Papillon : L’école du rock
Intéressante bibitte que ce PAPILLON. Avec sa gueule de jeune premier, il chante du gros rock sale et se donne tellement sur scène qu’il s’est déjà cassé des dents, une côte et déchiré un ménisque au genou! Après avoir écumé les bars de Londres, de Toronto et de New York, le rockeur est rentré au bercail et est en train de se tailler une place sur la scène québécoise, tout en ayant à cœur de frayer un chemin pour la relève.
Par un beau dimanche avant-midi, le porte-parole des huitièmes Découvertes de la chanson de Magog nous reçoit dans son appartement montréalais. Petit lendemain de veille pour le papillon de nuit… À 11 h 30, le chanteur m’accueille chez lui avec son plus beau sourire, mais avoue s’être levé il y a cinq minutes à peine. Pourtant rien n’y paraît. L’humeur est joyeuse, le regard, clair, et la voix aussi. Papillon a 35 ans bien sonnés, mais on lui en donnerait 26 tout au plus. "Prendrais-tu un café, un jus?…" me demande gentiment l’auteur de Kung fu minou, tandis que la radio fait jouer "son préféré", Tom Waits. Entre deux gorgées de "brown juice", Papillon discute projets, musique et relève.
C’est qu’il y a beaucoup à dire. En plus de promouvoir les Découvertes de la chanson de Magog – dont les demi-finales et les finales se tiennent du 12 au 16 mai au Centre d’Arts Orford – le chanteur planche non pas sur un mais bien sur deux albums; l’un en français et l’autre en anglais. Il faut dire qu’avant Mal élevé, son premier disque en français sorti il y a un an, "Papi" avait lancé trois disques en anglais; deux avec les Cherry Poppers et l’autre sous le pseudonyme de Papi Taylor. "J’ai vraiment un gros tas de tounes en anglais!" note-t-il lorsqu’on le questionne sur le projet anglophone.
Le disque en français, Papillon promet qu’il sera différent de son précédent, dont on a beaucoup dit qu’il était cru et salé. "Le premier était très léger et le deuxième sera un peu plus pesant", souligne le chanteur originaire de Cap-Santé, qui a décidé de faire appel à ses chums Pascal Dufour des Respectables, Claude Pineault et David Laflèche. "Le premier album, je l’avais pas mal fait tout seul dans ma petite bulle. Dans le deuxième, je m’amuse avec les copains. Ça donne une autre saveur. C’est l’fun d’aller chercher le talent des autres."
Découvreur de talents
Parlant du talent des autres, le désir de faire connaître et valoir la relève est louable chez Papillon. De concert avec le patron de sa compagnie de disques, Yves-François Blanchet, et avec le directeur du Cabaret du Plateau à Montréal, Thierry Bolduc, le rockeur a mis sur pied les Lundis à Papi. Chaque semaine, il chante sur la scène du Cabaret du Plateau avec des artistes invités, tout en faisant place à un artiste de la relève en première partie.
"J’ai vraiment fait le saut quand je suis revenu au Québec il y a un an et demi, note-t-il. J’ai quand même joué dans les grosses villes américaines, des grosses villes européennes et on n’a rien à envier à personne. On a vraiment beaucoup de talent ici, mais c’est très dur de se faire voir. C’est dur de rentrer dans les radios commerciales, c’est dur de se faire entendre, y’a de moins en moins de stages pour jouer."
Et pour les Découvertes de la chanson de Magog, le chanteur avoue avoir eu un coup de foudre lorsqu’il a rencontré le fondateur Jean-Claude Gosselin et la directrice générale, Natalie Gravelle. "Je suis tombé en amour avec ces gens-là, deux personnes qui sont dans le milieu des arts vraiment pour les bonnes raisons. Un: ils aiment la musique. Deux: ils veulent offrir une porte aux jeunes talents. Quand j’ai vu du monde aussi impliqué là-dedans, j’ai fait: "Ben sûr (que je veux devenir porte-parole)!""
À la dure
Pendant la durée du concours, Papillon sera présent pour répondre aux questions des jeunes participants. C’est qu’il a appris à la dure, le Papillon. Entre 18 et 20 ans, il a participé à quelques concours dans les clubs, mais à 20 ans, il est parti pour Londres avec un de ses chums et sans "une crisse de cenne". "On s’est dit: "on va aller faire du rock." On l’a fait!" raconte Papillon. "Je tripais ben gros sur Bowie et tous ces gars-là. Londres, c’était très mythique pour moi. C’était La Mecque."
Pour survivre, le chanteur n’a pas fait que du rock’n’roll; il a aussi collectionné les jobines. "Je les ai toutes faites, surtout en Angleterre. C’est tellement cher, tellement dur. Le public est tough (…) C’est la dure école. New York, c’est facile à côté de ça."
Et comme il a appris de ses "350 000 erreurs", Papillon compte bien en faire profiter les jeunes artistes qui seront à Magog à la mi-mai. "Si je suis capable d’aider des jeunes à bien s’enligner parce qu’ils ont la piqûre, à bien s’entourer, à savoir combien la business peut être merveilleuse et dure et sans cœur, tant mieux! Faut pas que les gens tombent juste dans la poésie du monde musical, parce que autant c’est un monde merveilleux, autant c’est une guerre constante. Je ne ferais pas d’autre métier, mais c’est un métier très, très, très dur. Y’a ben des gens qui nous envoient des curve balls rough dans cette business-là. Il faut savoir s’entourer."
Visiblement, Papillon a su bien s’entourer. Et visiblement, il est heureux d’être de retour au Québec après avoir galéré pendant toutes ces années. Seul regret: ne pas pouvoir faire plus de scène. "Quand t’es un gars qui tripe à faire du live, c’est sûr qu’il y a une certaine limite (au Québec). Si tu joues trop, si tu t’es trop fait voir, y’a pu d’intérêt parce qu’il n’y a pas beaucoup de monde. Donc, un gars comme moi qui aimerait faire 150 shows par année, c’est pas concevable. Une tournée, c’est 40 shows, t’attends un peu et après tu recommences."
Papillon sera tout de même à La Pointe aux Artistes ce vendredi à Saint-Jean-sur-Richelieu. Et cet été, à travers le travail sur ses deux albums, il participera à quelques festivals en attendant de repartir en tournée à l’automne.
Du 12 au 16 mai
Les Découvertes de la chanson de Magog