Patrick Watson : Arrêt sur images
Musique

Patrick Watson : Arrêt sur images

"Je préfère écouter de la musique classique plutôt que des artistes contemporains qui œuvrent dans le même créneau que moi. J’ai trop tendance à analyser leurs sonorités et à comparer leurs arrangements aux miens."

C’est en ces termes que l’anglophone Patrick Watson, beau gosse rêveur et habile compositeur, tente d’expliquer ce qui inspire sa musique. Jusqu’à présent, un bouche à oreille persistant permet de croire que le pianiste pourrait être la perle cachée dans la vase de la pop anglo-saxonne québécoise. Un talent, du reste, facilement exportable comme il s’en trouve de plus en plus à Montréal

Si la sensibilité de Watson lui vaut de plaisantes comparaisons avec les musiques pour piano de Philip Glass, la voix du jeune homme de 24 ans rappelle instantanément le souvenir déjà mythique de Jeff Buckley sans en être toutefois une simple copie carbone.

On y sent tout de même cette même détresse humaine, ce même sentiment d’urgence intrigant. "Avant de composer une pièce, je me fais un film dans ma tête, avoue Patrick. Je vois des images, un scénario et une atmosphère précise que je cherche à transposer au piano. Les mots me viennent aussi plus facilement lorsqu’un contexte se dessine dans mon esprit."

Dernier fruit de son imagination, l’album Just Another Ordinary Day se veut donc la trame sonore d’un long-métrage enfoui dans sa substance grise. "La bande-annonce de ce film se trouve sur mon site Web (www.patrickwatson.net). On peut y voir un type sauter en bas d’un pont. Je ne cherchais pas à insister sur le thème du suicide, mais à symboliser quelqu’un qui quitte un contexte, qui se jette dans le vide afin de se détacher de la routine qui l’emprisonne. Mon album débute au moment même où ses pieds quittent le pont pour se terminer à l’atterrissage."

Cette descente se fait par paliers où se succèdent valses (Shame), pop expérimentale (Gealman) et rebondissements (Mary). Le piano se mêle aux arrangements de cordes, de cuivres et aux textures parfois plus électroniques dont le compositeur use avec parcimonie. Patrick se dit d’ailleurs autant influencé par Glass que par Björk ou Pink Floyd, quoique la musique classique reste son principal dada.

Si celui qui signait la musique du CD/livre de la série de photos sous-marines de Brigitte Henry, Waterproof9, passe injustement inaperçu depuis la parution de son premier compact, c’est qu’il se fait plutôt avare de concerts. Rarissimes, ses prestations misent sur une production osée où se juxtaposent orchestrations et projections visuelles. "J’aime donner de gros concerts complexes et longs à préparer. Je donne bien quelques spectacles sans publicité au Café Sarajevo, par exemple, mais je préfère me commettre deux fois par année lors de performances plus exigeantes. Les gens doivent se souvenir longtemps de mes concerts."

Patrick Watson en concert le 15 mai au 3655, boulevard Saint-Laurent, loft 302, à 21 h 30

Album disponible: Just Another Ordinary Day (Mintaka Conspiracy / Local)

Quartier de résidence: Plateau Mont-Royal

Son clin d’œil montréalais: les promenades sur le mont Royal à 4 h du matin en état d’ébriété avancé.

Enregistrement qui marqua sa vie: La Mer de Claude Debussy