb au nord, avec ses musiques arabes, et les traditions et rythmes des bantous ou même des zoulous, plus au sud. C’est un mélange des deux, selon les régions."
L’autre attrait irrésistible de H’Sao: les voix. Inspirés du gospel des églises dans lequel ils ont baigné dès l’enfance, ils commencent par exceller dans les performances a cappella pour une raison bien simple: ils n’ont pas un sou pour s’acheter des instruments! Là encore, Caleb, un guitariste pourtant fort intéressant, raconte un truc étonnant: "Je n’avais pas de guitare. C’était comme un instrument précieux que j’avais le droit de toucher seulement une fois par semaine. Notre atout était donc les arrangements vocaux; c’est resté notre véritable force. Parce que nos voix, personne ne peut nous les enlever."
Tour de force, oui. L’été dernier, les six frères et sœurs ont fêté en beauté la sortie de leur premier album en montant sur la scène "Tropiques" du Festival de Jazz devant près de 10 000 spectateurs. Des rythmes nouveaux, une approche carrément mélodique, et puis cette mélancolie dans les voix qui semble toucher de plus en plus le public majoritairement blanc qui vient voir les shows et écrit des courriels après avoir acheté l’album avec une régularité surprenante depuis le début de l’été: "C’est surprenant, dit Caleb. Ça va plus vite qu’on le prévoyait et mieux qu’on l’aurait espéré. Non seulement ce n’est pas un public africain, mais c’est surtout la réaction des gens après les shows qui est formidable. Pourtant, nous n’avons que des bribes en français mais les spectateurs semblent vraiment entrer dans notre univers."
Le 28 février à 20 h
Au Théâtre Belcourt
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