Baaba Maal : De plus en plus Maal
Musique

Baaba Maal : De plus en plus Maal

De mieux en mieux, en fait. Le chanteur sénégalais que l’on voyait comme la future superstar de l’afro-pop est revenu pour longtemps à l’essentiel. Une musique dépouillée, acoustique, authentique et habitée. Conversation avec un visiteur attendu.

La première fois que j’ai vu Baaba Maal, c’était au Festival d’été de Québec, au début des années 90. Une performance flamboyante. Des orchestrations rutilantes avec des acrobaties scéniques et des prouesses vocales spectaculaires. Une musique africaine moderne, renforcée dans les grands studios londoniens, et l’image apparente d’une star rock façonnée par le marketing des disques Island. Entre l’afrobeat high-tech et le m’balax tonitruant, avec une voix impressionnante et haut perchée que l’on voulait rivale des Youssou N’Dour et Salif Keita, quelque chose a fini par clocher. Sur cette lancée d’une musique du monde made in Babylone qui flirtait volontiers avec les ambiances de club, l’ambitieux Nomad Soul, réalisé avec l’équipe zélée d’Afro Celt Sound System, montrait peut-être la fissure. Heureusement, le principal intéressé est le premier à s’en rendre compte. Le nomade rentre chez lui et retrouve son âme intacte. Maal opère un revirement spectaculaire, met au rancart les cuivres et les synthés, reprend sa guitare acoustique et renoue avec son meilleur ami.

"Je voulais tout simplement revenir à la notion la plus pure de ce qu’on appelle musique. Une musique naturelle, simple, où la voix et les instruments sont très purs, enregistrés avec le moins d’effets possible. C’est ainsi que j’avais commencé avec Mansour Seck. Nos deux pères étaient de très grands amis. On avait fait des chansons et du théâtre ensemble dans notre jeunesse. Et bien des enregistrements sur des magnétophones rudimentaires! Puis, on était partis à l’aventure en Europe et il nous fallait laisser quelque chose, un premier disque qui serait surtout destiné à notre communauté Pulaar. Mais les immigrés sénégalais ont voyagé avec ces chansons un peu partout. Ils sont restés très connectés au pays par ce lien."

Baaba Maal fait référence ici à l’album Djam Delli, en duo avec Seck; un modèle du genre, vénéré par nombre d’amateurs et de connaisseurs sur la planète world. Les deux hommes, avec des percussionnistes, ont tenté de réitérer l’exploit avec Miyu-nee / Missing You au début du troisième millénaire. Ils ne se quittent plus depuis.

"Quand on a ce genre de démarche, il n’y a pas que les instruments et les voix. Il y a aussi l’environnement qui joue. Tous les bruits, la nature et les textes se mélangent. C’est comme ça que l’on peut capter l’instant où l’on a joué." En témoignent les plus beaux moments de ce dernier compact enregistré en pleine nuit et en plein air dans le petit village de Nbunk, où les criquets et les bruits des vagues prennent leur place dans la partition. "C’est l’ambiance de l’Afrique. Là-bas, quand on fait de la musique, une musique qui n’est pas commerciale, tout s’intègre. Même les voix des gens qui causent à côté rentrent dans le cadre avec les mélodies et le message. On essaie de tout capter, les odeurs, les couleurs et l’énergie vraie. C’est l’essence même de la vie dans certaines parties du globe; la musique qui a accompagné des générations et des générations.

Le 27 mars
Au Spectrum