Susie Arioli Band : Rapport amoureux
À la fin des années 90, la scène musicale du jazz a assisté à un retour en force de formes d’expression populaires dans les années 30 et 40 comme le swing et le lounge, particulièrement aux États-Unis et dans l’Ouest du Canada. Au Québec, la percée du Susie Arioli Swing Band s’est effectuée dans cette mouvance. Quelques années après le temps fort de ce "swing revival", le succès du groupe, loin de se démentir, se confirme.
L’esprit ludique, l’innocence, le goût de la fête animent plus que jamais la formation. Le dernier opus, That’s For Me, offre une musique à la fois en continuité et en évolution. En entrevue, Susie Arioli et Jordan Officer expliquent pourquoi la formation a changé de nom, laissant tomber le mot "swing": "Dès le début, nous ne nous sentions pas associés à ce mouvement. C’est surtout en dehors du Canada que les gens ne s’attendaient qu’à du swing. Nous ne voulions pas être enfermés dans un style." Depuis cinq ans, les deux musiciens ont pris beaucoup d’assurance et sont capables de transcender le genre pour s’exprimer davantage personnellement: "Le style n’a pas changé vraiment. On a débuté dans un style. Maintenant qu’on le connaît, on a moins besoin des aspects techniques. On est parvenu à exprimer davantage nos émotions, à nous "connecter" à nous-mêmes et à suggérer une vision intime. Et ceci est davantage mis de l’avant, ça transparaît, c’est plus apparent." Le band a conservé sa couleur inimitable, et remporte actuellement un succès à la fois critique et populaire.
Une variété de styles
La curiosité, l’enthousiasme et l’énergie de Susie Arioli, de Jordan Officer et de leurs complices les ont amenés à s’intéresser à une panoplie de styles musicaux liés au jazz et à la musique populaire des années 20, 30, 40 et 50, notamment le swing, le blues et le rock’n’roll. Des musiques noires, mais aussi la grande chanson américaine. Des musiques où la voix, les cordes et les cuivres festoient allègrement. Des musiques qui chauffent à celles qui font s’enlacer les couples. La force du groupe est de montrer ce qui unit toutes ces tendances.
Arioli et Officer puisent à nouveau abondamment parmi les standards ou les classiques qui ont fait les belles heures du swing. Parmi ces forts en thème qui ont contribué à faire de Tin Pan Alley une incroyable aventure: les Harold Arlen, Jerome Kern, Richard Rodgers. Mais, cette fois, les deux musiciens s’ouvrent au swing français, plus précisément le swing manouche, se sentant enfin prêts à aborder l’univers de Django Reinhardt d’une façon qui ne soit pas servile, docile, mais vraiment personnelle. Autant que le swing sinon davantage, le blues, cette musique en demi-teintes, a nourri des heures d’écoute et de jams avec des chums. Le pianiste Memphis Slim occupe une place importante dans la mémoire musicale de la chanteuse et du guitariste. Arioli porte également une admiration inconditionnelle à Peggy Lee, cette merveilleuse chanteuse qui assura la transition entre le jazz et la chanson populaire (That Old Feeling, Black Coffee, Fever). Le band reprend It’s a Good Day.
Les compositions de Jordan Officer s’appuient sur des styles musicaux qui brassent. Victor Stomp se rattache à la fin des années 20: "On parle de Stomp pour la première fois dans les années 20. Par exemple, Coleman Hawkins sous la direction de Fletcher Henderson. C’est plus basé sur le rythme que sur l’harmonie. Les accents portent sur les deuxième et quatrième temps. C’est ce qui assurera la transition entre le style Nouvelle-Orléans et le swing. Hot Head se rattache aussi au tournant des années 30. On disait "sweet" pour parler d’un solo pop et "hot" pour un solo en colère, fâché. Hot Head joue sur le double sens du mot "head": mélodie et esprit en colère."
Le 15 mai avec Jordan Officer
Au Barrymore’s Music Hall
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