Musique

Florent Vollant : Visions extraordinaires

FLORENT VOLLANT ramène de son Labrador natal une musique qui respire les grands espaces, la nature et la liberté des nomades. Pour maintenir en vie son souvenir. Mais aussi pour attiser celui de tous.

Le mouvement et la distance sont deux concepts fondamentaux chez les Innus. Et leur amplitude prend des proportions exponentielles à mesure que croît la latitude. "Moi, quand je bouge pas, j’ai des problèmes, confie l’auteur-compositeur-interprète Florent Vollant. Mon équilibre, je le trouve dans le mouvement; c’est vraiment un besoin pour moi. C’est un trait culturel mais aussi une question de survie; chez les Innus, à -40 o, si tu bouges pas, ça va pas bien… Ou ça ira pas bien!" prévient l’ex-Kashtin, qui rapplique à l’Anglicane pour présenter Katak (D7, automne 2003), album éthéré, porté par les guitares acoustiques, les percussions traditionnelles et la langue de ses ancêtres. Il sera accompagné par Alain Quirion (batterie), Michel Dagenais (contrebasse) et André Lachance (guitare), de Québec.

Né sur les rives du lac Wabush en 1959, Vollant doit rapidement évacuer les lieux, avec une centaine de ses semblables, car l’exploitation minière a rendu l’eau du lac impropre à la consommation. Sa famille se réinstalle à Maliotenam, près de Sept-Îles, où il grandira. "Donc, très jeune, j’ai commencé à voyager. Et des grandes distances, là; parce qu’on n’a pas tout à fait la même notion du temps et de l’espace… Il m’arrive d’aller encore plus au nord et d’y rencontrer des chasseurs de caribous, des pêcheurs; c’est des gens que j’admire énormément, qui ont une poésie extraordinaire. Des fois, ils m’invitent, alors je m’intègre parmi eux; ils sont très drôles. Ils disent: "Regarde, viens-t’en, man; c’est pas loin." Pas loin, pour eux autres, c’est trois jours de ski-doo… Après deux jours, je commençais à me demander si on allait arriver! (rires) "Oui, oui; c’est pas loin!"- "Mais tu m’as dit ça hier!..""

Les talents de conteurs des anciens ne cessent d’inspirer l’artiste. "Il y a des aînés là-bas qui n’ont aucune notion de français et qui ont gardé une vision, une pureté qui n’est pas, je dirais, dérangée, soit par la télé, la radio ou quoi que ce soit… C’est des poètes qui s’ignorent; ils ne se doutent pas une seconde qu’avec tout ce qu’ils te racontent, tu pourrais écrire un livre! Et moi, j’en fais des chansons. C’est une richesse que je respecte beaucoup, c’est très précieux… Puis ça s’en va, là; chaque fois qu’il y en a un qui part, c’est des livres qui se ferment. Avec ma musique, j’essaie de capter ça et d’amener ça à voyager…"

De faire circuler le tout pour inciter au rapprochement, car les crises épisodiques et les troubles de communication entre les deux peuples émanent selon lui de problèmes plus profonds. "Premièrement, c’est lié au plan historique; il n’y a jamais vraiment eu de reconnaissance de ce que les autochtones ont apporté aux sociétés des arrivants; ça n’a jamais été reconnu officiellement par personne. Ensuite, il y a tout le phénomène de l’éducation, ce qu’on a appris à l’école. Il n’y a rien de glorifiant quand t’es autochtone puis que tu regardes dans les livres d’histoire; c’est très difficile, ça… Je trouve qu’il n’y a pas de volonté politique, de part et d’autre. La solution? Elle réside dans l’enseignement et la compréhension, ce qui est énorme comme travail."

Le 7 avril en première partie de Georges Moustaki
Au Centre national des arts
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